Le Moci l’avait observé il y a quelques mois, les députés français de la majorité (La République en marche-LaREM + le Modem) veulent avoir leur mot à dire sur les questions de commerce extérieur et de traités de libre-échange et influer sur les positions portées par le gouvernement français à Bruxelles sur ces sujets.
Se positionnant en sentinelles de la préservation de la transparence des négociations et des standards européens les plus élevés dans les domaines sociétaux et environnementaux, ils viennent une nouvelle fois d’en donner la preuve en adoptant en séance, le 18 février, à une large majorité, une proposition de résolution de Jacques Maire, vice-président de la Commission des affaires étrangères et chef de file des travaux relatifs aux traités commerciaux, qui appelle le gouvernement à donner à l’Assemblée nationale un rôle accru en amont et en aval des négociations commerciales entre l’Union européenne (UE) et les pays ou blocs tiers.
Intitulée « Proposition de résolution sur l’agenda commercial européen et l’Accord de partenariat économique entre l’Union européenne et le Japon »*, cette résolution s’inscrit dans la suite des travaux parlementaires sur le suivi du traité UE-Canada, le CETA (Comprehensive Economic and Trade Agreement ou en français AECG–Accord économique et commercial global).
Adoptée peu après l’entrée en vigueur de l’accord commercial avec le Japon, le JEFTA (Japan-EU Free Trade Agreement, en français Accord de partenariat économique- APE UE-Japon), elle formalise les demandes faites au gouvernement, initiées lors du CETA, de davantage informer et consulter les députés en amont des négociations commerciales, dès l’étape des discussions sur le contenu du mandat confié à la Commission européenne, mais aussi en aval, lors de la mise en œuvre des accords, avec notamment réalisation d’une étude d’impact au moment du vote des lois de ratification et un suivi trimestriel de la mise en application.
Respect de l’Accord de Paris sur le climat et défense de standards élevés
Ainsi, parmi les points saillants de la liste des 31 points contenus dans le texte de la résolution, figure la demande au gouvernement de faire adopter par l’Assemblée nationale une résolution faisant valoir sa position avant l’adoption de chaque mandat de négociation par l’UE (point n° 4).
Il souhaite aussi que « le respect des Accords de Paris sur le climat soit intégré aux clauses essentielles des accords en cours de négociation » (point n° 19), en ligne avec les engagements du président Macron lors de la 73ème assemblée générale de l’ONU (24 septembre-1er octobre 2018). Le texte réitère le souhait des députés que les accords commerciaux maintiennent les standards les plus élevés dans des domaines comme l’environnement, la santé, la protection des droits des consommateurs comme des droits sociaux, citant notamment le « veto climatique » (n° 22), le caractère contraignant du chapitre sur le développement durable (n° 20) ou la taxe carbone (n° 17).
Appel à la mobilisation des entreprises sur les opportunités
La résolution ne manque pas de saluer l’impact du CETA, jugé positif un an après son entrée en vigueur : progression des exportations française de 5,3 % entre janvier et juillet 2018 et pas de déstabilisation des « filières sensibles » comme celles de la viande.
Dans ce contexte, et compte tenu des opportunités potentielles générées par le JEFTA, elle appelle les entreprises françaises à se mobiliser pour bénéficier des opportunités des nouveaux accords commerciaux, notamment « en s’inscrivant au fichier Registered Exporter System » (n° 8) et demande aux organisations professionnelles et institutionnelles de promouvoir ces nouveaux accords « sur tout le territoire » (n° 9). Elle demande aussi à ce que le chapitre sur les PME intégré pour la première fois dans l’APE-Japon soit généralisé aux autres accords en cours de négociation (n° 7).
La résolution a été adoptée en présence du secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères Jean-Baptiste Lemoyne, ainsi que de l’ambassadeur Extraordinaire et Plénipotentiaire du Japon en France, Masato Kitera, un diplomate de haut rang qui a la particularité d’avoir fait l’Ena en France.
Bien que n’ayant pas force de Loi, une résolution parlementaire n’en est pas moins un acte politique important, d’autant plus s’il est porté par la majorité qui soutient le gouvernement en place. En l’occurrence, Jean-Baptiste Lemoyne a confirmé, au nom du gouvernement, « sa volonté d’accompagner les parlementaires », se réjouit un communiqué du mouvement LaREM twitté par Jacques Maire.
Christine Gilguy
*Le texte adopté le 18 février est dans le document Pdf attaché à cet article.