La Commission européenne envisagerait de supprimer graduellement les mesures anti-dumping prises à l’encontre des panneaux solaires chinois. Si la décision finale est attendue le 3 mars prochain, les récentes déclarations de ses hauts responsables semblent confirmer un changement de cap, malgré la crainte d’importations massives à bas coûts et de nouvelles suppressions d’emploi dans le secteur.
EU Prosun vs SolarPower Europe
« Il ne fait aucun doute que nous avons le droit de protéger notre industrie » a déclaré le vice-président de la Commission européenne, Frans Timmermans. « Mais dans un premier temps, il nous faut prendre en compte les autres entreprises, qui importent ces produits », a-t-il ajouté. Ces sociétés emploient des milliers de personnes à travers l’Europe et sont essentielles pour que l’Union européenne (UE) remplisse ses objectifs environnementaux, a-t-il insisté. Car sil l’industrie européenne, favorable au maintien des taxes, représente 8 000 emplois, les entreprises dépendantes des importations chinoises de panneaux solaires emploient quant à elles 50 000 personnes.
Deux associations manœuvrent donc en coulisses pour veiller au maintien de leurs intérêts. EU Prosun, d’abord. A l’origine de la mise en place des mesures anti-dumping en 2013, l’organisation continue de plaider pour leur prolongation. Face à elle, SolarPower Europe. Opposée à des taxes qui induisent une augmentation de leurs coûts, les représentants de cette dernière soutiennent la proposition envisagée par la Commission, à condition qu’elle conduise « à une réelle suppression de ces mesures dans 18 mois », précise l’organisation dans un communiqué. Et c’est visiblement l’option retenue à ce stade par l’exécutif européen, la solution graduelle devant permettre aux producteurs de panneaux solaires européens de « s’adapter à la nouvelle situation ».
Un « message politique » à l’attention de Pékin
Mais au delà des considérations économiques, la suppression de ces taxes – à l’origine de la ‘guerre des panneaux solaires’ entre l’UE et la Chine – doit aussi être interprétée comme un gage des Européens en faveur de Pékin. « Il n’y a pas de hasard ! », répond dans le Parisien Charles de Marcilly, responsable de la Fondation Robert Schuman à Bruxelles, pour qui la toute récente annonce de l’UE est bien un « message politique ». Car si entre les deux blocs les tensions et divergences restent considérables, chacun envisage un rapprochement vers l’autre afin de répondre – si nécessaire – à la tentation protectionniste de la nouvelle administration à Washington.
Lors d’une table ronde organisée par BusinessEurope à Bruxelles, la semaine passée, Cecilia Malmström a rappelé la stratégie de l’exécutif européen : l’UE doit « renforcer » ses « relations » avec d’autres pays. Deuxième partenaire commercial après les États-Unis, « la Chine en fait évidemment partie », a insisté la commissaire au Commerce. Un positionnement qui fait écho au discours de Xi Jinping à Davos, au cours duquel le président chinois s’était présenté comme le nouveau défenseur du libre-échange.
Kattalin Landaburu, à Bruxelles