Entre 2010 et 2014, les ventes de robots ont augmenté de 17 %. Le nombre de demandes de brevets dans ce domaine a, quant à lui, triplé au cours de cette dernière décennie. Publiées par la Fédération internationale de la robotique, ces données ont été reprises dans une résolution adoptée le 16 février dernier par le Parlement européen (PE) réuni en session plénière à Strasbourg. L’industrie européenne de la robotique « pourrait se voir avantagée par une démarche réglementaire efficace, cohérente et transparente au niveau de l’Union pour ne pas avoir à adopter des normes définies par d’autres », affirment les eurodéputés. Non contraignant, ce texte témoigne de l’intensification des réflexions et débats autour des robots dans toute l’Europe.
Responsabilité civile, éthique…
Le texte appelle ainsi la Commission à définir les responsabilités en cas d’accident « impliquant par exemple des voitures sans conducteur », précise Mady Delvaux (Luxembourg, S&D), auteur de la résolution. Pour la Luxembourgeoise, les robots pourraient être dotés d’une immatriculation, d’une sorte de boîte noire et leur détenteur se verrait imposer la souscription à une assurance. A terme, la possibilité de créer un statut juridique spécial pour les robots les plus sophistiqués pourrait même être envisagée « afin de clarifier la responsabilité en cas de dommages », souligne un communiqué.
Autre objectif du texte : fixer des principes éthiques fondamentaux interdisant la conception de robots susceptibles d’attenter à la sécurité ou à la dignité des humains. Les eurodéputés demandent également à l’exécutif européen d’envisager la création d’une agence européenne pour la robotique et l’intelligence artificielle, « afin de fournir aux autorités publiques une expertise technique, éthique et réglementaire ».
L’idée d’une taxe robot fait débat
Dans un autre volet du texte, Mady Delvaux suggère enfin de se pencher sur les conséquences sociales du développement de la robotique. Elle propose notamment de financer la mise en place d’un revenu universel de base via la création d’une taxe sur les robots ou encore la possibilité pour les consommateurs de lancer des actions collectives en cas de dommages générés par des machines intelligentes.
Si la plupart des groupes ont soutenu les recommandations dans leur ensemble, ces dernières mesures – plus controversées – n’ont pas obtenu le feu vert en plénière malgré un vote favorable, quelques semaines plus tôt, au sein de la Commission Affaires juridiques du PE. « Je suis déçue que la coalition de droite ait refusé de tenir compte des éventuelles conséquences négatives sur le marché du travail. Ils ont rejeté un débat général et ouvert, et ont ainsi négligé les craintes de nos citoyens », a déploré la socialiste luxembourgeoise à l’issue du vote.
Pour ses détracteurs, « la taxe robot tuerait l’innovation », comme l’affirme Kaja Kallas (ALDE, Estonie). Pour Jean-Marie Cavada, rapporteur pour les Démocrates et Libéraux sur le texte, il est dès aujourd’hui nécessaire de jeter les bases d’une approche européenne en la matière. Mais l’ancien journaliste estime néanmoins que donner une responsabilité juridique à des robots n’a pas de sens d’un point de vue légal. « La vie privé, la protection des données, la sécurité auraient dû être notre grande priorité ».
Autre son de cloche à gauche de l’hémicycle. Selon Karima Delli, élue française du groupe des Verts et présidente de la Commission ‘Transports’, le rapport « ne va malheureusement pas suffisamment loin au sujet de l’impact social et économique de la robotisation. En particulier sur l’emploi et sur nos systèmes de sécurité sociale ». Elle ajoute ensuite : « Le domaine des transports est, par ailleurs, particulièrement concerné. Le principe de précaution doit guider l’encadrement de la robotique et accompagner son essor. »
Kattalin Landaburu, à Bruxelles