Depuis hier 1er janvier l’euro a remplacé la kuna dans cette ex-république yougoslave où la France est présente dans des investissements emblématiques grâce à son savoir-faire dans le domaine des partenariats public-privé. Elle dispose en revanche d’une forte marge de progression dans ses échanges bilatéraux.
Trente ans après son indépendance et 10 après son entrée dans l’Union européenne, la Croatie vient d’intégrer simultanément l’espace Schengen et la zone euro. Une victoire pour ce pays de 4 millions d’habitants où la guerre, qui a sévi au début des années 1990, avait provoqué des destructions estimées à 160 % du PIB. Aujourd’hui son PIB par habitant est supérieur à celui de la Grèce.
L’adoption de la monnaie unique devrait servir le secteur touristique qui représente quelque 20 % du PIB et attire des milliers de touristes dont les deux tiers viennent de pays membres de la zone euro. Elle devrait également stimuler les investissements directs étrangers (IDE) en supprimant le risque de change.
Neuvième investisseur étranger, la France est très présente dans les PPP
Bien que la France représente une part modeste du stock d’IDE (3 % fin 2021), sa présence se matérialise par le biais de filiales indirectes de grandes entreprises tricolores : Lactalis (depuis la Belgique), Atos (via les Pays-Bas) ou encore Renault (Slovénie).
Au total, une soixantaine de filiales sont implantées, employant environ 5000 personnes. Parmi les plus importantes on peut citer Pearl Groupe, Akuo, AGS, Legrand, L’Oréal, Saint-Gobain, Schneider, Servier, Suez ou encore Décathlon qui a ouvert son neuvième magasin en 2020 et remporte un franc succès auprès des consommateurs locaux.
Surtout, la France s’est engagée dans des partenariats public-privé (PPP) emblématiques dans les infrastructures qui lui confèrent une large visibilité comme la concession autoroutière de 140 kilomètres au cœur de l’Istrie dont l’actionnaire de référence est Bouygues. Cet investissement, qui dépasse aujourd’hui le milliard d’euros, fut en 1998 le premier PPP réalisé en Croatie. En 2013, le consortium ADP-Bouygues a remporté la construction et la gestion d’un nouveau terminal à l’aéroport de Zagreb.
Des échanges commerciaux modestes
Hormis la vente de 12 Rafale pour 999 millions d’euros en 2021, les flux bilatéraux, en hausse depuis 4 ans, demeurent faibles même si les exportations françaises ont atteint un record en 2021 enregistrant une augmentation de 19,4 % à 643 millions d’euros.
La part de marché de la France, qui représentait 5,5 % des importations croates en 2000, est progressivement tombée à 2,3 % en 2015 et est remontée à 2,8 % en 2020. En 2021, les biens français n’ont pas bénéficié de l’augmentation des importations croates, ce qui explique cette baisse de part de marché.
Les principaux postes d’exportation sont les produits chimiques et cosmétiques (20 %), suivis des équipements mécaniques, électriques, électroniques et informatiques (18 %) : ces produits ont enregistrés les augmentations les plus significatives, avec respectivement +18 % et +29 % entre 2020 et 2021.
La Croatie est le cinquième client de la France dans la région
A l’inverse, le secteur des matériels de transport qui représentait 31 % des exportations tricolores en 2019 et dont la croissance a triplé entre 2015 et 2019, est relayé à la troisième place avec une part de 17,7 % des exportations. Les bateaux de plaisance et les automobiles destinés à la location, liés à l’activité touristique, accusent une baisse de – 23% en 2020 et 2021, mais devraient retrouver leur niveau d’avant crise en2022.
Au total, la France est le 10e fournisseur et le 8e client de la Croatie. A l’échelle de l’Europe de l’Est et du Sud, la Croatie se classe cinquième, derrière la Roumanie, la Slovénie, la Bulgarie et la Serbie. La marge de progression est donc importante et l’adoption de la monnaie unique devrait stimuler aussi biens les échanges commerciaux que les investissements directs.
Sophie Creusillet