Alors qu’elles avaient plutôt bien résisté à la crise sanitaire, les économies des pays d’Europe de l’Est ont connu en 2023 une hausse spectaculaire des défaillances d’entreprises, selon une récente étude de Coface. En cause : les répercussions macroéconomiques de la guerre en Ukraine, mais aussi des défis internes qu’elles peinent à relever.
L’an dernier, sur 12 pays passés en revue, seuls trois (la Bulgarie, la Croatie et la Lettonie) ont enregistré une diminution du nombre des défaillances. La hausse est générale pour les neuf autres (la République tchèque, l’Estonie, la Hongrie, la Lituanie, la Pologne, la Serbie, la Slovaquie, la Slovénie et la Roumanie).
Les procédures d’insolvabilité ont progressé de 38,9 % entre 2022 et 2023, marquant une nouvelle année d’augmentation à deux chiffres. « Cette hausse a été alimentée par une combinaison de facteurs internes et externes qui ont amplifié les défis auxquels sont confrontées les entreprises de la région, en particulier les tensions géopolitiques et les pressions inflationnistes », explique Grzegorz Sielewicz, responsable de la recherche économique de Coface pour l’Europe centrale et de l’Est.

Coup de frein sur la croissance
La guerre en Ukraine et l’inflation ont entraîné un ralentissement sans précédent de la croissance moyenne du PIB dans la région.
Alors qu’elle atteignait+ 4 % en 2022, elle a chuté à +0,5 % l’an dernier, enregistrant le taux le plus bas depuis le début de ce siècle, hors crise financière de 2009 et pandémie de Covid-19. Les trois pays baltes, ainsi que la République tchèque et la Hongrie ont même affiché des croissances négatives de leur PIB en 2023.
Main d’œuvre et coût des intrants
Certes la proximité géographique de ces pays avec l’Ukraine ont eu des conséquences dans toute la région perturbant les chaînes d’approvisionnement et contribuant à une flambée des prix de l’énergie. Mais ces économies ont également maille à partir avec des défis internes qui entravent la riposte à ces chocs externes.
Les économistes de Coface soulignent en particulier les effets néfastes de la pénurie de main-d’œuvre et l’escalade des coûts des intrants, des facteurs qui ont pesé lourdement sur la santé des entreprises. Les secteurs de la construction et du commerce, particulièrement impactés par les pressions salariales et le ralentissement de la demande ont été les plus touchés.
Nouvelle augmentation des défaillances attendue cette année
Et l’avenir ne s’annonce pas meilleur, selon Jarosław Jaworski, directeur général de Coface pour la région Europe centrale et de l’Est. « Nous prévoyons une nouvelle augmentation des défaillances en 2024, bien qu’à un taux inférieur à celui de l’année précédente, estime-t-il. Au niveau mondial, les entreprises n’atteindront toujours pas leur plein potentiel de croissance économique en raison des défis auxquels elles sont confrontées dans leurs activités commerciales. »
Malgré des signes de rebond de la consommation, notamment pour les produits de première nécessité, 2024 sera marqué par une croissance limitée du chiffre d’affaires, des marges en baisse et des défis continus pour les entreprises exportatrices. L’atonie de la demande étrangère, en particulier de l’Allemagne, la hausse des prix des produits de base et des coûts de main d’œuvre (avec l’augmentation du salaire minimum) feront peser une pression forte sur les entreprises de la région.
Sophie Creusillet