Depuis juin, une nouvelle loi douanière est en vigueur en Egypte dans l’objectif de sécuriser le fret et de dématérialiser les procédures d’importation. Un nouveau système de dédouanement anticipé numérisé a été mis en place, utilisant la technologie blockchain, selon une note de l’attaché douanier à l’ambassade de France au Caire, publiée sur le site de la DG Trésor*. A compter du 1er octobre, tous les importateurs et exportateurs utilisant la voie maritime devront s’être mis en conformité avec ce nouveau système.
Cette loi douanière a été adoptée le 24 août 2020 par le Parlement égyptien et été mise en place par un décret du ministère des Finances en juin 2021 (n°38/2021). Elle institue une nouvelle procédure d’importation des marchandises entrant en Egypte par voie maritime, dans un premier temps, mais pourrait être étendue à terme au fret terrestre et aérien.
Selon la note de l’attaché douanier au Caire, ce nouveau système s’articule autour de trois axes majeurs :
Premier axe : un nouveau guichet unique et des e-token
Un guichet unique douanier numérique a été mis en place, à disposition des opérateurs. Il s’agit du portail Internet intégré Nafeza, qui doit permettre aux opérateurs de soumettre tous les documents et d’effectuer les formalités douanières en une seule fois (douanes / autorités de contrôle / ports).
Le propriétaire des marchandises, l’importateur ou le commissionnaire en douane ont l’obligation de créer un compte sur cette plateforme « Nafeza » et doivent pour cela être habilités à émettre une signature électronique, ou e-token.
Deux sociétés sont accréditées par les autorités égyptiennes pour octroyer aux opérateurs un e-token : Egypt Trust et Misr for Central Clearing. La note de l’attaché douanier précise que ce service est facturé 1 000 livres égyptienne (EGP), soit environ 53,6 euros, pour la première signature et 500 EGP pour un renouvellement annuel.
Deuxième axe : le pré-dédouanement via ACI
Sur le plan de la sécurité, les marchandises importées en Égypte devront avoir été pré-dédouanées via le nouveau système ACI de pré-dédouanement (Advanced Cargo Information), proposé sur la plateforme Nafeza.
Concrètement, l’importateur ou le commissionnaire en douane devra renseigner les données relatives à l’importation des marchandises et à leur exportateur avant l’expédition des marchandises vers l’Égypte. En retour, après une analyse de risque, le système accordera un code à 19 chiffres dit “ACID” (Advance cargo information declaration).
L’ACID est la « clé de voute » de ce nouveau système ACI, selon la note de l’attaché douanier. Impossible, sans ce précieux numéro, d’obtenir l’acceptation des autorités égyptienne pour faire entrer la marchandise sur le territoire égyptien, même en transit ou dans le cadre d’un transbordement international.
Il concernera dans un premier temps les exportations réalisées par voie maritime et ce de manière obligatoire à compter du 1er octobre 2021 (décret n°328/2021 amendant le décret n°38/2021). À ce jour les expéditions aériennes et terrestre sont exemptées de cette procédure bien que l’administration douanière égyptienne envisage une extension à ces vecteurs, précise encore la note de l’attaché douanier au caire.
Enfin, concernant la dématérialisation des procédures, et conformément au décret du ministre des Finances n° 38 de 2021, les informations et documents relatifs aux marchandises doivent être soumis par voie électronique à l’Administration des douanes.
Pour obtenir l’ACID, les informations à fournir à l’importateur par l’exportateur, comprennent des données telles que le pays d’enregistrement, le numéro de l’enregistrement, le nom commercial, le type d’exportateur (entreprise, franchisé ou autre), son adresse complète, son adresse électronique et autres informations sur l’exportateur.
En outre, l’importateur ou le commissionnaire en douane doit enregistrer les informations relatives à l’expédition elle-même telles que : le numéro de l’expéditeur enregistré, le code portuaire du port d’exportation, les données des marchandises, le code HS, les données de la facture et autres informations, les données sur la quantité/poids statistique en douane.
Lorsque ces données sont renseignées et la demande de numéro ACID est établie, il est envoyé automatiquement par courriel à l’exportateur, à l’importateur et à la Banque, précise la note de l’attaché douanier. Une fois attribué à l’exportateur, ce dernier doit l’apposer sur la facture commerciale et le connaissement relatifs à son opération au plus tard 48 heures avant l’arrivée des marchandises. Ces documents devront être transmis à l’importateur sur le portail Nafeza via la plateforme Cargo X. L’importateur devra vérifier ensuite la validité des documents et des informations transmises par l’exportateur.
L’exportateur devra également renseigner, en sus de son numéro ACID, le numéro de TVA de l’importateur, son numéro d’immatriculation d’exportateur dans son pays d’exportation, sur la liste de colisage, ainsi que sur la facture commerciale.
Enfin, les exportateurs sont fortement invités à apposer un « GS1 code » sur les boîtes et emballages des produits importés et confirmés. Il s’agit d’un code barre à 14 chiffres permettant d’assurer la traçabilité et l’identification des marchandises via un système dénommé Electronic Product Code Information Services (EPCIS). Le système GS1 interagit avec le système ACI. Si l’utilisation de GS1 code n’est pas possible, l’exportateur a l’obligation de préciser le numéro de produit et de lot sur la facture.
Pour les exportateurs, l’obligation de s’enregistrer sur Cargo X
Troisième axe : la blockchain de Cargo X
D’après la note de l’attaché douanier au Caire, l’ACI est adossé à un système d’échange de documents sécurisés utilisant la technologie blockchain (Block-chain Documentation Transaction System). La société Cargo X est le prestataire de service qui met à disposition ce service aux parties prenantes des opérations de dédouanement. Elle utilise la technologie blockchain Etherium.
Ce système doit permettre l’échange sécurisé de documents entre les professionnels du dédouanement et la douane égyptienne en utilisant la technologie de la blockchain comme les « smart B/L » (connaissement intelligents). Selon le décret du ministre des Finances n° 222 de 2021, les exportateurs étrangers doivent transmettre les données et les documents d’expédition par voie électronique à la plateforme Nafeza via la plate-forme Blockchain. Ils sont donc tenus par la loi de s’enregistrer sur la plateforme Cargo X.
Dans le détail, Etherium a été choisie afin de sécuriser des documents et de mettre en place des contrats intelligents pouvant s’exécuter automatiquement (smart documents et smart envelopes). Elle est censée dispenser les exportateurs d’authentifier les documents d’exportation par les chambres de commerce ou les ambassades égyptiennes à l’étranger.
Une fois sur la blockchain, poursuit la note de l’attaché douanier, les documents sont protégés et chiffrés de manière totalement décentralisée via un protocole de « preuve de travail » validés par des algorithmes et des validateurs. Les frais mentionnés sont « frais de gaz » de la blockchain Etherium, utilisés afin sécuriser l’envoi de documents douaniers. Pour cela, la société Cargo X a mis en place un token (CR) (la monnaie virtuelle utiliser sur l’application Cargo X).
Le système CARGO X permet aux sociétés de payer une transaction effectuée sur la blockchain Etherium (en moyenne 12 USD) via l’achat de crédits. Cette somme correspond à la rémunération des validateurs permettent la validation et la sécurisation des données de la blockchain.
Les documents transmis dans le cadre du système ACI devront impérativement être transmis via la technologie de la blockchain. Le paiement sera donc obligatoire lorsque la technologie de la blockchain est utilisée, le prix est fixé à 3 USD par document.
La note de l’attaché douanier au Caire attire enfin l’attention sur les frais à payer par l’exportateur pour utiliser ce système : ce dernier est tenu de payer la somme 50 USD pour les frais de traitement de dépôt ACI pour chaque numéro ACID en sus des frais inhérents à l’utilisation de la blockchain Etherium. Les frais de traitement de dépôt ACI ne sont facturés qu’une seule fois par numéro ACID, ce qui signifie que même si l’utilisateur souhaite modifier ou compléter un dépôt ACI, il n’a pas à payer d’autres frais de traitement ACI. Le coût total de l’exportateur par dépôt (frais de dossier et envoi des documents ACI) est estimé à 62 USD.
Cette nouvelle procédure entrant en vigueur dès le 1er octobre prochain, les exportateurs vers le marché Egyptien doivent sans tarder se mettre en conformité avec cette nouvelle loi douanière et se rapprocher de leurs importateurs égyptiens. « En cas de non-respect de cette exigence, les marchandises ne pourront pas être dédouanées en Égypte et seront renvoyées au lieu de départ” avertit la note de l’attaché douanier au Caire.
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