Le Brésil n’a pas été épargné par la crise financière. Mais il résiste grâce à la solidité retrouvée de ses fondamentaux et de sa politique économique et financière. De nombreux secteurs sont porteurs pour la « french touch », alors que la perspective de l’Année de la France au Brésil en 2009 ouvre des opportunités supplémentaires pour les PME.
Après une hausse supérieure à 5 % cette année, la progression du PIB du Brésil serait de l’ordre de 3 % en 2009, une performance dans le contexte actuel de crise financière. La détérioration observée des indicateurs est moindre que dans d’autres pays de la région. Ce phénomène est la conséquence de la spécificité du Brésil. « Les fondamentaux de l’économie sont bons, le système bancaire est solide et la qualité de la politique économique continue à inspirer confiance », explique Hervé Le Roy, chef des services économiques français au Brésil.
Pour autant, le pays n’a pas été épargné. La Bourse de São Paulo a baissé de 22,5 % depuis le début de l’année 2008. Le real a perdu un quart de sa valeur par rapport au dollar depuis le 1er septembre et la prime de risque pays sur les titres de la dette extérieure a doublé en l’espace de quelques semaines. Comme d’autres banques centrales de la planète, celle du Brésil a injecté des liquidités dans le système bancaire, via un allégement des réserves obligatoires. Les experts estiment que l’économie brésilienne va continuer à souffrir du contrecoup de la crise. L’impact sur les exportations n’est pas encore visible, mais un alourdissement du déficit de la balance des paiements courants en 2009 semble d’ores et déjà acquis. Un net ralentissement de la croissance est aussi prévisible.
Mais la liste des atouts du pays est impressionnante : une inflation de l’ordre de 6 % en rythme annuel, un déficit public équivalent à 0,6 % du PIB pendant les huit premiers mois de 2008, une dette extérieure de l’État pratiquement inexistante (3,6 % du PIB) et des réserves internationales qui dépassent 200 milliards de dollars.
La situation des banques demeure l’un des points forts du Brésil. Si quelques petits établissements risquent de connaître des difficultés, les grandes entités ont tiré les leçons des crises du passé et sont solides. Une crise systémique est aujourd’hui exclue. « Il y a vingt ans, le contrecoup de la crise internationale aurait été immédiat. Grâce aux transformations opérées, l’économie brésilienne dispose maintenant d’une capacité de résistance », souligne un économiste brésilien.
Le grand tournant a été réalisé au début des années 1990 avec la volonté du Brésil de s’engager résolument dans la mondialisation et de tourner le dos au protectionnisme, tout en attaquant vigoureusement le problème social. Dans le contexte actuel de crise, les autorités ont décidé de maintenir le cap et c’est ce qui rassure le secteur privé. Le ministre des Finances, Guido Mantega, a refusé de relever les droits de douane du Mercosur, comme le lui demandait le gouvernement argentin. « Grâce à ses fondamentaux solides, le Brésil devrait connaître un développement durable. Sur le long terme, nous maintenons notre confiance dans l’avenir du pays », explique Michel Durand Mura, président de la Chambre de commerce France-Brésil (CCFB) qui compte 850 adhérents dont la quasi-totalité des filiales brésiliennes d’entreprises françaises.
La dynamique de développement de nombreux secteurs devrait se poursuivre. La découverte d’abondants gisements de pétrole en mer, dans la baie de Santos, devrait permettre au pays de devenir un important exportateur de pétrole pendant la prochaine décennie. Le nouveau contexte financier ne remettra pas en cause les investissements de mise en valeur de ces champs, même si Petrobras pourrait revoir à la baisse certains objectifs ambitieux. Les compagnies internationales portent une attention particulière aux gisements, dont les appels d’offres ont été pour l’instant suspendus dans l’attente de la révision du cadre juridique des investissements pétroliers. Des perspectives de développement à grande échelle du tissu des fournisseurs pointent à l’horizon.
Le secteur agricole demeure l’un des moteurs de l’économie. La Conab, un organisme qui dépend du ministère de l’Agriculture, table sur une récolte record de grains comprise entre 142 et 144,5 millions de tonnes en 2009. La consommation des ménages est l’autre grand moteur : elle progresse actuellement de plus de 6 % par an en volume. Un taux de progression deux fois moindre en 2009 constituerait encore un puissant amortisseur de la crise.
Le moment est donc propice pour les entreprises tricolores, qui disposent déjà de solides références au Brésil. Mais la France peut mieux faire et, surtout, les transformations en cours ouvrent des possibilités de nouveaux débouchés comme, par exemple, la décoration de la maison, le design, la mode, le nautisme ou la construction navale. De belles perspectives en vue pour la « French touch » !
Le contexte politique est des plus favorables. Les relations entre les deux pays sont au beau fixe, comme l’a montré la rencontre entre Nicolas Sarkozy et le président Luiz Inácio « Lula » da Silva en début d’année, en Guyane. Le président français reviendra au Brésil le 22 décembre prochain et signera un partenariat stratégique France-Brésil qui se veut « ambitieux et pratique » selon une source proche du dossier. Et, en 2009, se tiendra l’Année de la France au Brésil avec un volet économique copieux. Un important forum bilatéral des affaires ciblé sur les PME, qui aura lieu les 10 et 11 novembre prochain à São Paulo, fera office d’« ouverture ». Ce forum s’annonce d’ores et déjà comme un gros succès en termes de participation
Daniel Solano