Bretagne Commerce international (BCI) tenait le 23 juin à Brest son 13e Open de l’international, grand rendez-vous annuel des exportateurs armoricains. Malgré un contexte international de plus en plus difficile, les entreprises bretonnes gardent le cap de l’export et leur écosystème celui de l’optimisation des outils mis à leur disposition.
Entre ateliers, village de partenaires, rendez-vous BtoB, remise de prix, plénière, cocktail de réseautage… Le Quartz, scène nationale et centre de congrès de Brest, est en pleine effervescence en ce lundi matin. 850 entreprises du Finistère, d’Ille-et-Vilaine, du Morbihan et des Côtes d’Armor, sur les 1 000 membres de BCI, sont venus participer à cette journée placée sous le signe de l’export, malgré une actualité internationale encore assombrie par la guerre entre Israël et l’Iran ainsi que les bombardements américains.
« Il est rare qu’un choc politique, une crise économique, une crise environnementale, l’arrivée de nouvelles technologies et des changements démographiques surviennent tous en même temps, observe Léa Dauphas, venue animer un atelier sur le marché américain. Concernant les Etats-Unis, auxquels les entreprises bretonnes sont globalement peu exposées, la cheffe économiste du cabinet rennais TAC souligne que le plus bas historique de la confiance des ménages et des craintes sur l’emploi « ont toujours été des signaux de ralentissement de l’économie aux Etats-Unis ».
Des entrepreneurs qui gardent la tête froide
Son conseil, outre-Atlantique et ailleurs dans le monde ? Cartographier son exposition au risque et sa vulnérabilité, analyser les datas de l’entreprise et réorienter ses pays cibles ou sa stratégie à l’international au besoin. Bref, prendre de la distance et garder la tête froide. C’est l’état d’esprit qui anime Unseenlabs, start-up rennaise spécialisée dans l’interception de signaux radiofréquences par des satellites à des fins de surveillance des activités maritimes.
« Nous avançons avec prudence aux Etats-Unis, grâce à des conseillers locaux, mais nous restons ouverts à des marchés auxquels nous n’aurions pas pensé, témoigne Rachid Nedjar, directeur du marketing de cette jeune pousse créée en 2015. Nous avons par exemple signé un contrat il y a deux ans en Slovénie, un marché inattendu et nous misons sur le Moyen-Orient et l’Asie, où nous avons ouvert un bureau en février, à Singapour. »
Un profil économique orienté PME
Même volonté de diversification chez Le Gouessant, une coopérative agricole qui fournit en viande Bigard, Leclerc, LDC ou encore Intermarché. L’entreprise de 860 salariés qui affiche un chiffre d’affaires de 800 millions d’euros a en effet développé l’aquaculture (aliments pour poissons) et les compléments nutritionnels pour chats et chiens, deux activités relais de croissance avec des parts à l’export représentant respectivement un tiers et deux tiers du chiffre d’affaires de chaque branche.
« Même si les crises se multiplient, je ne vois pas de panique chez les entreprises comme pendant le Brexit, époque à laquelle nous avions ouvert un centre d’appels pour répondre à leurs questions », relate Annie Berthelot, directrice générale de BCI. « Le paysage breton de l’international est assez spécifique en France, renchérit Stéphane Queffelec. 70 % de l’activité à l’export sont dirigés vers les autres marchés européens, 40 % des entreprises sont dans l’agroalimentaire et nous avons beaucoup de PME qui ont l’habitude de se montrer agiles. Dans ce contexte on n’a pas de gros choc comme lorsque tout va mal dans l’automobile ou l’aéronautique. »
Un modèle à part
Autre avantage de la région, sa petite taille (4 départements) qui permet des contacts personnalisés et un bon maillage du territoire. « Les entreprises viennent nous trouver facilement quand elles ont une question et connaissent bien les outils mis à disposition par BCI. »
Car en Bretagne, à la différence des autres régions françaises, cette association issue d’un partenariat public-privé entre la Région, les CCI de Bretagne et les entreprises membres, qui est le partenaire exclusif de la Team France Export (TFE) et pilote depuis 1983 le dispositif de soutien aux entreprises exportatrices. « C’est un peu le même modèle qui est recherché par la TFE avec Business France et les autres CCI régionales, remarque Christian Queffelec, président du directoire de BCI. Je ne peux pas juger, ce sont des initiatives plus récentes qui n’ont pas encore atteint leur maturité dans des régions qui sont tellement grandes que le maillage n’est pas le même. »
Rapprochement avec Bretagne Compétitivité
Pour autant, l’écosystème local n’est pas figé et même appelé à évoluer. Déjà évoqué lors de la précédente assemblée générale de BCI, le rapprochement de l’association avec Bretagne Compétitivité, un programme de soutien de la CCI visant le développement des entreprises par l’innovation et la prise en compte de la transition énergétique, est toujours dans les rails. Un cabinet de conseil a rédigé un cahier des charges pour accompagner ce rapprochement et sa mise en œuvre.
Une initiative qui arrive à un moment où les collectivités sont appelées à serrer les cordons de la bourse et avec une année électorale. Si Christian Queffelec dit ne pas trop croire à une mise en place effective avant la fin de cette année, les synergies sont d’ores et déjà présentes. « Dans les faits, on se connaît tous et on coopère déjà tous les jours notamment sur des questions de réglementation produit par exemple. »
La Bretagne n’a beau représenter que 2,1 % des exportations nationales, elle joue collectif et continue de se projeter à l’international malgré la tempête.
Sophie Creusillet