A rebours de l’OMC, l’institut d’analyse privé Oxford Economics parie sur une baisse des échanges mondiaux de marchandises cette année, la tendance n’étant compensée, au niveau global, que par la forte reprise des services. Plusieurs facteurs, dont le découplage entre l’Occident et la Chine, pèsent sur la tendance.
Pour Oxford Economics, 2023 devrait être marqué par un recul du commerce mondial de biens de 0,6 %. Une prévision beaucoup plus pessimiste que les dernières estimations de l’OMC, qui a au contraire revu à la hausse sa prévision 2023, tablant sur une hausse de 1,7 % du volumes des échanges mondiaux.
D’après l’Institut britannique, cette tendance baissière sur les marchandises devrait être compensée partiellement par les bonnes perspectives des échanges de services, portées par la reprise des voyages et du tourisme : « nous prévoyons une hausse de 5 % des volumes des exportations mondiales de services cette année après une hausse de 10 % en 2022, indique la note d’Oxford Analytics. En conséquence, le commerce mondial total de biens et services augmentera très légèrement en 2023 ».
Pour ces analystes, malgré la fin des perturbations dans les chaînes d’approvisionnement ainsi que la baisse des prix de l’énergie et du fret, plusieurs facteurs pèsent sur l’évolution du commerce international de marchandises, dont certaines tendances sectorielles liées à la fin de la pandémie, la hausse des taux d’intérêt, le « découplage » occidental de la Chine et la baisse des investissements directs étrangers (IDE). Arrêtons-nous sur trois de ces facteurs.
L’automobile et l’aéronautique à la traîne
Concernant les facteurs sectoriels, les exportations d’automobiles et de l’aéronautiques n’ont toujours pas retrouvé leurs niveaux d’avant crise sanitaire.
« Le commerce automobile est toujours inférieur d’environ 8 % aux niveaux moyens de 2019, bien que quelques exportateurs comme la Corée et la Chine connaissent une bonne reprise, contate Oxford Economics. Et le commerce des produits aéronautiques et spatiaux reste environ 40 % inférieur au niveau de 2019, ce qui freine les exportations globales des principaux producteurs de ce domaine comme les États-Unis, le Royaume-Uni, l’Allemagne et la France ».
Autre secteur en recul, cette fois-ci dans le cadre d’un retour à la normal : les semi-conducteurs, dont les ventes mondiales ont drastiquement chuté (- 25 %) par rapport à leur pic de 2022, entraînant un recul des exportations des producteurs asiatiques (Corée du Sud, Taiwan, Chine…).
La hausse des taux d’intérêt pénalise la consommation et l’investissement
La hausse des taux d’intérêt a pour sa part un impact négatif sur le commerce mondial par le canal de la consommation et des investissements, en baisse à la suite de la hausse du coût de l’argent. D’après l’institut britannique,
« l’effet devrait être particulièrement notable pour le commerce des biens d’équipement et est déjà visible, les exportations de biens d’équipement des États-Unis, de l’Allemagne et du Japon ayant baissé d’environ 2,5 % en glissement annuel au début de cette année ». Oxford Economics estime ainsi « que les exportations de biens d’équipement pourraient baisser d’environ 10 % ».
Chute de la part de la Chine dans les importations américaines
Concernant le découplage entre l’Occident et la Chine, sous l’influence de la stratégie américaine visant à stopper l’accès de son rival à des technologies jugées sensibles, ses effets commencent à se faire sentir, notamment sur les échanges États-Unis – Chine.
Au 4ème trimestre de 2022, la part de la Chine dans les importations américaines est tombée à 13,9 %, contre environ 21 % en 2018, avant l’arrivée des surtaxes Trump. Et cette chute est encore plus prononcée dans les secteurs technologiques visés par les Américains : de 40 % à 27 % pour les équipements électriques et de 50 % à 30 % dans l’électronique et l’informatique (de 50 % à 30 %).
Certes, d’autres fournisseurs ont pu « capter » ces parts de marchés perdues par la Chine, mais la relance de la production américaine dans ces domaines commence peut-être à produire des effets en baissant les importations. En outre un recul de la Chine est également observé dans les importations japonaises. L’Europe reste à la traîne mais pourrait à son tour réduire ses achats à la Chine comme en témoigne la récente décision des Pays-Bas de restreindre ses exportations d’équipements pour la fabrication de semi-conducteurs vers l’ex. Empire du Milieu.
C.G