La grande distribution se porte bien en Afrique du Sud. Mais l’arrivée du géant américain Wal-Mart sur le marché pourrait modifier l’équilibre des forces.
Le 31 mai dernier, les autorités sud-africaines de la concurrence ont finalement autorisé le numéro un mondial de la distribution américain à prendre possession du groupe sud-africain Massmart. L’opération globale est estimée à environ 17 milliards de rands (1,78 milliard d’euros) pour les 51 % de Massmart, le troisième distributeur de produits de grande consommation en Afrique du Sud, derrière Shoprite et PicknPay.
Massmart, dont le titre a gagné plus de 50 % l’année dernière, exploite 265 supermarchés en Afrique du Sud (dont les chaînes Game et Makro), ainsi que 24 magasins sur le continent, notamment au Botswana, au Zimbabwe, en Tanzanie, au Niger et au Ghana. « Si la vente a lieu, Wal-Mart va très certainement vouloir développer le secteur alimentaire, qui est le point faible de Massmart, affirme Syd Vianello. On peut s’attendre à de la publicité agressive et plus de “hard-discount”. La différence de prix sur le panier d’achat final ne sera pas énorme, car les marges bénéficiaires sont déjà très faibles. Mais Wal-Mart sera certainement prêt à diminuer encore ces dernières pour gagner des parts de marché. »
Le numéro un de la distribution va cependant devoir respecter quelques conditions, fixées par le tribunal de la concurrence à Pretoria. Wal-Mart doit ainsi s’engager à ne pas licencier de personnel pendant au moins deux ans, et va devoir créer un fonds d’investissement de 100 millions de rands. Une somme qui doit être dépensée dans les trois ans à venir pour soutenir l’industrie locale.
Ce rachat reflète la volonté du premier distributeur mondial de se développer sur le continent africain. « Outre ses tendances démographiques favorables, l’Afrique du Sud offre une plate-forme de croissance et de développement dans les autres pays d’Afrique », souligne le vice-président exécutif de Wal-Mart, Andy Bond. Au cours des dernières années, les grandes chaînes de supermarchés sud-africaines ont ainsi connu une forte expansion en Afrique subsaharienne. Outre ses 1 425 magasins (plus 283 franchises) en Afrique du Sud, Shoprite en possède 162 dans 16 pays, dont le Nigeria et l’Angola. Et le potentiel de croissance de l’Afrique commence à être pris au sérieux par les grands groupes occidentaux.
« Ce n’est pas parce qu’un grand groupe vient de s’installer dans le pays qu’il n’y aura pas d’opportunités pour d’autres à moyen terme », estime Dominique Boutter, directeur de la Mission économique Ubifrance à Johannesburg. « Par ailleurs, la franchise représente également une excellente opportunité d’affaires dans le secteur de la distribution. »
Patricia Huon
Le boum de la grande distribution
La grande distribution se porte bien en Afrique du Sud. Les acheteurs ont à leur disposition pratiquement tous les formats modernes de grande distribution : hypermarchés, supermarchés, grandes surfaces spécialisées… « Après avoir traversé une période difficile en 2009, le secteur se porte beaucoup mieux, constate l’analyste financier Syd Vianello. Cela est dû à une augmentation des salaires et au faible taux d’intérêt. Les clients dépensent plus, surtout sur les vêtements, les jouets, le matériel high-tech, les meubles… pas vraiment sur la nourriture, secteur pour lequel l’inflation a été très faible. »
L’Afrique du Sud représente la première économie du continent africain, avec un produit intérieur brut de 354,4 milliards de dollars en 2010 (une croissance de 23,40 % par rapport à 2009), ce qui constitue 20 % du PIB de toute l’Afrique. Les « Black Diamonds », la génération post-apartheid qui s’est enrichie, représente 2,6 millions de personnes – soit 12 % de la population noire sud-africaine.
Selon le groupe de recherche sud-africain BMI, qui publie un rapport annuel, le secteur de la vente au détail a enregistré un chiffre d’affaires de 564 milliards de rands (57 milliards d’euros) en 2010. Un chiffre qui, selon ce groupe de recherche, devrait grimper à 832 milliards de rands (84 milliards d’euros) d’ici à 2014.
P. H.