Le rapport « Accélérer la digitalisation des activités de financement du commerce international »*, rédigé par Béatrice Collot et Philippe Henry, co-présidents du groupe de travail de Paris Europlace consacré à la digitalisation des opérations de financement du commerce international, a été remis le 30 juin au gouvernement. Il propose une feuille de route pour parvenir à réduire la paperasserie dans les transactions du « trade finance ».
Huit mois de travail et l’audition de plus de 100 interlocuteurs ont donc été nécessaires à Béatrice Collot, directrice de la Banque postale Leasing & Factoring et Philippe Henry, directeur général de Dewenson Partners et Senior Advisor de Paris Europlace, pour rédiger ce rapport et le remettre aux trois ministres commanditaires, soit Bruno Le Maire, ministre de l’Economie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, Eric Dupond-Moretti, Garde des sceaux, ministre de la Justice, et Olivier Becht, ministre délégué auprès de la ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargé du Commerce extérieur, de l’attractivité et des Français de l’étranger.
La mission avait été confiée par les trois ministres, le 28 novembre 2022, aux co-présidents du groupe de travail de Paris Europlace consacré au financement du commerce international, à la suite d’un livre blanc publié sur le sujet par le comité français de la Chambre de commerce internationale (ICC) était loin d’être simple : étudier les modalités d’un engagement des entreprises actives dans l’import/export et de leurs financeurs dans la dématérialisation des procédures de financement du commerce international ou trade finance. L’enjeu est loin d’être négligeable pour les entreprises : il s’agit de mettre fin à une situation paradoxale, où malgré la digitalisation poussée du secteur financier, les transactions du commerce internationale nécessitent encore quantités de documents papier.
Adapter le droit français à la CNUDCI de 2017 sur les titres électroniques transférables
Le titre du rapport résume son objet : « Accélérer la digitalisation des activités de financement du commerce international ». « Les effets bénéfiques attendus d’une numérisation accrue concernent, notamment, le règlement plus rapide des échanges transfrontaliers, la meilleure maîtrise des risques et la réduction des coûts de transaction » souligne un communiqué conjoint des trois ministres, publié le 30 juin.
En l’occurrence, le rapport « met en évidence les attentes fortes de l’ensemble de l’écosystème français du commerce international pour agir rapidement en faveur de la numérisation des activités de financement ou de trade finance » souligne le communiqué.
Il fait neuf recommandations aux pouvoirs publics (voir ci-après) dont la plus marquante, déjà mise en exergue dans le livre blanc de l’ICC, nécessitera une réforme juridique : l’adaptation du droit français pour le rendre compatible avec les principes de la loi type de la Commission des Nations Unies pour le droit commercial international (CNUDCI) de 2017, sur les titres transférables électroniques.
Par ailleurs, le rapport montre que les activités de financement de court terme du commerce international, importantes pour la sécurisation financière des échanges internationaux, peuvent gagner en visibilité et structuration au sein de la Place de Paris.
Les neuf recommandations du rapport Collot-Henry
Les neuf recommandations aux pouvoirs publics du rapport « Accélérer la digitalisation des activités de financement du commerce international », rédigé par Béatrice Collot et Philippe Henry, co-présidents du groupe de travail de Paris Europlace consacré au financement du commerce international, sont organisées autour de 4 grands chantiers :
1/ Favoriser l’adoption de cadres juridiques compatibles avec l’usage de titres transférables électroniques dans le commerce international. A cette fin, le rapport préconise ’introduction dans le droit français de dispositions législatives consacrant la pleine reconnaissance de la forme électronique des titres transférables et un soutien large, au sein des enceintes européennes et multilatérales (G7, G20), à la transposition par les partenaires commerciaux de la France des principes de la loi type de la CNUDCI.
2/ Promouvoir l’écosystème de la TradeTech, s’assurer de la disponibilité de solutions technologiques viables et de l’utilisation effective des outils numériques par les acteurs. L’objectif est bien que l’évolution du droit se traduise par un passage à l’échelle rapide et une appropriation réelle par les acteurs du marché.
3/ Renforcer la représentation institutionnelle sur les sujets de financement du commerce international et la coordination des acteurs, pour un suivi, une visibilité et une connaissance plus fine de ce secteur au sein des sphères privée et publique.
4/ Saisir l’opportunité de la numérisation pour améliorer l’attractivité du secteur du financement du commerce international, par une offre de financement améliorée et une revalorisation des métiers et parcours associés à ce segment d’activité.
Quelle suite sera donnée à ce rapport ?
Dans leurs premiers commentaires, les trois ministres ont en tout cas montré une volonté d’avancer.
« Cette dématérialisation constitue un levier de compétitivité pour nos entreprises à l’export et d’attractivité pour la place financière de Paris, indique notamment Bruno Le Maire. Je souhaite que nous mettions rapidement en œuvre ces recommandations ».
Même soutien de la part d’Olivier Becht : « La digitalisation des activités de financement du commerce international permettra de fluidifier les opérations d’import/export de nos entreprises, et d’encourager le développement à l’international de nos PME, dans un contexte d’incertitude élevée, souligne-t-il. Nous devons la soutenir et l’accompagner dans les mois à venir, en s’appuyant sur le rapport remis aujourd’hui par Paris Europlace ».
Quant au ministre de la Justice, dont dépend une partie de la solution, il s’y montre favorable sans toutefois en dire plus. « Parce que le droit doit être au service de la modernisation et de l’attractivité de notre pays, il nous revient de tirer toutes les conséquences, dans nos textes, de la nécessaire dématérialisation des activités de financement du commerce international, en cohérence avec les recommandations contenues dans la loi type de l’ONU, déclare Eric Dupond-Moretti. Les propositions du rapport Paris Europlace sont précieuses pour avancer en ce sens. »
A suivre…
Christine Gilguy
*Le rapport est en ligne sur le site du ministère de l’Europe et des affaires étrangères : cliquez ICI