Certains grands acteurs du fret maritime et aérien enchaînent les commandes de navires et d’avions de nouvelle génération aux carburants alternatifs zéro carbone qui seront livrés en 2024. De leur côté, les commissionnaires de transport lancent des solutions de biocarburant dans le transport aérien.
Après avoir promis début 2021 de mettre en service son premier navire neutre en carbone en 2023, le géant du fret maritime A.P. Moller-Maersk passe à l’acte.
Il vient de commander le 25 août dernier au chantier naval sud-Coréen Hyundai Heavy Industries (HHI), huit porte-conteneurs de 16 000 conteneurs (ou EVP) chacun, fonctionnant au méthanol « propre » qui seront lancés en 2024. Le contrat qui s’élève à 1,4 milliard de dollars, comprend une option de 4 navires supplémentaires de la sorte livrables en 2025.
Vers des porte-conteneurs de Maersk au bio-méthanol ou au e-méthanol
Ces nouveaux bateaux auront une double motorisation. Ils pourront carburer au fuel à basse teneur en soufre et quand l’approvisionnement mondial le permettra, au bio-méthanol ou au e-méthanol (méthanol de synthèse), deux types de carburant émettant zéro carbone.
« Cette commande prouve que des solutions neutres en carbone sont disponibles aujourd’hui sur tous les segments de navires porte-conteneurs et qu’on s’engage auprès du nombre croissant de nos clients qui cherchent à décarboner leurs chaînes d’approvisionnement », a déclaré Soren Skou, P-dg d’A.P. Moller-Maersk, dans un communiqué.
Déjà, le premier armateur mondial a fait un premier pas dans la production de méthanol en retenant le 20 août dernier son premier fournisseur. REintegrate, filiale de la société danoise European Energy, va ainsi construire une usine qui produira environ 10 000 tonnes de méthanol « propre » lorsqu’elle sera opérationnelle en 2023. Elle servira d’abord à avitailler le premier navire « Feeder » de 2100 EVP opéré par Sealand Europe, filiale de Maersk, qui sortira du chantier du sud-Coréen Hyundai la même année.
DHL commande les tout premiers avions cargo 100 % électriques
Dans le fret aérien, les commissionnaires de transport international travaillent également sur des solutions de carburant propre.
DHL Express, le géant du transport express a commandé le 25 août les 12 premiers avions cargo tout électrique au constructeur aéronautique américain Eviation. DHL vise à mettre en place un réseau de fret aérien express électrique zéro émission et à faire un pas de géant vers un avenir durable de l’aviation.
Eviation prévoit la livraison de ses avions 100 % électriques en 2024. « Pour parvenir à des opérations logistiques propres, l’électrification de la motorisation joue un rôle crucial et contribuera de manière significative à notre objectif global de neutralité carbone » a déclaré le 25 août, John Pearson, P-dg de DHL Express.
Bolloré Logistics lance son offre de fret aérien aux biocarburants
D’autres commissionnaires de transport international s’associent avec les compagnies aériennes pour proposer aux clients chargeurs des solutions de carburant d’aviation durable ou « SAF » (Sustainable Aviation Fuel).
Il s’agit d’utiliser un biocarburant issu d’huile usagée recyclée et bientôt de déchets agricoles ou forestiers qui, mélangé jusqu’à 50 % au kérozène traditionnel, contribue à réduire les émissions de CO2 de 80 %.
Bolloré Logistics lance ainsi son offre AIRsaf basée sur l’utilisation de ce kérozène vert pour offrir à ses clients une meilleure approche écoresponsable de transport aérien. Cette solution, proposée à prix coûtant, concerne les envois ponctuels ou réguliers assurés par certaines compagnies aériennes sur tous les axes géographiques.
Pour cela, le logisticien français a déjà rejoint le programme SAF d’Air France KLM Cargo pour ses expéditions en 2021 entre Paris et New York et offre la possibilité d’utiliser ce biocarburant pour le fret en soute sur 30 lignes passagers internationales d’Air France KLM.
« On a investi dans l’achat d’un stock conséquent d’huile de cuisine usagée. Le choix de l’utilisation de ce biocarburant représente néanmoins un surcoût de 20% à 50% au kg transporté que l’on reporte à nos clients. Mais avec la hausse à l’avenir des achats et de l’utilisation de ce carburant de récupération, ce surcoût devrait fortement baisser » souligne Philippe de Crecy, vice-président Airfreight Europe de Bolloré Logistics.
Le logisticien français n’est pas le seul à miser sur le SAF.
Dans le cadre de son programme Net Zero Carbon, K+N et la compagnie aérienne American Airlines avaient scellé en mars dernier un partenariat pour utiliser plus de 11 millions de litres de SAF dans la motorisation des Boeing de la compagnie.
K+N avait déjà adhéré en janvier au programme SAF d’Air France KLM Cargo. Les deux partenaires ont inauguré la première ligne à base de SAF entre l’Amérique du Nord et l’Europe, reliant Los Angeles à Amsterdam.
Bruno Mouly