Le fabricant savoyard de chaussures éco-conçues Saola Shoes se lance dans une opération de levée de fonds avec, en ligne de mire, une accélération forte aux États-Unis et en Europe. Depuis sa première collection en 2018, la jeune entreprise a déjà vendu 120 000 paires de sneakers. Sur son dernier exercice, 20 % seulement des 27 000 paires commercialisées ont été achetées en France.
La plupart des startup tricolores se lancent en France avant d’élargir leur terrain de jeu à l’international. La marque savoyarde Saola Shoes, a suivi le chemin inverse. C’est aux États-Unis qu’elle a ainsi vendu, en 2018, la totalité de sa première collection. Une gamme de sneakers éco-conçues fabriquées au Vietnam et dont l’empreinte carbone serait, selon Saola, trois fois moins élevée que la moyenne du marché grâce à l’utilisation de matériaux recyclés ou naturels (80% des composants des chaussures).
Guillaume Linossier,
un parcours très international
Quatre ans plus tard, la startup a grandi, elle a vendu plus de 120 000 paires de chaussures à travers le monde. Dont 20 % seulement en France. Une spécificité qui s’explique sans doute par le parcours très international de son fondateur, Guillaume Linossier. Ce dernier a, en effet, réalisé, presque toute sa carrière professionnelle aux États-Unis, en tant que dirigeant de la filiale américaine du groupe Lafuma (Lafuma, Miller, Eider).
« J’ai quitté le groupe et j’ai créé Saola car les grandes marques de l’outdoor n’étaient pas suffisamment engagées à mon goût sur les sujets environnementaux. Autant en termes d’éco-conception que de préservation de la biodiversité. J’ai commencé à y réfléchir dès 2016 et lorsque ma première collection a été prête en 2018, naturellement ce sont vers les États-Unis que je me suis tourné. C’est là que j’avais tout mon réseau », raconte Guillaume Linossier.
A tel point que son premier client a été REI, la plus grande enseigne outdoor américaine. Le fondateur de l’entreprise est épaulé dans son projet par François Chaudoreille, son associé, à la fibre lui aussi hautement internationale.
Désormais, Saola réalise un cinquième de son chiffre d’affaires en France, 40 % dans le reste de l’Europe, 30 % aux États-Unis et 10 % dans d’autres pays (en particulier la Nouvelle-Zélande et Israël). La marque est présente dans une vingtaine de pays, en ligne et dans 160 points de vente physiques. La moitié de son chiffre d’affaires (1,5 millions d’euros en 2022 avec une dizaine de collaborateurs) sont enregistrés en boutiques physiques, 50 % par les ventes en ligne.
Lever des fonds pour accélérer aux États-Unis
Pour accélérer, Saola veut désormais lever 4,5 millions d’euros en 2023, dont 1,5 million d’ici la fin de l’année sur la plateforme de crowdfunding, Sowefund.
Cet argent devrait lui permettre de pousser sa R&D pour réussir à diviser encore par deux le bilan carbone de ses chaussures. En travaillant sur les matières mais aussi sur les process de production. La levée de fonds doit également booster sa présence aux États-Unis.
Outre-Atlantique, Saola s’appuie actuellement sur un logisticien américain qui gère l’approvisionnement des distributeurs sur place. Pour monter en puissance, la marque savoyarde va armer sa filiale américaine, endormie depuis le printemps en raison du départ de son directeur sur place. Aux manettes de ce projet de développement américain, Guillaume Linossier en personne qui, dans le cadre d’un projet familial, va de nouveau retourner vivre sur place.
« Nous avons actuellement 50 points de vente aux États-Unis, l’ambition serait d’atteindre le seuil des 200 points de vente d’ici 3 ans. Il nous faut également être meilleur sur le on-line aux États-Unis, nous sommes en retard sur ce sujet par rapport à nos autres zones d’implantation. La levée de fonds nous permettre d’investir dans le marketing », dévoile le dirigeant de l’entreprise. Un premier magasin, à la marque Saola, devrait même ouvrir ses portes courant 2023 aux Etats-Unis.
Des projets ailleurs dans le monde
L’entreprise savoyarde ne met toutefois pas tous ses œufs dans le même panier et espère avancer aussi ses pions dans d’autres zones. Notamment en Europe, où elle dispose d’environ 80 points de vente. « Nous venons de recruter quatre agents commerciaux afin de booster nos ventes en France notamment » indique le dirigeant.
Et puis, Saola mise sur l’Asie. La marque va être lancée officiellement courant 2023 en Corée du Sud. « Nous avons signé un partenariat avec un fabricant/distributeur de chaussures qui se chargera des ventes en ligne. D’ici trois ans, des magasins coréens Saola sont envisagés avec ce partenaire », précise Guillaume Linossier.
Avec ce marché mondial, l’entrepreneur estime qu’une fabrication au Vietnam est assez centrale pour les transports. Saola planche néanmoins sur une relocalisation en Europe de certains produits. Un essai devrait être lancé, avec une usine portugaise, d’ici quelques mois. La relocalisation n’est toutefois pas la priorité de Saola. « En réalité, le transport Asie/Europe ne représente que 3% de notre impact carbone, explique le dirigeant. Donc pour que nos chaussures restent accessibles à une majorité, nous priorisons le sujet des matériaux et des process de production. Nous travaillons par exemple sur un approvisionnement en énergie verte de l’usine vietnamienne ».
Après avoir orchestré une croissance de 80 % en 2022, Saola vise +70 % en 2023 et se fixe le cap de 20 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2026.
Stéphanie Gallo