« Il est trop tôt. Dans deux
à trois mois, nous pourrons apprécier l’impact de la crise politique sur les
entrées de capitaux, dont dépend largement l’économie de la Turquie, mais, pour
le moment, rien ne justifie que nous changions dans un pays réputé stable le
risque politique », explique au Moci un expert de l’Office
national du ducroire (ONDD). Bien sûr, précise-t-on à l’ONDD, « on reste
attentif à l’évolution à court terme de la situation ». La Turquie est ainsi
classée en catégorie 3 à court terme et en catégorie 4 à moyen-long terme pour
le risque politique sur une échelle qui en compte 7.
Aujourd’hui, même si la monnaie
nationale, la livre turque, est « sous pression », indique l’assureur
crédit public belge dans sa lettre mensuelle de juillet, le pays dispose encore
de trois à quatre mois de réserve. Évidemment, si la crise perdurait entre le
gouvernement du Premier ministre Recep Tayyip Erdogan (notre photo) et les jeunes urbains
principalement, alors les opérateurs pourraient freiner leurs investissements
dans le pays et les sorties de capitaux pourraient s’envoler. Sans compter
qu’une mauvaise saison touristique fragiliserait l’équilibre de la balance des
paiements.
Dans sa lettre mensuelle du mois
de juin, la société de prévention et de gestion des risques Geos note que la
société civile se révolte parfois pour des raisons très différentes, qui
peuvent être l’autoritarisme croissant du chef du gouvernement et sa volonté de ré-islamiser la vie politique, la remise en cause du droit à l’avortement et la
liberté d’expression ou encore l’interdiction de consommer de l’alcool dans les
lieux publics après 10 heures du soir.
Or, plus qu’à l’opposition
politique qui semble très fragmentée, la contestation pourrait servir les
minorités. Les Kurdes, évidemment, mais aussi les Alevis, cousins des alaouites
du président syrien Bachar Al Assad, qui représentent « entre 15 à 20 %
des citoyens turcs », souligne Géos. Or, si Recep Tayyip Erdogan soutient
la rébellion en Syrie, il « a besoin de ces minorités pour mener à bien la
réforme constitutionnelle qui lui permettrait de briguer la présidence lors des
élections prévues en 2014, son mandat de Premier ministre s’arrêtant en
2015 ». Dernière incertitude, l’armée, qui bien qu’affaiblie depuis dix
ans, « pourrait, selon le groupe français, se rappeler au bon souvenir du
gouvernement dans ce genre de situation ».
François Pargny