« L’Europe ne mettra pas en
péril l’exception culturelle par une négociation commerciale », avait déclaré
Karel De Gucht la semaine passée, à l’issue d’une rencontre informelle des ministres
européens du Commerce à Dublin. Un tournant dans son discours, qui pourrait bien être le fruit des pressions répétées de certains États, la France en tête, qui en a fait un motif de véto. Lors de cette réunion informelle, Nicole Bricq avait ainsi rappelé à ses homologues les réserves de la France concernant le projet de
mandat de la Commission sous sa forme actuelle. « La France est
particulièrement attachée au maintien de l’exception culturelle », avait alors
indiqué la ministre française.
Si le Commissaire au Commerce espère maintenir
un agenda ambitieux – l’ouverture officielle des négociations avec Washington
en juillet – il ne peut pas « prendre Paris à rebrousse poil »,
commente-t-on dans son entourage. D’où la publication, le 22 avril, d’un communiqué – en
français – où il rappelle que : « Les États membres qui le souhaitent
resteront libres de maintenir les mesures existantes, et la France en
particulier restera parfaitement libre de maintenir ses mécanismes de
subvention et de quotas ».
Mais la manœuvre n’a pas convaincu la Société des auteurs compositeurs dramatiques (SACD). Dans
un communiqué, l’organisation française se dit « choquée par cette attitude et ce
cynisme du commissaire européen. La seule garantie que l’Europe
pourrait apporter à la protection et à la promotion de la diversité culturelle
serait d’exclure expressément l’audiovisuel et le cinéma du mandat de
négociation européen ». Dans une pétition déjà signée par 80 cinéastes
européens, tels que Pedro Almodovar, Ken Loach, Michael Haneke, Michel
Hazanavicius ou même l’américain David Lynch, la SACD réclame un mandat de
négociation respectueux de l’exception culturelle faute de quoi ils
n’hésiteront pas « à amplifier le mouvement », afin que l’exception
culturelle ne « devienne jamais une monnaie d’échange ».
Une position que relaie Nicole Bricq, qui était à Washington cette semaine (22-23 avril) pour expliquer la position française sur le partenariat transatlantique. Elle réclame l’exclusion pure et simple de l’audiovisuel de ces négociations (1).
Kattalin Landaburu, à Bruxelles
(1) Voir dans la Lettre confidentielle cette semaine la rubrique « Ils ont dit »