Au Gabon, le milieu d’année budgétaire est un temps fort en matière de marchés publics. C’est pourquoi cette année Ubifrance a choisi de publier une fiche répertoriant une bonne dizaine d’appels d’offres et d’appels à manifestation d’intérêt.
Si le ministère de la Défense nationale occupe une place de choix – avec des projets de réhabilitation de bâtiments, d’achat d’un groupe thermique, de mobiliers et d’ameublement de bureaux, de véhicules automobiles et de bus – en revanche, l’Agence nationale des grands travaux (ANGT), que l’on annonçait encore il y a quelques mois comme incontournable, déshabillant au passage certains grands ministères au grand dam de la Banque mondiale, n’est citée par Ubifrance comme point de contact que pour les projets d’aménagement de la route de Glass et du bord de mer à Port Môle à Libreville.
Port Môle, le « joyau » du quinquennat d’Ali Bongo
En l’occurrence, il s’agit de transformer Port Môle en une presqu’île artificielle, « une réalisation symbolique, le joyau du quinquennat du président Ali Bongo », explique un fin connaisseur du projet, qui a fait l’objet en juin dernier, en marge de la deuxième édition du New York Forum Africa (NYFA), d’un contrat de 120 millions de dollars avec l’entrepreneur China Harbour Engeneering. Quelque 450 millions de dollars sont prévus ainsi pour construire sur 45 hectares un centre de conférences d’une capacité de 7 500 à 10 000 places, un musée, des commerces, des hôtels, des bureaux, etc. Après sa rénovation, Port Môle pourrait encore recevoir des navires en provenance d’autres pays de la côte Atlantique, notamment du Cameroun.
Constituée en majorité d’employés détachés par Bechtel, première compagnie américaine de travaux publics, l’ANGT a pour objectif « la mise en valeur du Gabon émergent », un plan stratégique de développement s’intégrant dans la Vision du président de la République à l’horizon 2025, expliquait Christian Abrahamsen, directeur de Secteurs de l’agence, dans le Guide Business Gabon publié par Le Moci en mars.
D’autres acteurs institutionnels sont cités dans la fiche, comme le Service d’assainissement des eaux usées ou le Conseil national de l’eau et de l’électricité. « Dans les faits, les ministères et les municipalités conservent la haute main sur l’eau et l’électricité. L’ANGT est le maître d’ouvrage pour les grands travaux », précise un opérateur économique sur place, qui ajoute qu’au Gabon « rien n’est cartésien ».
Tout récemment, l’ANGT vient d’être désignée comme consultant en matière de conception pour les réhabilitations futures du Transgabonais. Mais c’est la Setrag (Société d’exploitation du Transgabonais) qui est jusqu’à présent chargée de la réhabilitation de l’ouvrage dont elle est le concessionnaire.
Apporter des solutions financières
Le volet financier des marchés ne doit pas être négligé. « La Chine a très bien compris qu’il fallait proposer des solutions. Les Espagnols avancent aussi très vite alors que les Français ont pris du retard », met en garde Dominique Grancher (notre photo), conseiller économique à Libreville. Apporter des financements est d’autant plus important, insiste-t-il, que « si les bailleurs de fonds sont ouverts, comme le montre la série d’opportunités que nous présentons dans la fiche, c’est l’État gabonais qui finance en priorité ».
Or, le Gabon a essuyé un échec quand il a voulu lever en juillet 240 milliards de francs CFA (366 millions d’euros) sous forme d’obligations à trois ans sur le marché de la Communauté économique et monétaire d’Afrique centrale (Cemac), pour compléter ses ressources budgétaires dévolues aux investissements. Seuls 36 % de ce montant ont été couverts, ce qui va peser sur le budget jusqu’à la fin de l’année.
En revanche, le gouvernement peut se féliciter des derniers forages d’exploration pétrolière en eau profonde, puisque l’opérateur du champ de Diaba, le français Total, a annoncé il y a quelques jours, avec le puits Diaman-1B, « une accumulation de gaz à condensats imprégnée sur une hauteur utile de 50 mètres ». Première source de revenus du pays, le pétrole alimente le budget à plus de 60 %. Mais les ressources futures ne sont pas assurées. C’est pourquoi l’offshore très profond (5 585 mètres dans le cas de Diaman-1B) est aujourd’hui considéré comme l’avenir du pétrole dans ce pays d’Afrique centrale.
François Pargny