Fini les insecticides chimiques avec Cearitis. Créée en mars 2020, l’agritech aixoise a mis au point une solution de biocontrôle pour protéger naturellement les oliviers des ravageurs. La cible principale : la mouche de l’olivier. La startup part en novembre au Brésil et souhaite adapter sa biosolution à la production fruitière locale.
Cearitis, jeune pousse du secteur de l’agritech spécialisée dans la fabrication de solutions agroécologiques pour l’arboriculture, va partir en novembre à la conquête du Brésil pour adapter sa biosolution, qui est utilisée pour protéger les oliviers contre la mouche de l’olive, et les ravageurs qui s’attaquent aux fruits exotiques locaux.

« Pour se développer sur le fruit exotique, il faut comprendre le marché local brésilien », explique Solena Canale Parola, directrice des opérations de la startup, au Moci. Et d’ajouter : « aujourd’hui, on doit savoir comment la production fruitière fonctionne, quelles sont les caractéristiques et les besoins de cette production et de quelle manière les ravageurs sont perçus ».
L’entreprise va accélérer au Brésil avec un nouveau programme de Bpifrance, en compagnie de huit autres PME. Le choix de ce vaste pays-continent se justifie par l’importance de ce marché dans le secteur de l’agroécologie. Onzième économie mondiale et première puissance économique d’Amérique latine, il offre d’immenses terres exploitables et des conditions climatiques favorables à l’agriculture. C’est un pays pertinent pour les entreprises engagées dans la transition écologique.
Une entreprise familiale
Mais tout commence pendant les études d’ingénieur en biotechnologie de Marion Canale. Cette dernière travaille à une biosolution pour protéger l’olivier de la bactrocera oleae, plus connue sous le nom de mouche de l’olive. Elle s’associe ensuite à sa cousine Solena Canale Parola, experte en marketing et communication. Toutes deux se lancent ensemble dans l’entreprenariat.
Elles s’installent à la technopole d’Arbois, située à Aix-en-Provence, première région oléicole de France. « La technopole nous a donné l’opportunité de créer notre propre laboratoire interne et développer la recherche à d’autres nuisibles, comme drosophila suzukii (la mouche des fruits rouges) et ceratitis capitata (la mouche des agrumes et des fruits exotiques) », poursuit l’experte en communication.
Issue de six années de recherche & développement, la biosolution protège l’olivier. Pourquoi l’olivier ? « C’est une problématique qui nous tenait à cœur qui est certes européenne, mais pour nous, c’est familial car nos grands-parents cultivent l’olive. L’idée de départ est de répondre à un besoin actuel, sans faire d’essai sur la biodiversité, tout en étant rentable et facile à utiliser pour le producteur », précise la directrice des opérations.
Le produit devrait être commercialisé fin 2023, début 2024. « Ça prend du temps », se désole Solena Canale Parola. « Mais aujourd’hui, nous sommes dans un contexte assez spécial. En France, en 2023 et 2025, l’utilisation des pesticides sera proscrite. Or, il n’y a pas de solutions alternatives efficaces et rentables sur le marché. Les producteurs n’ont pas de solution et sont dans une impasse. On espère avoir le soutien des organismes dédiés et bénéficier de procédures accélérées pour obtenir des autorisations de mise sur le marché (AMM) de nos produits plus rapidement. Sur ces dérogations, on travaille au niveau de l’olive et la cerise », détaille la directrice opérationnelle.
Une solution adaptable
En France, le plan Ecophyto vise à réduire les risques et les effets de l’utilisation des pesticides sur l’homme et l’environnement. L’enjeu est de réduire le recours aux produits phytopharmaceutiques de 50% d’ici 2025. Ce plan vient d’être renforcé par le plan Ecophyto II+ du gouvernement Macron. Ce dernier cherche notamment à sortir du glyphosate pour l’ensemble des usages d’ici la fin de l’année.

La biosolution développée, dont la formulation est tenue secrète, est basée sur des molécules naturelles qui se trouvent dans l’arbre fruitier et le ravageur. Ces molécules ont été analysées et extraites pour arriver à une solution. En gros, le produit repousse naturellement la mouche pour éviter qu’elle ne ponde dans les fruits et en aspire le jus. Cette solution répulsive est couplée à un dispositif attractif, un panneau solaire disposé juste à côté des plantations pour attirer les ravageurs vers un piège.
La biosolution a prouvé son efficacité sur des champs oléicoles dans les Alpilles l’année dernière et est testée actuellement en Italie et en Espagne. « Aujourd’hui, le plus gros de la recherche est fait et notre solution est adaptée à la culture arboricole en général. Notre but est de pouvoir transposer cette recherche sur plusieurs ravageurs qui ont le même mode de fonctionnement, peu importe les cultures. Nous allons faire en sorte d’adapter notre solution », conclut Solena Canale Parola.
On comprend alors que l’entrepreneuse cherche à exporter ses solutions tous azimut car les trois ravageurs cités plus haut sont ceux qui sévissent partout dans le monde. Cearitis emploie 7 personnes actuellement.
Claire Pham