Depuis le déclenchement par Israël de « frappes préventives » sur les installations nucléaires et militaire iraniennes, le 13 juin, et la riposte iranienne via des vagues successives de missiles sur Israël, le Moyen-Orient est plongé dans l’incertitude, faisant grimper à nouveau la menace d’une escalade dévastatrice. Avec comme premier impact de ce regain de risque géopolitique, une hausse des cours du pétrole et de nouvelles perturbations du transport mondial.
A court terme, l’impact le plus visible du conflit direct entre Israël et l’Iran déclenché le 13 juin est l’augmentation des cours du pétrole. Ils ont bondi de près de 10 % depuis le déclenchement des « frappes préventives » d’installations stratégiques iraniennes. Le baril de Brent avait pris plus de 7 % le jour même, à 74,23 USD/baril, il atteignait les 75 USD le 16 juin, grimpant jusqu’à 78 USD.
S’il est durable, ce renchérissement du coût de l’or noir à quoi peser sur les perspectives déjà atones de l’économie mondiale, et notamment européennes.
Risque de regain de tensions sur l’ensemble du Moyen-Orient
Du point de vue régional, ce nouveau conflit met en risque l’ensemble du Moyen-Orient, déjà affecté par la guerre d’Israël contre le Hamas dans le territoire palestinien de Gaza et le Hezbollah au Liban, tous deux soutenus par l’Iran. Mais l’impact va bien au-delà car il rajoute une forte couche d’incertitude aux marchés financiers « à un moment où les pressions sur l’économie mondiale s’intensifient en raison des politiques commerciales imprévisibles du président Trump » observe Reuter.
Pour Sameer Samana, responsable des actions mondiales et des actifs réels au Wells Fargo Investment Institute, « la résurgence d’un conflit majeur au Moyen-Orient devrait accroître les tensions géopolitiques, y compris la forte hausse des prix du pétrole ».
Ce conflit fait aussi peser de nouvelles incertitudes sur les chaînes d’approvisionnement mondiales, non pas parce que Israël et l’Iran -sous sanctions internationale depuis des années- en sont des maillons clés, mais via essentiellement la courroie du transport maritime.
Selon Susi Snyder, coordinatrice de programme pour la Campagne internationale pour l’abolition des armes nucléaires (ICAN), citée par Euractiv, au-delà de la hausse des prix de l’énergie, le conflit Israël-Iran, s’il se prolonge, fait grimper le risque d’une nouvelle menace sur les chaînes d’approvisionnement mondiales et européennes.
Au cœur du problème, le détroit d’Ormuz, au large des côtes iraniennes, par où transite une importante partie du transport maritime mondial, dont environ 20 % du pétrole mondial. Le regain d’insécurité dans cette zone s’ajoute à celle qui paralyse déjà depuis plusieurs mois le trafic passant par corridor du golfe d’Aden, la mer Rouge et le canal de Suez, sous la menace des rebelles pro-iraniens Houthis.
Profitant de l’accalmie liée au cessez-le-feu conclu par les États-Unis et les rebelles yéménites début mai par l’entremise du sultanat d’Oman, l’Autorité égyptienne du canal de Suez avait commencé à recontacter ses clients pour relancer le trafic. CMA CGM, avait entrepris de refaire passer des navires par ce corridor mais au compte-goutte et sous escorte militaire. Le regain d’insécurité risque de ruiner à nouveau ces efforts.
Le transport aérien, voyageurs et fret, est aussi fortement perturbé, par cette guerre par voie de missiles traversant les espaces aériens de plusieurs pays dont la Jordanie, l’Irak et la Syrie. Durant le week-end, après la fermeture de l’aéroport Ben Gourion de Tel-Aviv ordonnée par les autorités israéliennes et de l’espace aérien iranien décrétée par Téhéran, de nombreuses compagnies aériennes internationales ont annoncées des annulations de vols ou suspension de desserte d’Israël et de l’Iran, dont Air India, Air France, Lufthansa (et sa filiale suisse Swiss), Aegean Airlines, Emirates, Qatar Airways… Nombre d’observateurs estiment que cette perturbation du trafic aérien perdurera tant que le conflit durera.
« Je ne pense pas que nous allons assister à une ruée sur le papier toilette, indique Susi Snyder, toujours cité par Euractiv. « Mais là encore, sans vouloir être alarmiste, nous vivons dans une économie où nous ne savons pas d’où proviennent tous les composants de notre dentifrice. Alors, une fois que ces chaînes d’approvisionnement seront rompues, que ferons-nous ? »
Concernant la France, ce nouveau conflit de grande ampleur arrive au plus mauvais moment pour les milieux d’affaires français, dont le regain d’intérêt pour les marchés du Golfe ne se dément pas depuis quelques années, stimulés par les opportunités nées des grands programmes d’investissements industriels et d’infrastructures lancés à coup de dizaines de milliards de dollars par les Emirats arabes unis, l’Arabie Saoudite ou encore le Qatar. Il va notamment peser sur l’atmosphère de la deuxième édition du forum d’affaires de Business France Vision Golfe, organisé les 17 et 18 juin à Paris, au ministère de l’Économie et des finances, autour des opportunités des marchés du Conseil de coopération du Golfe.
CG
