Le Bangladesh « reste vulnérable » car
« ses exportations ne sont pas diversifiées et il dépend largement des
envois des travailleurs émigrés », indiquait l’Organisation mondiale du
Commerce (OMC), à l’issue du quatrième examen de la politique et des pratiques
commerciales de ce pays d’Asie, réalisé du 15 au 17 octobre.
Pourtant, le Bangladesh a enregistré des résultats
économiques « impressionnants » pendant les six dernières années,
avec une croissance économique moyenne annuelle de 6 %. Il a aussi pris des
mesures de facilitation du commerce, notamment en abaissant les délais de
dédouanement, et s’est imposé comme un des premiers exportateurs mondiaux
d’habillement.
Reste que pour la Banque mondiale et le Fonds
monétaire international (FMI), qui prévoit une hausse du produit intérieur brut
de 5,9 % cette année et de 6,4 % en 2013, ces performances sont insuffisantes dans
un pays de 150 millions d’habitants, où un tiers de la population vit encore sous
le seuil de pauvreté.
Ensuite, les envois de fonds et les aides
extérieures progressent peu et, s’agissant des exportations, de fait, elles
sont concentrées à 80 % dans le textile-habillement et sont dirigées à 70 %
vers l’Union européenne (UE) et les Etats-Unis. Enfin, le déficit commercial
des biens et services se creuse, en raison de la montée des importations,
composées pour un tiers de matières premières : coton, denrées
alimentaires, pétrole.
Au demeurant, le bilan énergétique est inquiétant. D’une
part, les achats de produits pétroliers augmentent à mesure que la manne
gazière, dont bénéficie encore le pays, s’épuise. D’autre part, le déficit de
production électrique coûte deux points de croissance. Avec 8 % de croissance
économique, le gouvernement de Dacca estime que le Bangladesh pourrait devenir
un pays à revenu intermédiaire d’ici à 2021.
A l’heure actuelle, cet objectif semble encore
lointain. Dans son rapport Doing Business 2012, la Banque mondiale identifie
le manque d’énergie comme le principal frein à l’investissement. Récemment,
Dacca a demandé à Washington son assistance technique pour exploiter des gaz de
schiste.
L’OMC exhorte Dacca à améliorer le climat
d’investissements, notamment en améliorant l’état des infrastructures et le
fonctionnement du système juridique. Dans les années 80, le gouvernement avait
créé des zones économiques spéciales (EPZ). Si elles « ont réussi dans une
certaine mesure à attirer les investissements étrangers et à contribuer aux
exportations », note l’OMC, elles ont eu
aussi « un effet limité sur le volume et le type de produits exportés,
d’investissements et d’emplois ».
Selon Eric Blanc, chef du Service économique à
Dacca, les EPZ sont aussi « victimes de leur succès ». Les plus
attractives, à Chittagong et Dacca, « arrivent à saturation en termes
d’espace disponible » et « les investisseurs étrangers sont réticents
à s’installer dans des zones excentrées où la main d’œuvre qualifiée est rare
et les infrastructures routières sont en mauvais état ».
Enfin, relève Eric Blanc, les entreprises des EPZ ne
sont pas soumises à la réglementation sociale du pays. En particulier,
« les ouvriers n’ont pas le droit de se constituer en syndicats ni de mener
des actions collectives ». Du coup, les Etats-Unis exercent une forte
pression sur le Bangladesh, au point de bloquer toute facilitation à l’entrée
de vêtements de ce pays sur leur sol.
Les acheteurs internationaux sont devenus attentifs
au respect des droits des travailleurs. Tout comme au niveau des salaires, qui
serait un des plus bas au monde. En septembre dernier, le patron du géant de
l’habillement Hennes & Mauritz (H&M), Karl-Johan Persson, a déclaré
avoir demandé au gouvernement du Bangladesh un relèvement des salaires des
ouvriers, à l’issue d’une rencontre avec la Premier ministre Sheikh Hasina. Un
appel qui peut difficilement passer inaperçu. Alors que ce pays d’Asie a
exporté pour 19 milliards de dollars de textile l’an passé, H&M a acheté
pour 1,5 milliard de dollars d’articles manufacturés.
En juin, plus de 300 usines appartenant aux grands
distributeurs de la planète, comme H&M, Gap et Wal-Mart, avaient dû fermer,
suite à des manifestations parfois violentes et des grèves. Comme le montre la
réaction du patron du groupe suédois, il est sans doute temps pour le
Bangladesh de faire évoluer sa législation sociale.
François Pargny
Pour prolonger :
Le GPS Business du MOCI, en
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des actualités, des appels d’offres, des textes règlementaires, ainsi qu’une
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