Dédié au partenariat avec les pays de la péninsule indochinoise dans le textile, l’habillement, le cuir et les chaussures, l’association professionnelle Evalliance tisse patiemment sa toile dans cette zone géographique. Fondée fin 2014 à Paris, l’association de droit français a présenté une étude « sur les besoins en qualification et la formation professionnelle de l’industrie cambodgienne de l’habillement », le 22 avril à Phnom Penh, et proposé la création d’un institut de la mode, le Fashion Institute of Cambodia, lequel pourrait voir le jour d’ici trois à quatre mois.
Selon le président d’Evalliance, Jean-François Limantour, les organisations professionnelles et le gouvernement cambodgiens ont déjà entériné le projet, au point que « les premiers murs sont déjà construits à Phnom Penh », délivre l’expert français à la Lettre confidentielle. « Le directeur de la structure est en cours de recrutement, précise-t-il. Il s’agira d’un professionnel polyglotte familier de l’international, ayant travaillé à l’étranger », précise-t-il.
Un institut pour la formation, mais aussi la veille et l’intégration technique
Il y a deux ans, Evalliance avait conclu un protocole d’accord avec le ministère du Commerce et la Fédération des usines de confection textile du Cambodge (GMAC), puis noué un partenariat avec Eurocham, qui regroupe l’ensemble des chambres de commerce européennes dans ce pays, dont la Chambre de commerce franco-cambodgienne (CCFC). « Pour les autorités cambodgiennes, notre projet correspond parfaitement à leur stratégie de création de valeur ajoutée et d’emploi et d’amélioration de l’image de marque du pays sur la scène internationale », confie encore à la LC Jean-François Limantour.
Le Fashion Institute of Cambodia ne sera pas seulement réservé à la formation professionnelle. Il s’agira aussi de stimuler la veille économique, de développer et d’intégrer les nouvelles techniques et technologies dans la chaîne de production de façon à faire naître de nouvelles compétences dans la filature, le tissage, l’impression, d’améliorer la rentabilité et d’accélérer les exportations.
Le projet semble aussi intéresser les bailleurs de fonds et les institutions internationales, comme le Bureau international du travail (BIT), qui a lancé, il y a quelques années, Better Work Factories, un programme visant à inciter les entreprises à respecter les normes sociales et environnementales, le droit syndical, les standards de sécurité ou encore à lutter contre le travail des enfants. L’Agence française de développement (AFD) a, pour sa part, financé l’étude réalisée par Evalliance. L’association pense que l’AFD et d’autres bailleurs, comme l’Union européenne (UE), soutiendront l’institut de la mode de Phnom Penh. « Ce serait très important politiquement, car le Cambodge n’est pas encore totalement stabilisé », estime Jean-François Limantour.
Des opportunités d’affaires pour les organismes et sociétés françaises
Côté français, on regarde avec attention cette initiative devant intéresser les écoles et les organismes français de formation, comme l’Institut français de la mode, l’école de la mode Esmod ou l’École supérieure des industries du vêtement (ESIV), établissement de la CCI Paris Ile-de-France formant des cadres dans les domaines technique et managérial, laquelle pourrait recevoir des Cambodgiens et envoyer en retour sur place ses élèves dans des entreprises. « En toile de fond, insiste Jean-François Limantour, c’est la possibilité pour la profession au Cambodge d’accroître sa compétitivité globale et de muter de la sous-traitance vers plus de valeur ajoutée, ce qui doit attirer certains de nos entreprises, comme Lectra, capables d’apporter des solutions techniques ou des sociétés spécialisées dans le fil et le tissu ». Dans ces domaines, le Cambodge est dépourvu et « il est prêt à accueillir des investisseurs étrangers », ajoute-t-il encore.
Depuis plusieurs années, les livraisons de vêtements du Cambodge dans l’UE ont gagné 30 à 40 % par an. En 2015, elles ont progressé de 32 % et, avec un montant de 2,954 milliards d’euros, le Cambodge, qui bénéficie du programme européen « Tout sauf les armes » (élimination des quotas et droits de douane quelque soit l’origine des tissus), est passé de 8e à 5e fournisseur de l’UE, juste devant le Vietnam (2,8 milliards d’euros d’exportations).
Les projets au Vietnam et en Birmanie
Pour autant, si le Vietnam ne bénéficie pas, pour sa part, de ce régime préférentiel, Evalliance entend aussi y développer les relations des entreprises françaises. C’est ainsi que l’association parisienne sera partenaire du Forum d’affaires France Cambodge, prévu du 26 au 28 octobre à Hô-Chi-Minh-Ville, organisé avec l’aide de l’association Futurallia par la Fondation Prospective et innovation, présidée par l’ancien Premier Jean-Pierre Raffarin. Une fondation dirigée par Serge Degallaix, ancien ambassadeur membre du Conseil d’administration d’Evalliance.
En Birmanie, l’association dévolue à la péninsule indochinoise entend aussi pousser ses feux, avec une initiative similaire à celle du Cambodge « pour accroître la compétitivité des entreprises locales et tirer la filière vers le haut », indique Jean-François Limantour. Le projet est, certes, moins avancé, mais une coopération est engagée avec la fédération birmane de textile-habillement, un protocole d’entente est aussi conclu avec le gouvernement de ce pays et un accord de partenariat est également signé avec la CCI France Myanmar.
François Pargny
Pour prolonger :
– Textile-habillement : Evalliance, déçue du Vietnam, mise sur ses partenariats au Cambodge
– Guide business Vietnam 2015/Guide business Koweït 2015
– UE-Birmanie : première session de pourparlers pour un accord d’investissement