David Cameron a repris, la semaine passée, son bâton de pèlerin. Objectif ? Convaincre ses homologues européens que le projet d’accord sur la table – présenté le 2 février par le président du Conseil de l’Union européenne (UE), Donald Tusk*– est un compromis équilibré. S’il était adopté sans modifications majeures, lors du sommet des 18 et 19 février à Bruxelles, le Premier ministre britannique a confirmé qu’il ferait campagne pour le « oui » lors du référendum, prévu le 23 juin prochain.
Et pour débuter sa deuxième tournée européenne, David Cameron s’est naturellement rendu en Pologne, le 5 février, pour la deuxième fois en à peine un mois. Parmi les quatre principales exigences britanniques, la plus controversée vise en effet à priver les ressortissants issus de l’UE des versements sociaux les quatre premières années de leur installation au Royaume-Uni. Or ce sont les Polonais – dont le nombre est estimé à 700 000 sur le territoire britannique – qui sont les principaux bénéficiaires des ces allocations.
Varsovie négocie des contreparties
Pour le gouvernement conservateur à Varsovie, son soutien aux demandes de Londres ne se fera donc pas sans contreparties. « Nous avons obtenu le maintien des droits sociaux pour les Polonais déjà installés dans le pays », s’est félicité Jaroslaw Kaczynski, le président du parti au pouvoir Droit et Justice (PiS) à l’issue d’un entretien avec David Cameron.
Autre requête, non officielle celle-là : obtenir l’appui de Londres, au sein de l’Otan, afin de renforcer la sécurité à l’est de l’Alliance, notamment en installant une base permanente sur le territoire polonais. Alors qu’un grand nombre des membres de l’Otan, en particulier les États-Unis, y sont opposés, Varsovie cherche de nouveaux alliés. Mais pas question néanmoins de reconnaître publiquement l’octroi de concessions à Londres en échange de ce soutien. « Nous voulons un partenariat stratégique complet tant au sein de l’UE qu’au sein de l’Otan », a simplement déclaré le Premier ministre britannique lors d’une conférence de presse.
Mais à ce stade, rien n’est encore gagné pour David Cameron. A l’issue d’une visite à Budapest lundi 8 février, Beata Szydlo, le Premier ministre polonais, s’est entretenue avec son homologue hongrois, Viktor Orban. « Nous avons discuté des changements proposés par la Grande-Bretagne et nous soutenons la majeure partie des propositions sur la table. Certains points, néanmoins, exigent d’être clarifiés », ont indiqué les deux leaders dans une déclaration conjointe.
Les pays du groupe de Visegrad cherchent une position commune
Le 15 février, une réunion du groupe dit de Visegrad – comprenant la Pologne, la Hongrie, la République tchèque et la Slovaquie – a été programmée pour finaliser une position commune à quelques jours du sommet européen. Selon des diplomates à Bruxelles, les quatre pays voudraient s’assurer que le nouveau mécanisme de frein d’urgence – compromis proposé par Donald Tusk dans les cas où les services sociaux d’un État membre seraient débordés ou victimes d’abus répétés – ne puisse pas s’appliquer dans tous les pays de l’UE. « Ils craignent de voir d’autres pays emboîter le pas à la Grande-Bretagne, ce qui risquerait de léser nombre de leurs ressortissants installés ailleurs en Europe », explique un membre du Conseil de l’UE.
Cette exigence sera néanmoins difficile à faire accepter, car Donald Tusk l’a bien rappelé la semaine passée : « Il n’y aura pas de passe droit » pour la Grande-Bretagne. Pour éviter la non discrimination des ressortissants européens, – fondement même de la construction européenne – le mécanisme de sauvegarde doit pouvoir être activé par l’ensemble des États membres.
La prochaine semaine sera donc décisive pour boucler un compromis visant à limiter les risques d’un « Brexit ». Parallèlement à l’offensive diplomatique menée par David Cameron, les représentants des États membres ont déjà tenu une réunion sur le sujet la 5 février à Bruxelles. « Nous sommes parvenus à clarifier plusieurs détails et à finaliser la formulation de certaines exigences », confiait l’un d’entre eux à la Lettre confidentielle. S’il juge la rencontre « constructive », il souligne « qu’aucun État membre n’est complètement satisfait », mettant en doute la possibilité d’un accord à l’issue du sommet européen des 18 et 19 février.
Kattalin Landaburu, à Bruxelles