Les prévisionnistes s’arrachent les cheveux ou deviennent prudents. Les cours du pétrole sont devenus si volatiles. Parallèlement, chacun cherche à évaluer la montée de la part des énergies renouvelables et à s’adapter à l’urgence climatique. Le groupe pétrolier Total se diversifie ainsi dans les autres énergies et la production et distribution électriques.
S’agissant du prix du pétrole, les experts de Coface se sont risqués à un pronostic. Dans le guide « Risques pays & sectoriels 2019 » présenté à l’occasion de son colloque annuel sur les Risques pays, le 5 février, l’assureur crédit estime que le prix du baril pourrait s’établir à un niveau moyen de 75 euros comme en 2018, ce qui éviterait à maints pays exportateurs d’avoir à ponctionner leur budget.
L’impact du partenariat russo-saoudien et du pétrole de schiste américain
Dans ce contexte de volatilité, le P-dg de Total, Patrick Pouyanné, a, pour sa part, refusé de se prononcer sur la question du prix du baril en 2019 lors du colloque, préférant rappeler au passage que deux événements majeurs s’étaient déroulés en 2018 : le partenariat russo-saoudien, qui a permis de soutenir les prix mondiaux, et l’apparition sur les marchés internationaux des États-Unis, devenus le premier producteur mondial d’or noir grâce au pétrole de schiste.
Se projetant ensuite vers l’avenir, Patrick Pouyanné a indiqué que le recours aux hydrocarbures n’était pas prêt de se tarir. C’est pourquoi son groupe continuera à produire du pétrole en 2040. A cet horizon, selon lui, les énergies fossiles représenteront 58 % du mix énergétique, les énergies renouvelables 30 % et le charbon 12 % (la Chine et l’Inde étant de grands producteurs).
« Le gaz naturel sera la première énergie fossile. Il sera un bon complément des énergies renouvelables, sa mise en production est flexible », a assuré le patron de Total, numéro deux mondial du gaz naturel liquéfié (GNL) depuis l’an dernier.
Dans le monde de l’énergie, il n’y a pas, selon lui, de « révolution ». C’est un terme « médiatique ». Il faut « investir » et « ce sont des choix compliqués, lourds », dans « un temps long ». La « transition énergétique est aussi un temps long », a encore insisté Patrick Pouyanné. Pour lui, plusieurs facteurs freinent encore le développement des énergies renouvelables, dont « une production intermittente » et l’obstacle du « stockage massif de l’électricité, qu’on ne sait pas faire aujourd’hui ». Le patron de Total a ainsi plaidé pour « combiner les énergies ». Pour lui, « il ne faut pas opposer, le scénario sera graduel ».
Tout le monde n’est pas, toutefois, ce cet avis.
Centrales électriques : la percée des énergies renouvelables
Invité à débattre avec Patrick Pouyanné, Sébastien Clerc a pris clairement le contrepied du patron du major pétrolier. Directeur général de Voltalia, concepteur et exploitant de centrales électriques à partir d’énergie renouvelable, il a considéré, pour sa part, qu’une « révolution » était en cours. Elle ne se fera « pas en trois jours, mais en une dizaine d’années », parce que « le coût des énergies renouvelables est moins cher ».
Déjà en 2018, 80 % des centrales électriques dans le monde auraient été réalisés avec des énergies renouvelables. Les autres énergies deviendraient donc « résiduelles », a affirmé le dirigeant de Voltalia.
Sa société aurait, d’ailleurs, injecté un milliard d’euros en quatre ans dans ce secteur et 85 % des centrales électriques auraient été mises en œuvre sans aucune subvention, principalement dans les pays émergents où la consommation électrique augmente. Sébastien Clerc a ainsi cité l’Afrique, l’Amérique latine et le sud de l’Europe.
François Pargny