2012 aura été une belle année
pour le vin français, dont les exportations ont gagné 8,8 % à 7,84 milliards
d’euros. Aux États-Unis, le premier marché de consommation au monde avec une
prévision de 366 millions de caisses en 2013, les produits de l’Hexagone ont
effectué un bond de 17,37 % en un an, franchissant ainsi pour la première fois
en 2012 la barre de 1 milliard d’euros.
D’après les chiffres fournis par
la base de données GTA/GTIS au Moci, seul, parmi les 20 premiers clients de la France, le Japon a
enregistré une hausse supérieure des exportations tricolores (+ 25,69 %). Avec
cette bonne performance, les États-Unis renforcent leur place de deuxième
débouché extérieur de l’Hexagone, loin devant l’Allemagne (711 millions d’euros
d’exportations françaises) et derrière le Royaume-Uni (1,35 milliard).
13,99 dollars la bouteille est le bon prix
D’après l’agence publique
Ubifrance, la bonne performance de la France outre-Atlantique s’explique
d’abord par sa présence sur le segment des bouteilles vendues dans une
fourchette de 10 à 15 dollars. Or, tenant compte de l’inflation et de la
reprise économique, les détaillants n’ont pas hésité à augmenter leurs prix.
Les vins à moins de 20 dollars sont donc très recherchés.
Dans la pratique, une bouteille
départ cave à 5 dollars en France doit arriver sur les étagères de la
distribution aux États-Unis à 13,99 dollars, compte tenu des marges prises par
les importateurs (25 à 30 % en moyenne), puis les distributeurs (idem) et enfin
les détaillants (35 à 50 %).
« Souvent les vins français
sont perçus comme chers, ce qui n’est pas forcément la vérité. Les produits
locaux, de Californie et surtout d’Oregon, sont plus coûteux », assure
Aude Guivarch, chef de pôle Équipements et produits alimentaires pour
l’Amérique du Nord chez Ubifrance. Pour autant, lors d’une journée
Agroalimentaire à Ubifrance, le 11 février, elle notait « un regain
d’intérêt pour les vins à plus de 20 dollars chez les cavistes ».
Viser la nouvelle catégorie des « Millénnials »
Plus encore, bien que le prix soit le premier critère
d’achat outre-Atlantique, Aude Guivarch faisait état d’une nouvelle catégorie
d’acheteurs « en quête de découverte », les « Millennials »,
c’est-à-dire les Américains nés entre 1978 et 1995 et disposant d’un bon pouvoir
d’achat, prêts à acquérir des bouteilles de 30 dollars. Selon elle, ces
nouveaux consommateurs, peu intéressés par les marques, sont attirés par de
petites productions, des vins biologiques ou issus de la culture biodynamique.
En outre, ils utilisent les médias sociaux pour partager leurs avis et délivrer
leurs conseils.
Le deuxième critère d’achat est
la couleur, qui devance la variété/le cépage et l’étiquette. Vins rouges légers
et peu alcoolisés et rosés clairs type « Provence » ont la cote, tout
comme les vins blancs frais et secs. Des tendances plutôt favorables aux vins
de Loire et du Sud-ouest, aussi appréciés que le bordeaux et le bourgogne.
A condition de gommer quelques
faiblesses, la France peut encore faire mieux aux États-Unis. Le comportement
du Français est parfois jugé arrogant. « Son approche commerciale n’est
pas toujours pragmatique, ce qui laisse penser à de l’arrogance, alors qu’il ne
l’est pas plus que l’Espagnol ou l’Italien », juge Aude Guivarch. Deuxième
handicap constaté, des étiquettes peu lisibles. « Le visuel est très
important pour les Américains qui ne retiennent pas le nom du vin. Il ne faut
pas forcément un visuel très accrocheur mais qui soit facile à reconnaître et
plutôt le même sur toutes les bouteilles », précise la responsable
d’Ubifrance.
Avec la contre-étiquette, expliquer le vin et raconter une histoire
La contre-étiquette à elle aussi
son importance pour deux raisons : d’abord, expliquer le vin. Si la
tendance est favorable aux vins d’assemblage, les consommateurs
outre-Atlantique demeurent, néanmoins, habitués aux mono-cépages, qui sont plus
faciles à boire et à comprendre. Ensuite, raconter une histoire. Le monde des
vins dans l’Hexagone est composé de PME familiales et les Américains sont très
friands de réussite.
Un troisième obstacle que doivent
maintenant franchir les sociétés françaises est leur trop forte concentration
géographique autour de New-York. « Pourquoi pas le Colorado, la Floride ou
le marché des croisiéristes ? Peu importe, l’important est de
cibler », affirme Aude Guivarch. Malgré la concurrence réelle des pays du
Nouveau Monde, comme le Chili et l’Argentine, de l’Italie et de l’Espagne, il y
a des marchés secondaires avec du potentiel dans l’Ohio, le Missouri, le Nevada
ou la Caroline du Nord.
François Pargny