Le Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales (Gifas) a présenté le 27 avril les résultats économiques de l’aéronautique et ses perspectives pour la filière en 2023. Bien que les problèmes d’approvisionnement jouent les prolongations en raison de la guerre en Ukraine, les commandes affluent et la demande internationale est solide.
Après quatre années d’une crise sans précédent pour le secteur, les entreprises de l’aéronautique commencent à souffler. Premier contributeur positif au commerce extérieur français, avec un excédent de 23 milliards d’euros (Md EUR) en 2022 (après 31 Md EUR en 2019 et 16 Md EUR en 2020), le secteur a enregistré un chiffre d’affaires de 62,7 Md EUR, en hausse de 13,6 % par rapport à 2021. Les exportations ont progressé de 12 % pour atteindre 40,9 Md EUR.
L’année 2023 s’annonce également sous de bons auspices, les commandes ayant bondi l’an dernier de 32,8 % à 65,8 Md EUR, dont 75 % à l’export. En outre, l’aviation civile bénéficie du dynamisme du trafic de passagers. Avec des vols en hausse de 6,6 % dans le monde, il a rejoint en 2022 son niveau de 2019.
Ce chiffre masque cependant de fortes disparités géographiques, souligne le Gifas. A fin avril, en Europe, le nombre de vols a chuté de 6,5 % quand il a augmenté de 7 % pour les vols domestiques en Inde. Le nombre de passagers a légèrement augmenté aux États-Unis (+ 0,3 %) et littéralement explosé en Chine avec la fin de la politique Zéro Covid (+ 197 %).
Dans la défense,
des commandes à l’export en hausse de 140 %
L’aviation civile a réalisé un chiffre d’affaires de 43,5 Md EUR (+ 22,8 %) dont 31,6 Md EUR à l’export (+ 20,7 %). Les commandes ont représenté 26,3 Md EUR, dont 21,6 % à l’international (+ 28,2 %). Pour Guillaume Faury, président du Gifas et p-dg d’Airbus, « en 2023, les enjeux porteront sur la capacité des entreprises à monter en cadence malgré une supply chain toujours perturbée, sur les défis de la décarbonation et des efforts de recherche et technologie d’une ampleur inédite pour les relever ».
Avec un chiffre d’affaires de 19,2 Md EUR, les activités de défense ont reculé de 1,7 % y compris à l’export (- 10 % à 9,3 Md EUR). Avec des carnets de commandes qui se sont bien regarnis en 2022 (39,6 Md EUR, + 44 %), « elles contribuent fortement au rattrapage du secteur », constate néanmoins le président du Gifas.
Alors que les commandes françaises ont dévissé de 26 %, celles à l’international se sont en effet envolées de 140 % à 27,8 Md EUR. Une performance dopée par les commandes de Rafale, signées début 2022 par l’Indonésie et la Grèce, et le succès des hélicoptères avec 374 commandes brutes en 2022 (H125 en Amérique du Nord, H145 en Suisse et à Chypre…).
Tensions sur la supply chain et les recrutements
Avec le retour en Europe de combats de haute intensité, la nécessité de rendre les chaînes d’approvisionnement, ou supply chains, moins dépendantes aux chocs extérieurs devient un impératif. En ce sens, la loi de programmation militaire 2024-2030, qui prévoit 413 Md EUR de dépenses sur 7 ans afin de transformer en profondeur les armées, marque un important effort budgétaire.
Les entreprises du Gifas en appellent par ailleurs à une augmentation des financements de la base industrielle et technologique de défense (BITD) pour garantir la souveraineté du secteur.
Les tensions sur la chaîne d’approvisionnement continuent également de perturber la production dans l’aviation civile, mais selon Didier Kayat, directeur général de Daher et président du groupe « équipements » du Gifas, se montre optimiste. « Nous sommes passés très près du gouffre depuis le début de la crise sanitaire, mais nous avons la chance d’avoir une filière très structurée, estime le dirigeant. Grâce à la task force et au fond de soutien que nous avons mis en place, nous n’avons eu à déplorer aucune faillite. 2023 sera encore une année turbulente, compliquée pour la production, mais nous commençons à voir le bout du tunnel. »
Enfin, comme tant d’autres secteurs industriels, l’aéronautique devra composer avec des difficultés de recrutement. « Le secteur emploie 195 000 personnes en France, il en a embauché 18 000 en 2022 et 25 000 postes seront à pourvoir en 2025, explique Clémentine Gallet, présidente du comité Aéro-PME du Gifas et de la société Coriolis Composite. Le recrutement, c’est ce qui tend le plus la production en ce moment. Nous avons surtout besoin d’opérateurs et de techniciens : des ajusteurs, des chaudronniers ou encore des opérateurs de commande numérique. Nous comptons sur notre campagne L’Aéro Recrute et le village RH organisé sur le prochain salon du Bourget en juin pour attirer de nouveaux talents. »
Cet événement phare de l’aviation sera d’ailleurs gratuit pour les demandeurs d’emploi et les étudiants.
Sophie Creusillet
