Selon les chiffres des Douanes françaises pour les dix premiers mois de 2007, il y a tout lieu d´être satisfait : les ventes de vins hors de l´Hexagone ont progressé de 9 % à 7,6 milliards d´euros. Une progression suffisante pour que le président de la Fédération des exportateurs de vins et spiritueux (Fevs), Philippe Castéjac, pronostique pour l´année entière un chiffre compris entre 9,2 et 9,5 milliards, supérieur donc au record d´il y a deux ans (8,74 milliards en 2006). Dans le détail, on s´aperçoit que les exportations ont diminué de 19,8 % en valeur aux Etats-Unis, qui restent néanmoins, le premier débouché extérieur de la France avec le Royaume-Uni (respectivement 1,8 milliard et 1,2 milliard d´euros d´exportations), loin devant l´Allemagne, la Belgique et le Japon.
Mettre sur le compte de l´euro la baisse des exportations françaises outre-Atlantique serait une erreur. En effet, de forts contingents de vins effervescents et de spiritueux sont maintenant expédiés en Belgique avant d´être acheminés de l´autre côté de l´Atlantique. Statistiquement, les volumes de champagne sur le marché américain venant directement de France ont ainsi baissé de 34 %. La baisse en valeur est encore supérieure : – 39 %. A l´inverse, selon les Douanes, les ventes de champagne en Belgique ont explosé de 143 % en volume.
« En définitive, nos livraisons, commerce direct et indirect inclus, progressent toujours aux Etats-Unis. Malgré l´euro fort, les produits chers, les cuvées de prestige, les rosés également, sont demandés. Et jusqu´à présent, les opérateurs américains ont accepté de partager la charge monétaire en rognant sur leurs marges, dépenses et investissements pour que les prix au détail ne s´envolent pas. Maintenant, à partir d´un taux de change de 1,5 dollar pour un euro, les prix devraient augmenter ». Comment réagiront les consommateurs ? Les professionnels peuvent, sans doute, encore limiter leurs marges, mais la Fevs, inquiète de l´appréciation de la monnaie européenne par rapport au dollar et au yen, craint aussi que des marchés soient perdus aux Etats-Unis et au Japon.
Le cas des vins tranquilles (hors effervescents) est un peu différent. Aux Etats-Unis, le bordeaux est habituellement le plus vendu. Mais en 2007 le bourgogne, en hausse de 30 % en valeur et 14 % en volume sur les dix premiers mois, pourrait le rattraper le bordeaux, qui, dans le même temps, a perdu 17 % en valeur et 4 % en volume. « Cette baisse du bordeaux s´explique du fait que le millésime 2004 est moins bien coté que le 2003 et que les prix ont alors diminué. Donc l´effet euro n´est pas perceptible. Cette année, c´est le 2005, un excellent millésime qui est proposé. Il suffit de recommandations élogieuses comme celles du critique Robert Parker pour qu´il s´achète bien, en dépit du cours de la monnaie européenne ».
La récente enquête du Moci sur « les PME face à l´euro fort » (n°1809 du 10 janvier) montre que la qualité et l´innovation peuvent être un argument suffisant pour justifier des prix supérieurs à la concurrence. De plus, souligne-t-on chez Ubifrance, « le reste de l´offre tricolore pourrait bénéficier de l´image d´excellence des grands crus ».