Le Salon international de
l’agriculture (SIA)
a beau mettre en valeur le porc français, avec le slogan « on est tous
fous du porc français » (notre photo), le cœur n’y est pas tout à fait.
Car la France achète beaucoup plus à son voisin allemand que le contraire.
En 2012, la France ne lui ainsi a
vendu que pour 100 millions d’euros de viande de porc, soit trois fois moins
que ses importations en provenance d’Allemagne. Plus encore, alors que la
production de viande porcine augmentait de 33 % outre-Rhin entre 2002 et 2012,
elle diminuait de 7 % dans l’Hexagone.
« En dix ans, entre 2000 et
2010, la production porcine a fait un saut de 35 % en Allemagne et le taux
d’autosuffisance y est passé de 96 % en 2006 à 115 % en 2011 », indiquait,
le 26 février, Michel Ferret, le chef du service Marchés et études de filières
chez FranceAgrimer.
Non seulement la première
économie européenne dispose d’un vaste marché de 82 millions, mais elle dispose
encore à l’est d’une « arrière cour » de 100 millions de
consommateurs, « avides de rattrapage, selon l’expert de FranceAgrimer, et
avec des habitudes consommation alimentaire proches de celles de
l’Allemagne ». Et de citer notamment l’Europe de l’Est, qu’il qualifie de
« civilisation du porc ».
La France a déposé plainte pour dumping social
Au demeurant, l’Allemagne emploie
dans ses exploitations agricoles – notamment ses unités d’abattage et ateliers
de découpe de porcs, activités intensives en main d’œuvre – des travailleurs
originaires d’Europe centrale, de Roumanie ou de Bulgarie. Une main d’œuvre
très bon marché, souvent peu qualifiée, recrutée avec des sociétés de service
basées en Europe de l’Est. Cette situation a poussé la France à déposer plainte
auprès de la Commission européenne contre l’Allemagne pour dumping social.
De façon involontaire, les Verts,
au pouvoir dans plusieurs länder allemands, deviendraient aujourd’hui les alliés
de la filière en France. Notamment en Basse-Saxe, grande région d’élevage (15 %
de la surface agricole utile allemande, 30 % des porcs), où, aux affaires avec
les sociaux-démocrates du SPD depuis un mois, ils veulent instaurer un salaire
minimum de 8,5 euros par heure dans les entreprises agroalimentaires et relever
les normes en matière de protection des animaux.
Le modèle agricole allemand menacé ?
Le sujet est d’autant plus
sensible pour le nouveau ministre de l’Agriculture vert que, dans ce land en
particulier, quelque 150 exploitations sont soupçonnées de fraudes à la vente
d’œufs bio. De surcroît, « faute de conventions collectives, les conditions de travail
et d’hébergement des travailleurs immigrés dans les ateliers de découpe sont souvent
déplorables », souligne Michel Ferret.
Aujourd’hui, l’expert de FranceAgrimer se demande si
l’agriculture allemande n’a pas atteint « son optimum ». Quand on lui
demande si « le modèle agricole allemand est menacé », il ne franchit
pas le pas, mais note, néanmoins, que les mauvaises nouvelles s’accumulent pour
une agriculture allemande déjà déficitaire de 13 milliards d’euros en 2012.
Le prix du foncier explose. En
2010, année de renégociation des baux dans l’ex-RDA, le prix à l’hectare (ha) a
bondi de 21 % à l’Agence foncière fédérale BVVG, chargée de la vente du foncier
des fermes d’État héritées de l’époque
de la République démocratique allemande (RDA). En moyenne, il s’est ainsi élevé
à 12 640 euros/ha en 2011 et est encore passé à 13 760 euros l’an dernier.
François Pargny
Pour en savoir plus
Sur notre site; cliquer dans
Entreprises & Secteurs et choisissez « Agroalimentaire » pour
accéder à tous nos contenus.