Quelque 59 % des entreprises « ne se sentent pas accompagnées par les pouvoirs
publics » et 56 % « ne se sentent pas informées des mesures et dispositifs
existants en matière d’aide au développement international. Les résultats du 1er baromètre CCI International de l’internationalisation des PME-ETI françaises*, rendus public le 25 juin au lendemain de l’assemblée générale de l’Union des chambres de commerce et d’industrie françaises à l’étranger (Uccife), tombe à pic.
Il est en effet publié au moment où les Chambres de commerce et d’industrie (CCI) et leurs « cousines » de l’étranger, les CCI françaises à l’étranger (CCIFE), se sentent à nouveau mises à l’écart par les pouvoirs publics, et frontalement concurrencées par la récente offre intégrée lancée par Ubifrance et l’agence rhônalpine Erai en matière de VIE et d’incubateurs à l’étranger.
Dans des déclarations au figaro.fr à la veille de terminer son deuxième mandat de président de l’Uccife (Union des CCI françaises à l’étranger), Pierre-Antoine Gailly, avait dénoncé vertement la concurrence déloyale émanant d’Ubifrance, en particulier depuis que l’agence nationale a lancé, en partenariat avec l’agence rhonealpine Erai, une offre intégrée d’accompagnement : « Je m’étonne qu’Ubifrance,
qui vit principalement de l’argent public, concurrence de plus en plus
les chambres de commerce et d’industrie (CCI) à l’étranger qui sont
financées par les entreprises. Il pratique une guerre des prix qui met
en danger un réseau rentable », déclarait celui qui est également le président de la CCI Paris Ile de france. «Ce n’est pas le rôle des régions d’implanter un réseau à l’étranger ou
de financer une maison aux États-Unis ou en Chine pour permettre à des
entreprises d’exporter. L’argent public doit être utilisé de manière
plus raisonnable».
Déjà, fin avril, comme l’avait révélé dès mi-mai La Lettre confidentielle du Moci, les sociétés de consultants privées avaient décidé de solliciter l’Autorité de la concurrence sur ce dossier sensible, via leur organisation professionnelle, l’OSCI
Ce résultat du baromètre est seulement tempéré par le fait que 64 % d’entreprises déclarent que les organismes d’accompagnement à
l’international sont plutôt « complémentaires », contre 20 % qui les
estiment « concurrents », a relevé Dominique Brunin, directeur délégué de CCUI International et de l’Uccife. Quelque 45 % jugent par ailleurs que l’idée de créer des « maisons de l’international » à l’étranger est pertinente pour les aider (contre 36 % de réponses négatives) et 40 % jugent que bpifrance export, le volet export de la nouvelle banque publique d’investissement, recèle un « pouvoir incitatif », ce qui, selon Dominique Brunin, montre un « équilibre assez marqué » entre les perceptions positives et négatives.
Un émiettement du système
Sur la question -sensible actuellement- des organismes d’aide
sollicités, les réponses révèlent moins une dominante incontestable que
l’émiettement du système, même si les CCI arrivent nettement en tête,
confortant, selon Dominique Brunin, leur légitimité d’acteur de
l’internationalisation des entreprises.
Ainsi, la majorité -57 %-
cite en premier les CCI en France, puis en second Coface (42 %) et en
troisième à égalité les CCIFE et Ubifrance (33 % chacune), devant les
banques (32 %) et les ambassades (24 %). Même sentiment d’émiettement
pour la notoriété ou le taux de satisfaction vis à vis des organismes
d’aide : avec 65 % de notoriété, le conseil régional récolte 93 % de
taux de satisfaction, devant les CCI en France qui récolte 92 % de
satisfaits pour une notoriété pourtant bien plus grande (94 %).
Coface
est à 85 % de taux de satisfaction (pour 81 % de taux de notoriété),
devant Ubifrance (84 %, pour 63 % de notoriété) ou les banques (85 %, 69
% de notoriété). Et la toute récente BPI qui n’a que 35 % de taux de notoriété, récolte déjà 92 % de taux de satisfaction, devant Oséo, 89 %
(pour 57 % de notoriété)…
Des marges de progression importantes à l’international
Les autres résultats du baromètre confirment d’une part les marges de progression qui existent à l’international, et d’autre part la persistance de l’émiettement des dispositifs d’accompagnement.
Côté marges de progression, 38 % d’entreprises déclarent une augmentation de leur chiffre
d’affaires à l’international pour 42 % qui déclarent qu’il est resté
stable : pour Dominique Brunin, ce résultat confirme que les entreprises qui misent sur l’export se portent mieux
que les autres. Et « la marge de manœuvre est importante » pour les
faire progresser encore, a-t-il estimé.
La marge de progression apparaît d’autant plus importante que 39 % sont encore exclusivement en Europe (pour 16 % exclusivement hors d’Europe), et 61 % sont présentes en dehors de l’Europe. Ces entreprises sont aussi plus « optimistes » : 66 % disent être confiantes pour leurs perspectives à l’international contre 51 % pour leurs perspectives en France. Si elles n’en sont pas pour autant prêtes massivement à embaucher (environ un tiers seulement disent vouloir embaucher), elles sont 61 % à déclarer vouloir prospecter d’autres pays – dont 43 % d’ici un an- ce qui, pour Dominique Brunin, « positionne bien CCI International ».
Les tendances du baromètre confirment également des réalités déjà mises en exergue par de précédentes études -notamment une enquête Ifop/Osci réalisée plus tôt en début d’année-, qui révèlent plutôt un manque d’information ou d’accès à des informations pertinentes. Lorsqu’on les interroge sur les principaux freins à l’activité international, les trois premiers sont la réglementation à l’étranger (49 %), la méconnaissance des opportunités (45 %) ou la difficulté à identifier les bons partenaires commerciaux (41 %). Le manque de soutien ou d’accompagnement n’arrive qu’en quatrième position (33 %), suivi de la complexité financière des activités internationales (32 %) et des formalités administratives en France (30 %).
Christine Gilguy
*Réalisé pour la première fois par l’institut Opinionway et CCI
International, l’association qui mutualise les moyens à l’international
des CCI en France et des CCI françaises à l’étranger (CCIFE), ce
baromètre est le fruit d’une étude qualitative réalisée par téléphone
auprès d’un échantillon de 504 dirigeants d’entreprises exportatrices de
20 à 1999 salariés, entre le 28 mai et le 12 juin. 43 % d’entre elles
sont implantées à l’étranger et 64 % réalisent un CA export supérieur à
10 % du total (34 % supérieur à 30 %).
Pour prolonger :
Relire La Lettre confidentielle n° 57 du 16 mai 2013