Les grèves contre la réforme des retraites en fin d’année ont lourdement impacté les ports du Havre et de Marseille. D’où des mesures commerciales exceptionnelles pour maintenir la confiance de leurs clients et relancer leurs trafics. Voici ce qu’il faut savoir de leurs plans de relance.
Haropa-Port du Havre et les principaux acteurs de l’économie portuaire – l’Union maritime et portuaire (UMEP), le Syndicat des transitaires et des commissionnaires en douane du Havre (STH), TLF Overseas et les manutentionnaires – ont signé le 2 mars au Havre un accord de relance commerciale pour la filière conteneurs-logistique.
Objectif de cet accord : créer un véritable « choc de relance » pour reconquérir la confiance des clients et restaurer progressivement l’attractivité de la plateforme portuaire.
Un investissement de 6 millions d’euros
Les mesures commerciales décidées par la place portuaire havraise prennent en compte les filières les plus impactées à savoir conteneurs et roulier.
1./ Mesures pour la filière conteneurs
Dans le cadre de l’accord, les signataires s’accordent pour prendre en charge les surcoûts de stationnement prolongés de conteneurs sur les terminaux havrais :
– Frais de stationnement des conteneurs exports : des mesures commerciales bilatérales seront proposées aux armements qui n’auraient pas pu bénéficier de la mesure de baisse des droits de port appliquée le 31 janvier dernier.
– Frais de stationnement des conteneurs import : neutralisation des frais de stationnement pour les 14 jours sans activité portuaire (entre le 5 décembre 2019 et le 31 janvier 2020), correspondant à 100 000 conteneurs soit 30 euros par jour et par conteneur. Haropa-Port du Havre contribue à hauteur de 18 euros/conteneur et les manutentionnaires à hauteur de 12 euros/conteneur. Cette mesure représente un nouvel investissement de 3 millions d’euros.
2./ Mesures pour la filière roulier
Des mesures de relance de l’activité roulier sont en cours de discussion avec les acteurs de la filière.
3./ Mesures pour les services aux navires
Les services de pilotage, remorquage et lamanage ont communément décidé d’appliquer une remise de 10 % à tout nouveau service faisant escale au port du Havre pour la période du 1er avril au 31 décembre 2020. Cette mesure commerciale concerne les navires porte-conteneurs et rouliers.
Ces mesures viennent compléter une première série de mesures déjà prises le 5 février à l’issue de la réunion du Club Business de l’ensemble portuaire Haropa (Le Havre, Rouen, Paris) : remise tarifaire proposée pendant deux années aux navires porte-conteneurs escalant au port du Havre dans le cadre de la création d’un nouveau service cette année ; remise commerciale exceptionnelle proposée sur les droits de port sur les navires porte-conteneurs pour les mois de janvier et février 2020.
Ce premier dispositif commercial avait été estimé à un coût de 3 millions d’euros pour les armements maritimes de la filière conteneurs-logistique.
Au total, le nouveau plan d’investissement collectif porte donc à plus de 6 millions d’euros l’effort financier de la place portuaire havraise. « En adoptant collectivement ces mesures d’un montant exceptionnel, nous souhaitons adresser un message clair et direct : nous réaffirmons ensemble la volonté du port du Havre de servir tous nos clients, au-delà des aléas conjoncturels, et de restaurer ainsi la confiance permettant de retrouver très vite notre dynamique de développement », a déclaré Baptiste Maurand, directeur général de Haropa-Port du Havre, lors de la signature de l’accord.
La communauté portuaire et la Région Sud pour Marseille-Fos
Les mouvements sociaux contre la réforme des retraites ont également impacté le port de Marseille-Fos, freinant en particulier son activité conteneurs, ainsi que les entreprises de la place portuaire. L’impact financier global pour le port de la citée phocéenne et pour les professionnels de la place portuaire est estimé à près de 250 millions d’euros.
Pour éponger cette perte, la Région Sud, le Grand port maritime de Marseille (GPMM) et l’Union maritime et fluviale (UMF) de Marseille-Fos, regroupant l’ensemble des entreprises des Bouches-du-Rhône qui constituent la filière du transport maritime, ont lancé un plan d’actions commun, le 21 février, depuis l’Hôtel de Région.
Deux dispositifs d’urgence « exceptionnels » sont mis en place dans ce cadre : un plan d’investissement régional et un pacte d’engagement Marseille-Fos.
Objectif de ces deux dispositifs : comme pour la place havraise, regagner la confiance écornée des clients pour relancer l’activité du port Marseille-Fos et préserver la compétitivité portuaire sur la filière du transport de marchandises diverses sur les lignes régulières internationales.
Une enveloppe régionale de 3 millions d’euros
Le plan d’investissement régional se traduit concrètement par un soutien financier de la Région à hauteur de 3 millions d’euros maximum.
Cette enveloppe sera accordée à au moins 13 entreprises de la place portuaire. « Les entreprises concernées sont les manutentionnaires et les terminalistes des filières conteneurs ; Ro-Ro et Ro-Pax international (ferry desservant le Maghreb) ; voitures », précise au Moci le port de Marseille-Fos.
La Région a donc choisi d’accompagner les entreprises qui permettent d’assurer au quotidien l’activité portuaire, pour affronter cette période de crise. Objectif : les aider à maintenir un équilibre financier, qui avait été mis en danger par les blocages du début d’année.
Cette aide financière « exceptionnelle » s’inscrit dans son dispositif « Région Sud Défensif », initié dans le cadre du Fonds d’investissement pour les entreprises de la région (FIER). « La Région ne pouvait pas rester indifférente à la situation rencontrée par les entreprises de la place portuaire de Marseille-Fos », a déclaré son président Renaud Muselier lors du lancement du plan d’action. « Le port est le poumon économique de notre territoire, et c’est la compétence de la Région de lui venir en aide pour affronter cette crise », a-t-il ajouté.
Des mesures commerciales « exceptionnelles »
Maintenir la confiance des clients du port et relancer l’activité sur le transport de marchandises diverses, est l’objectif du Pacte d’engagement, signé par ailleurs par le port de Marseille-Fos, l’UMF et les professionnels de la filière portuaire.
Résultat d’une démarche collective et volontariste de l’ensemble des acteurs de la communauté portuaire pour adresser un signal fort à leurs clients actuels et futurs sur les conditions d’accueil favorables au sein du port de Marseille-Fos, ce pacte d’engagement comprend deux volets pour un montant global de plus de 5 millions d’euros :
1./ Une remise commerciale sur les frais de stationnement
– Cette remise couvre l’altération du service rendu pendant les 13 jours de grèves de la période du 5 décembre au 25 janvier.
– Cette remise s’applique aux frais de stationnements sur les marchandises diverses à l’import comme à l’export. Elle est réalisée sous forme d’avoirs accordés par les manutentionnaires à leurs prestataires de services sur les factures acquittées.
– Filières concernées : RoRo et RoPax international, car carriers, conteneurs.
Le port invite les chargeurs, pour bénéficier de cet avantage, à se rapprocher de leurs prestataires de services (transitaires, compagnies maritimes…).
2./ Une remise sur les frais portuaires
– Une remise jusqu’à 30 % pendant 3 mois sera appliquée sur les frais portuaires des lignes régulières internationales traitant les marchandises diverses.
– Portée par le pilotage, le remorquage, le lamanage et le port pour les droits de port, cette remise s’appliquera aux armateurs qui confirmeront leur confiance au port de Marseille-Fos, précise le pacte d’engagement.
– Filières concernées : RoRo et RoPax international, car carriers, conteneurs
« Ces mesures d’urgence immédiates et sans précédent sont destinées à retrouver rapidement la dynamique portuaire sur des marchés très concurrentiels et à remercier nos clients de la confiance accordée à la place de Marseille-Fos », a ainsi déclaré Hervé Martel, président du GPMM.
Outre le Havre et Marseille-Fos, les autres places portuaires de l’Hexagone à l’instar de Nantes-Saint-Nazaires ou du Port Atlantique La Rochelle ont subi de plein fouet les actions de grèves perlées qui ont émaillé la fin de l’année 2019 et se sont prolongées début 2020. L’heure est donc à la prise de mesures collectives avec l’ensemble des acteurs de l’écosystème portuaire pour endiguer la perte de trafic et relancer leur attractivité.
Venice Affre