Les indicateurs économiques du premier partenaire commercial de la France sont au rouge, faisant craindre une entrée en récession avant la fin de l’année. Sur le terrain, les investisseurs allemands se montrent pessimistes, dans un contexte de crise énergétique, d’inflation galopante et de hausse du mécontentement social.
L’économie allemande est à la peine. L’indice de confiance ZEW s’est établi en août à – 55,3 points, contre – 53,8 le mois précédent. Compilé chaque mois par le Zentrum für Europäische Wirtschaftsforschung (le Centre allemand pour la recherche sur l’économie européenne), cette indice de confiance représente la différence entre la portion d’analystes optimistes et la portion d’analystes pessimistes pour le développement économique allemand au cours des six prochains mois. De son côté, l’indice relatif à la situation actuelle recule sur un mois, de – 45,8 à – 47,6.
En juillet déjà, le climat des affaires s’était fortement dégradé. L’indice de l’institut d’études économiques Ifo a dévissé, à 88,6 contre 92,3 en mai. La croissance du PIB de la première économie européenne, nulle au deuxième trimestre, pourrait devenir négative avant la fin de l’année, entrainant le pays dans la récession.
Pas de retour à la croissance à moins d’un « miracle économique »
« Une récession de l’économie allemande était déjà notre scénario de base au début de l’été, en raison des prix élevés de l’énergie et des matières premières, des frictions continues de la chaîne d’approvisionnement et de la guerre en Ukraine, observe dans une note Carsten Brzeski, économiste chez ING (…) Avec la nouvelle taxe sur le gaz et l’impact des faibles niveaux d’eau, les taux d’inflation à deux chiffres semblent presque acquis pour le dernier trimestre de l’année et il faudrait un miracle économique pour éviter une récession au second semestre. »
Berlin a en effet annoncé le 15 août la mise en place en octobre d’une nouvelle taxe sur le gaz pour les particuliers et les entreprises. Fixée à 2,4 centimes d’euro par kilowattheure, elle devrait constituer un coût supplémentaire annuel de 500 à 600 euros pour une famille de quatre personnes. L’objectif ? Inciter à diminuer la consommation. Mais, même si l’Allemagne met les bouchées doubles pour réduire sa consommation de gaz, rien ne dit que cette mesure suffira à éviter une crise énergétique dans ce pays très dépendant de la Russie pour son approvisionnement en gaz.
Le pays pourrait connaître trois trimestres de contraction de son PIB
Toujours est-il que cette taxe représente une dépense supplémentaire pour les ménages allemands qui doivent déjà composer avec une inflation galopante.
Cette dernière a atteint 8,5 % sur un an en juillet, du jamais vu depuis 40 ans. En cause : les conséquences de la guerre en Ukraine, mais également la sécheresse qui abaisse le niveau des rivières et perturbe le transport fluvial, qui représente 6 % du transport de marchandises outre-Rhin. Un dysfonctionnement de plus dans les chaînes d’approvisionnement allemandes, déjà mises à rude épreuve.
Si l’Allemagne doit entrer bientôt en récession, ce qui fait actuellement consensus parmi les analystes, la question est de savoir pour combien de temps. « Le PIB allemand se contractera au cours des trois prochains trimestres à mesure que les vents contraires de la hausse des prix de l’énergie et de la hausse des taux d’intérêt s’accéléreront », prévient le cabinet d’analyse britannique Capital Economics.
Sophie Creusillet