Spécialiste des progiciels de gestion aéroportuaire, la PME vendéenne Resa Airport Data Systems, a su se faire une place sur ce marché mondial trusté par des filiales de compagnies aériennes. La recette de sa réussite ? L’agilité que lui confère sa petite taille et une solide expérience des appels d’offre internationaux.
Dix systèmes informatiques déployés dans 22 aéroports accueillant un total de 20 millions de passagers annuels : tel est le périmètre de l’appel d’offre remporté par Resa auprès de l’aviation civile du Nigéria. Une gageure pour une PME de 50 personnes dans un pays d’Afrique anglophone, région où les Frenchies sont réputés ne pas avoir la cote.

En plus de trente ans d’existence, l’entreprise, dont le siège est à Montaigu-Vendée, dans les Pays de la Loire, a installé 1 000 progiciels dans 61 pays, dont des marchés réputés complexes comme l’Iran. Embarquement des passagers, sécurisation et traçabilité de ces derniers, facturation aéroportuaire, gestion des opérations d’assistance en piste…
Resa a développé une dizaine de progiciels dédiés à l’aéroportuaire, un secteur particulièrement frappé par la crise sanitaire. Des turbulences que l’entreprise a traversées sans trop de casse grâce à la récurrence de ses contrats de maintenance et à sa politique tarifaire.
Un modèle économique qui lui a permis de traverser la crise
« Alors que nos concurrents facturent au nombre de passagers embarqués, notre fonctionnement s’apparente à une licence ou à un forfait, explique Renaud Willard, son directeur général. C’est notamment ce qui nous a permis de traverser la crise quand le trafic aérien s’est effondré avec la conjoncture sanitaire. »
Alors qu’il avait dévissé de 19 millions d’euros (M EUR) à 12 M EUR entre 2019 et 2020, son chiffre d’affaires, réalisé à 70 % à l’international, a ainsi atteint 14,8 M EUR l’an passé et compte retrouver son niveau pré-pandémique dès 2022.
Des résultats bien en-deçà de ceux des grandes entreprises qui composent sa concurrence dont la coopérative Sita (4 700 employés) créée par 11 compagnies aériennes, une filiale du géant américain de l’avionique Rockwell Collins ou encore Amadeus, société de droit espagnol lancée en 1987 par les compagnies européennes Air France, Lufthansa, Iberia et SAS. Sur ce marché très concurrentiel trusté par de très grandes entreprises, Resa s’accommode de sa petite taille, dont elle a su faire un atout.
Les appels d’offre internationaux drainent 90 % de l’activité
« En tant que PME nous sommes plus agiles et plus compétitifs que nos concurrents, mais en revanche nous sommes moins bons en marketing, en lobbying et en networking, estime le dirigeant. Nos commerciaux sont polyvalents et capables de présenter nos solutions de A à Z quand un concurrent viendra à 10 personnes spécialistes de leurs domaines respectifs. C’est le contraire d’une vision d’ensemble et d’une intégration réussie. »
Cet état d’esprit joue en faveur de la PME lorsqu’elle répond à des appels d’offre internationaux qui représentent aujourd’hui 90 % de ses flux d’affaires, contre 50 % il y a trente ans, à la création de l’entreprise.
« Alors qu’auparavant un appel d’offre concernait un produit et un aéroport, les projets sont désormais plus complets, observe Renaud Willard. Pour le Pakistan en 2019, le Nigeria et l’Ouzbékistan en 2021 nous avons remporté tous les aéroports de ces trois pays. »
Alors que le facteur prix a encore gagné en importance depuis le début de la crise sanitaire, être informé en amont est primordial pour Resa. « Découvrir un appel d’offre quand il sort n’est pas bon signe. Être alerté avant permet de rencontrer les décisionnaires et de travailler en partenariat pour aider à définir des spécifications réalistes. »
Les produits de Bpifrance jugés inadaptés
Pour ce faire, l’entreprise peut compter sur un réseau de partenaires techniques et commerciaux qu’elle a développé depuis trente ans. C’est l’un d’entre eux, une société russe, qui lui a signalé l’appel d’offre ouzbèke. A ces sociétés spécialisées dans la maintenance s’ajoute une dizaine d’agents répartis dans le monde entier.
« Nous ne participons pas aux appels d’offres aux États-Unis car les Américains préfèrent travailler avec des Américains. Les marchés britannique et allemand sont également très fermés », nuance toutefois le directeur général.
En outre, pour ne pas se faire déborder par des projets qu’elle ne pourrait pas assumer en raison de sa taille, la PME cible des aéroports de taille moyenne, soit entre 5 et 15 millions de passagers par an. Seuls Paris, Bangkok et Moscou font exception à la règle.
Du côté des financements, Resa a recours le moins possible à ses fonds propres mais demande une implication de ses clients car elle peine à utiliser les outils de financements export du dispositif public français : « Bpifrance met à disposition des entreprises des outils financiers très intéressants, mais le temps d’examen d’un dossier est long, jusqu’à six mois, ce qui pose problème quand on a deux semaines pour répondre à un appel d’offre, explique Renaud Willard. Cela explique pourquoi on n’a jamais réussi à travailler avec eux. Nous proposons au client de se tourner vers sa banque. C’est un luxe de pouvoir lui dire ça, mais nous sommes sur une niche et nos produits sont vraiment très bons. »
Sophie Creusillet