La Commission européenne vient d’annoncer l’application de droits de douanes compensateurs sur les véhicules à batterie (BEV) fabriqués en Chine allant de 17 à 38,1 % dans le cadre des conclusions préliminaires de son enquête antisubventions. Elles s’appliqueront le 4 juillet si aucun accord n’est trouvé avec les autorités de Pékin pour corriger la situation.

La plupart des observateurs s’y attendaient, un certain nombre de constructeurs et importateurs de véhicules chinois l’avaient probablement anticipé en stockant en masse des véhicules dans les ports européens. C’est chose faite. Les droits de douanes appliqués par l’Union européenne (UE) aux véhicules électriques importés de Chine, qui sont de 10 % actuellement, vont jusqu’à quadrupler à partir de début juillet.
Dans le cadre de son enquête en cours sur les subventions octroyées par la Chine à ses constructeurs de véhicules électriques, la Commission européenne a en effet annoncé avoir « provisoirement conclu que la chaîne de valeur des véhicules électriques à batterie (BEV) en Chine bénéficie de subventions déloyales, ce qui constitue une menace de préjudice économique pour les constructeurs de l’UE ». L’enquête a également examiné les conséquences et l’impact probables des mesures sur les importateurs, les utilisateurs et les consommateurs de BEV dans l’UE.
Rappel de la procédure européenne d’enquête anti-subvention
Le 4 octobre 2023, la Commission a officiellement ouvert une enquête antisubventions sur les importations de véhicules électriques à batterie pour passagers originaires de Chine. Toute enquête doit être conclue dans un délai maximum de 13 mois à compter de son ouverture. La Commission peut publier des droits compensateurs provisoires dans les 9 mois suivant l’ouverture de l’enquête (c’est-à-dire le 4 juillet au plus tard). Les mesures définitives doivent être instituées dans les 4 mois suivant l’institution des droits provisoires.
Au vu de ces résultats provisoires, l’exécutif à Bruxelles a enclenché deux démarches distinctes : d’une part elle a pris contact avec les autorités chinoises « pour discuter de ces conclusions et explorer les moyens de résoudre les problèmes identifiés, d’une manière compatible avec les règles de l’OMC » ; et d’autre part elle a « pré-déclaré le niveau des droits compensateurs provisoires qu’elle imposerait sur les importations de véhicules électriques à batterie (« BEV ») en provenance de Chine ».
Et de prévenir : « Si les discussions avec les autorités chinoises n’aboutissent pas à une solution efficace, ces droits compensateurs provisoires seront introduits à partir du 4 juillet par une garantie (dont la forme sera décidée par les douanes de chaque État membre), précise le communiqué. Ils ne seraient perçus qu’en cas d’institution de droits définitifs ». Autrement dit, les importateurs devront déposer à partir du 4 juillet une caution à l’importation pour chaque véhicule concerné, jusqu’à la décision, ou non, d’instaurer des droits définitifs.
Les trois constructeurs chinois retenus par la Commission dans son échantillon se verraient appliquer les droits compensateurs individuels suivant : BYD : 17,4 % ; Geely : 20 % ; et SAIC : 38,1 %.
Les autres constructeurs de véhicules à batterie en Chine qui ont coopéré à l’enquête mais n’ont pas été retenus dans l’échantillon seraient soumis à un droit moyen pondéré de 21 %. Tous les autres constructeurs de BEV en Chine qui n’ont pas coopéré à l’enquête seraient soumis au droit résiduel de 38,1 %.
A noter que tous les véhicules à batterie importés dans l’UE sont concernés, y compris les marques occidentales (Tesla, BMW, Renault).
Quelles vont être les prochaines étapes ?
Le communiqué explique que les constructeurs concernés peuvent déjà exercer certains recours. « À la suite d’une demande motivée, un constructeur de BEV en Chine – Tesla – pourrait voir son taux individuel de droits recalculé au stade définitif, explique le communiqué. Toute autre entreprise produisant en Chine qui n’a pas été retenue dans l’échantillon final et qui souhaite que sa situation particulière soit examinée peut demander un réexamen accéléré, conformément au règlement antisubventions de base, juste après l’institution des mesures définitives (c’est-à-dire 13 mois après l’ouverture de la procédure). Le délai pour conclure un tel réexamen est de 9 mois ».
La Commission précise que les informations relatives aux niveaux de droits provisoires envisagés sont communiquées à toutes les parties intéressées (y compris les constructeurs, importateurs et exportateurs de l’Union et leurs associations représentatives, les constructeurs-exportateurs chinois et leurs associations représentatives, ainsi que le pays d’origine et/ou d’exportation, à savoir la Chine), ainsi qu’aux États membres de l’UE, avant l’institution de ces mesures, conformément aux procédures définies par le règlement antisubventions de base de l’UE.
« Les entreprises concernées ont reçu individuellement des informations concernant le calcul des droits imposés et ont la possibilité d’en commenter l’exactitude, rappelle la Commission. Si leurs commentaires éventuels apportaient des éléments de preuve suffisants pour contrebalancer les calculs, la Commission pourrait les réviser conformément à la législation de l’UE ».
De nombreux observateurs s’attendent, à présent, à ce que les autorités chinoises prennent des mesures pour riposter à l’UE. D’après Bloomberg, sont exposés les produits de l’agriculture, l’aviation et les voitures à moteurs puissants. Pékin a déjà lancé une enquête sur les spiritueux européens.
C.G