Karel de Gucht, commissaire européen au Commerce, a été auditionné le
16 janvier à Paris par les membres de la Commission des Affaires européennes de
l’Assemblée nationale. Outre un plaidoyer en
faveur des accords de libre échange adressé aux députés français, l’ancien vice-Premier ministre belge, en
poste depuis fin 2009, juge que la Commission européenne a fait la preuve de son efficacité pour lutter
contre la concurrence déloyale et le dumping. Karel de Gucht a encore justifié
l’abandon de marquage d’origine « made in ».
Concurrence déloyale, anti-dumping, dossier Bic. « L’Europe,
en tant que bloc commercial, n’a rien à craindre de la mondialisation ».
Mais si l’Union européenne conclut des accords de libre échange,
elle sait aussi se faire respecter, a assuré Karel de Gucht aux députés français.
Auditionné le 16 janvier par la Commission des Affaires européennes de
l’Assemblée nationale, cet homme politique sérieux et plutôt austère, était là pour tenter de convaincre des parlementaires sceptiques de sa détermination sur des thèmes comme la concurrence
déloyale et le dumping, pour lesquels la Commission européenne est souvent accusée
de faiblesse.
« Nous mettons un accent
particulier sur la mise en œuvre des accords, le respect de la règle de droit
et le combat contre les pratiques déloyales », a déclaré le commissaire dans
son discours d’ouverture. Ensuite, en réponse à une question d’un député, il a
affirmé que l’Europe n’avait aucune raison de se défendre, puisque «sa
balance commerciale est largement positive et que son excédent monte d’année en
année ».
« Donc, l’Europe n’a pas à
se défendre, a-t-il répété. « Et heureusement », car, sous-entendu si
ses frontières étaient fermées, « elle ne pourrait pas payer l’énergie et
les mines » qui sont vitales. Une fois prononcé ce qui lui est apparu
comme une évidence, Karel de Gucht a cité plusieurs interventions de la
Commission européenne. « Au cours de l’année écoulée, a-t-il évoqué, nous
avons gagné » contre la Chine sur les restrictions aux exportations de
matières premières et « lancé un deuxième cas sur les terres rares ».
Par ailleurs, « nous avons avancé dans le conflit Airbus-Boeing avec les
Etats-Unis. Et nous avons agi contre les restrictions injustifiables de
l’Argentine » aux exportations européennes.
Avec la Chine, a fait encore
valoir Karel de Gucht, « nous n’avons pas hésité à lancer une procédure
anti-dumping visant les importations en Europe de panneaux solaires
subventionnés ». C’est un dossier « de l’ordre de 21 milliards
d’euros en 2011 », « le plus gros que nous ayons déposé sur la
table » et « les Chinois sont sidérés », affirme le commissaire
européen.
Et ce n’est pas fini selon lui, car la Commission européenne
envisage de porter plainte contre les pratiques de financement export de Pékin
dans les télécommunications, qui portent préjudice à Ericsson, Nokia, Siemens
et Alcatel Lucent. En l’occurrence, les chinois ZTE et Huawei seraient accusés
de vendre leurs produits 35 % en dessous des prix du marché.
Pour autant, Karel de Gucht juge
qu’il faut utiliser « ces instruments à bon escient ». Et dans le cas
de la société Bic,
qui était protégée depuis 1981 par des mesures anti-dumping infligées aux
briquets bas de gamme chinois, il estime qu’un tel instrument ne peut être
utilisé « de façon indéterminée ». D’autant que, pour lui, une clause
anti-dumping ne se justifiait plus, puisque « Bic est largement
bénéficiaire », que cette entreprise est aussi « établie dans des
pays où elle n’est pas protégée et donc qu’elle est compétitive ».
Abandon du marquage d’origine « made in ». Interrogé par les députés sur ce sujet
sensible qu’il n’avait pas abordé dans son discours d’ouverture, Karel de Gucht
a clairement mis en cause le Conseil européen, « qui avait sur la table la
proposition de la Commission européenne depuis plus de trois ans ». Ce projet d’étiquetage, proposé
en l’absence d’harmonisation européenne sur le sujet, serait, en outre,
contraire aux règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC).
« Nous avons fait des propositions
intermédiaires, mais les industriels européens n’en veulent pas, considérant
que c’est un coût supplémentaire », remarque Karel de Gucht. Pour sa part,
Yannick Jadot, vice-président de la Commission du commerce international au
Parlement européen, a accusé l’exécutif européen de « prendre le parti de
certaines multinationales qui veulent rendre opaques les lieux et les
conditions de fabrication ».
En l’absence d’un étiquetage obligatoire pour
l’importation de biens dans le textile, la chaussure, la bijouterie ou la
verrerie en provenance de pays tiers, l’objectif du « made in » était
de garantir aux consommateurs européens les conditions sanitaires, sociales et
environnementales de production. Pour autant, a lancé le commissaire européen à
destination de députés français évoquant le « patriotisme
économique », « on ne va pas ranimer l’industrie française en disant
aux Français d’acheter français, car dans de nombreux produits, il y a à la
fois du français et de l’étranger ». Et de conclure sans sourciller :
« aujourd’hui, il est difficile de consommer un produit vraiment
français ».
François
Pargny
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