Nouvelle tentative de Paris et Berlin pour accélérer l’adoption du texte sur la refonte des instruments de défense commercial de l’Union européenne (UE) : bloqué depuis 2013 au Conseil, le texte sur la défense commerciale était en effet à nouveau inscrit à l’agenda des ministres européens du Commerce, réunis vendredi dernier 13 mai à Bruxelles et dans une lettre commune, les Allemands et les Français ont à nouveau pressé leurs homologues d’accélérer l’adoption des mesures visant à muscler l’arsenal anti-dumping, volet inscrit dans le ‘paquet’.
Dans ce courrier adressés à leurs homologues en charge du Commerce, Matthias Fekl, secrétaire d’Etat français en charge du Commerce extérieur et Matthias Machnig, secrétaire d’Etat au ministère fédéral de l’Economie et de l’énergie, soulignent notamment que si la procédure anti-dumping prend entre 12 et 18 mois en Europe, elle se limite à deux mois aux Etats-Unis. Les deux pays plaident aussi pour une « modernisation équilibrée » de la règle dite du ‘droit moindre’, qui fixe le niveau des droits en appliquant le taux minimal strictement nécessaire pour rétablir des conditions de concurrence équitable.
14 Etats menés par la Grandes-Bretagne bloquent
Jusqu’ici un groupe de 14 Etats membres, menés par la Grande-Bretagne, s’est toujours opposé à cette révision qui augmenterait de facto le niveau des droits de douane imposés à certains pays tiers, en particulier à la Chine. « Résultat ? Dans le secteur de l’acier par exemple ils sont trois fois moins élevés en Europe qu’aux Etats-Unis », déplore-t-on au sein de la délégation française. Mais la crise de l’industrie sidérurgique européenne, particulièrement sévère au Royaume-Uni, pourrait influencer la position des Etats les plus récalcitrants.
« Plusieurs pays ont formulé des remarques positives sur nos propositions, notamment le plus critique d’entre eux, le Royaume-Uni », a commenté Matthias Machnig. La Belgique aurait également changé son fusil d’épaule pour désormais soutenir la refonte de l’arsenal de défense commercial de l’UE. « Il y a des progrès, peut-être pas sur la règle du droit moindre mais nous avançons », a souligné Lilianne Ploumen, la ministre néerlandaise du Commerce, dont le pays a toujours considéré qu’une annulation de la règle du ‘droit moindre’ risquerait de nuire à d’autres maillons de la chaîne de valeur et donc de se répercuter sur les prix payés par les consommateurs.
D’autres mesures du paquet semblent néanmoins plus consensuelles. Parmi celles-ci, figure l’extension de la procédure ‘ex-officio’ qui permet à la Commission de porter plainte de sa propre initiative, contre les pratiques de concurrence déloyale d’un Etat. « Ces recours sont particulièrement importants pour protéger les entreprises concernées de mesures de rétorsion dans un pays tiers », souligne la missive franco-allemande.
La perspective l’octroi à la Chine du statut d’économie de la Chine
Outre la crise de l’acier en Europe, une seconde échéance pourrait favoriser le déblocage de ce texte sur les instruments de défense commercial. Le 11 décembre prochain, la Chine espère obtenir le statut d’économie de marché, comme prévu lors de son accession à l’OMC en 2001. « Dans ce cas de figure l’UE a tout intérêt à disposer préalablement d’un arsenal de défense commercial efficace », insiste le représentant d’une grande entreprise française à Bruxelles qui déplore « la difficulté à mobiliser la Commission européenne sur des problèmes de dumping alors que les Etats-Unis l’ont fait ».
Faisant écho à certains eurodéputés – qui, comme Daniel Caspary (PPE, Allemagne), jugent que le statut d’économie de marché n’est qu’un symbole – il estime que la priorité est désormais de disposer d’instruments modernisés pour contrer le dumping chinois sans menacer les entreprises européennes implantées dans le pays. Même plaidoyer du côté d’Airbus dont 25 % des commandes sont réalisés avec la Chine. « Il faut trouver une solution équilibrée », insiste Nathalie Errard, à la tête de la division Europe au sein du groupe aéronautique européen.
La position de la Commission sur la reconnaissance, ou non, de la Chine comme économie de marché, est attendu au mois de juillet prochain. Trois options sont sur la table : ne rien faire; octroyer à la Chine cette reconnaissance ; ou lui accorder le statut mais assorti de mesures modératrices.