Dans un communiqué commun, les organisations de producteurs de cognac, d’armagnac et de brandies françaises demandent à la Commission européenne de suspendre sa décision concernant les droits de douanes supplémentaires sur les véhicules électriques Made in Chinois. Elles craignent d’être les premières victimes des mesures de rétorsion de Pékin et demandent à Michel Barnier d’agir.
Dossier épineux sur le bureau du fraîchement nommé Premier ministre français Michel Barnier, dont la constitution du gouvernement n’est pas encore finalisée : alors que la Commission européenne s’apprête à instaurer des droits de douane supplémentaires sur les véhicules électriques Made in China, accusés de bénéficier de subventions massives, la Chine s’apprête, elle à surtaxer les brandies européens, dans le cadre d’une enquête anti-dumping déclenchée par mesure de rétorsion. Le cognac et l’armagnac sont en première ligne, les organisations de producteurs s’en inquiètent depuis des mois.
Et Bruxelles, qui a cherché à négocier avec Pékin dans le cadre de cette procédure anti-subvention, a décidé d’avancer le vote définitif sur ces mesures au 25 septembre. Le ministre chinois du Commerce Wang Wentao doit rencontrer le vice-président et commissaire européen au Commerce, Valdis Dombrovskis, ce 19 septembre à Bruxelles, pour d’ultimes discussions.
Depuis le début, la France a soutenu cette attitude de fermeté de la part de Bruxelles. De quoi provoquer une vive inquiétude chez les producteurs français, pour lesquels le marché chinois est stratégique : leurs produits constituent 97 % des exportations de brandies européens vers la Chine. Pour le seul cognac, qui ne supporte actuellement que 5 % de droit de douane en Chine, c’est 25 % de ses exportations qui sont menacées.
Deux dossiers « étroitement liés »
Dans un communiqué commun publié le 18 septembre, la FEVS (Fédération des exportateurs de vins et spiritueux) et les interprofessions du cognac et de l’armagnac (le BNIC et le BNIA) dénoncent la décision de la Commission et le soutien de Paris : « La Chine s’apprête à surtaxer l’armagnac, le cognac et les brandies français, en rétorsion aux surtaxes qui seront imposées sur ses voitures électriques par l’Union européenne, avec le soutien de la France, indiquent-elles. Nous sommes mis devant le fait accompli : un arbitrage défavorable a été rendu dès le début au niveau des autorités françaises au titre duquel il a semble-t-il été décidé que nos filières pouvaient être sacrifiées dans ce bras de fer. L’impact sectoriel et régional des mesures annoncées va être immense ».
Pour ces organisations, les « deux dossiers étant totalement liés », il ne fait aucun doute que les autorités chinoises répliqueront immédiatement « avec des surtaxes qui nous feront perdre à court terme un marché vital pour nous ». Ce n’est pas faute d’avoir tenté de sensibiliser les autorités à ce problème : « Malgré des mois d’alerte, rien ne semble arrêter l’engrenage fou dans lequel nous nous voyons emportés, alors qu’il s’agit de sujets politiques avec lesquels nous n’avons rien à voir, déplorent les organisations des filières concernées. Nous ne sommes pas écoutés ».
D’où leur appel au nouveau Premier ministre Michel Barnier, ancien ministre de l’Agriculture (sous Nicolas Sarkozy, de 2007 à 2009) et commissaire européen « pour que la France fasse très rapidement le nécessaire pour nous préserver d’une catastrophe annoncée mais encore évitable ». Concrètement, « le sort du cognac, de l’armagnac et des brandies français doit absolument être soulevé par les autorités françaises dans le cadre des discussions qui se déroulent en ce moment-même à Bruxelles entre la Commission européenne et le ministre chinois du Commerce », précise le communiqué.
Par ailleurs, les organisations de la filière demandent le report du vote définitif sur la taxation des voitures chinoises, « arbitrairement » avancée, selon elles, au 25 septembre par la Commission. « Le Premier ministre qui vient de prendre ses fonctions et le nouveau gouvernement français qui est en cours de constitution ne peuvent pas être mis au pied du mur, estiment encore ces organisations. Alors que des dizaines de milliers d’emplois en dépendent en France et que le contexte ayant prévalu lors du lancement des procédures en cause a profondément changé, il leur faut plus de temps pour analyser l’impact réel de la décision sur le point d’être actée pour notre filière, notre région et l’économie française dans son ensemble ».
A suivre…
C.G