La Chine et l’Union européenne (UE) s’affrontent désormais sur le lait et le fromage. Après le porc et le cognac, Pékin impose des droits de douane supplémentaires provisoires sur les produits laitiers européens, un nouveau coup dur pour les exportateurs français.
Le Ministère du Commerce chinois a annoncé le 22 décembre la mise en place de droits de douane temporaires sur les produits laitiers européens dès le 23 décembre. Ils concernent notamment les fromages frais et transformés, ainsi que les laits et les crèmes.
Si le taux des droits définitifs devraient être connus le 21 février 2026, ils s’échelonnent pour le moment de 21,9 % à 42,7 %. Ils s’ajouteront aux droits existants. Depuis août 2024, les produits laitiers de l’UE faisaient l’objet d’une enquête antisubvention en rétorsion aux droits européens sur les véhicules électriques chinois.
Pour la filière française, cette décision constitue un véritable « coup de massue », selon François-Xavier Huard, P-dg de la Fédération nationale de l’industrie Laitière. La France a exporté 370 millions d’euros de crème, lait et fromages vers la Chine en 2024 et 245 millions d’euros sur les 9 premiers mois de 2025 d’après les douanes. Une somme qui représente près de la moitié des 100 000 t de crèmes européennes et 6 000 t de fromages françaises sur 34 000 t de fromages européens.
Les grands groupes comme Savencia, Lactalis, Danone et Bel sont directement impactés, la crème déjà taxée à 15 % étant particulièrement concernée.
Pékin justifie ces mesures par des subventions européennes jugées déloyales, tandis que l’UE conteste fermement ces allégations. « Notre analyse est que cette enquête est basée sur des allégations contestables et des preuves insuffisantes, et que les mesures sont, par conséquent, injustifiées et infondées », a déclaré Olof Gill, porte-parole de la Commission européenne.
De son côté, Nicolas Forissier, ministre délégué français chargé du Commerce extérieur et de l’attractivité de la France, a également critiqué cette décision : « Nous n’acceptons pas cette décision unilatérale et sans fondement. »
Des exportateurs européens dans l’attente de négociations
Ces droits s’inscrivent dans un contexte plus large de tensions commerciales entre la Chine et l’UE, qui se sont déjà affrontées sur le porc, le cognac ou les véhicules électriques. La semaine dernière, Pékin avait imposé des droits antidumping sur le porc européen allant de 4,9 % à 19,8 %, une baisse par rapport aux droits provisoires allant jusqu’à 62,4 % imposés depuis septembre.
Pour la filière laitière française, les conséquences pourraient être lourdes. « Si ces montants devaient perdurer, une grande partie des exportations de crème et de fromages vers la Chine vont être menacées. Derrière, des producteurs et des territoires, notamment la Normandie, seront directement touchés », avertit François-Xavier Huard.
La Fédération nationale des producteurs de lait (FNPL) parle également d’une perte de marché possible, même si elle estime que la rémunération des éleveurs ne devrait pas baisser à court terme. En effet, cette année, la collecte de lait a progressé de 1 % sur les dix premiers mois, pour dépasser les 23 milliards de litres attendus.
Bruxelles espère pouvoir réduire ces droits définitifs via une phase de dialogue et de contre-argumentaire avec Pékin, comme cela avait été le cas pour le porc ou le cognac.
Kétana Men
