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Depuis l’an 2000, le secteur de la téléphonie mobile a explosé au Sénégal, avec 68 % de pénétration en 2010. Or l’entrée de cette technologie modifie la société et le comportement de la population. En effet, selon une étude dirigée par Raul Katz, professeur à l’université de Colombia et spécialiste des télécommunications, « la diffusion accélérée des technologies entraîne des bouleversement socio-économiques», comme ce fut le cas lors du printemps arabe en Egypte avec l’utilisation des réseaux sociaux.
Outre l’aspect social, les télécommunications ont un impact économique direct fort. Au Sénégal, ce secteur contribue de 10 % au PIB national. « C’est énorme pour un pays en développement où la moyenne est généralement à 5 % », souligne le professeur, venu témoigner lors d’une conférence organisée par Orange à Paris. Avec trois opérateurs, 5000 cybercafés, 200 télécentres, le secteur représente 1,4 milliard de dollars et 3000 emplois. A tel point que les télécommunications croissent plus vite que l’économie : selon les chiffres officiels, en 2010 ils atteignent 12 % de croissance contre 4 % pour le PIB. Ce secteur est d’ailleurs le plus important dans le pays, suivi de la construction et des services financiers.
Les télécommunications ont aussi un impact économique indirect : la téléphonie mobile contribue à hauteur de 13,6 % à la croissance nationale. Ceci grâce aux équipements et infrastructures nécessaires au bon fonctionnement des technologies. Et au fait que le mobile vienne combler le manque de téléphonie fixe et que les consommateurs puissent accéder à de nouveaux services. Ainsi en 2016, la pénétration mobile devrait atteindre les 115 % selon les prévisions, et devrait participer de 13,7 % à la croissance sénégalaise. « Plus il y a de pénétration du mobile et d’internet, plus il y a de contribution au PIB », résume Raul Katz. En pratique, l’emploi a tendance à augmenter substantiellement lorsqu’une localité installe un réseau de couverture sans fil. Et pas seulement. Au Niger par exemple, les prix du marché de grain ont chuté de 4,5 %, tandis que les profits ont augmenté grâce à une meilleure organisation du marché.
Concernant le haut débit, la technologie est beaucoup moins présente actuellement (environ 0,75 % de pénétration), car elle est trop coûteuse et représente peu d’intérêt pour les consommateurs. Néanmoins, son potentiel est considérable. Comme pour la téléphonie mobile, le haut débit a trois effets. Il permet d’améliorer la productivité du pays (efficacité) ; l’innovation : toute la population peut accéder à de nouveaux produits (e-commerce, cours en ligne…) et permet une recomposition de la chaîne de valeur (attractivité du pays en terme d’emplois et de services, sourcing…). D’ici 2016, le pays espère dépasser les 200 000 souscripteurs de lignes ADSL et le développement du réseau haut débit mobile devrait atteindre les 95 %.
Or pour que cela puisse se concrétiser, l’implication politique est indispensable et doit maximiser le développement des télécommunications, insiste le professeur Katz. Les initiatives politiques sont un levier considérable pour mettre en valeur l’innovation et la production du secteur. Et contribuent à faire régresser l’exclusion sociale et la pauvreté, en créant de la valeur et de la richesse nationale. « Les politiques publiques ont une influence claire dans la maximisation de l’impact économique des TIC ». En comparaison, les pays avec le plus haut degré de performance des TIC présentent un ensemble commun de caractéristiques politiques : plan national pour promouvoir l’industrie des TIC, pas de restriction aux capitaux étrangers, compétition dans tous les segments des télécommunications… « Un gouvernement doit s’impliquer et être proactif pour améliorer la performance du secteur ». Comme c’est le cas en Corée du Sud, au Japon : grâce aux plans nationaux, ces pays sont devenus des leaders en la matière.
Le Sénégal doit s’inspirer de ces modèles car il a la possibilité « de jouer un rôle régional important du point de vue des infrastructures», soutient Raul Katz. D’autant plus que ce pays a un capital humain plus avancé que ses voisins (Afrique du Sud par exemple) et donc un grand potentiel à exploiter.
Alix Cauchoix
Pour en savoir plus :
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