Marché
réputé impraticable, la Russie est pourtant une terre d’opportunités pour les
entreprises étrangères. A condition qu’elles y soient préparées. Jeudi 23
février un séminaire organisé par le Cercle Kondratieff, en partenariat avec le
cabinet Gradient Alpha, faisait le point sur les écueils à éviter et les bonnes pratiques pour réussir
en terre russe.
« Le discours du président Medvedev sur
la modernisation est motivé par la crise de 2008, qui a souligné les défauts
d’une économie de rente, et par le fait qu’il y a en Russie un fossé entre les
compétences techniques, par ailleurs d’excellent niveau, et le marché »,a expliqué Jean-Louis Truel,
vice-président du Cercle Kondratieff. « Les
entreprises étrangères sont donc les bienvenues si elles procèdent à des
transferts de compétences techniques et managériales ».
A condition
également de respecter scrupuleusement les nombreuses règlementations en vigueur. L’exemple le plus
flagrant étant celui des certifications. « Il
y a en Russie entre 40 et 50 certifications dépendant d’une multitude
d’administrations, détaille Michel Morand, directeur général de Griffon
International, installé à Moscou depuis plus de 15 ans. De plus les certifications sont en train de glisser vers le système
européen. Cet entre-deux crée beaucoup de difficultés et de confusion ».
Et pour éviter les tracasseries administratives, comme des contrôles à
répétition, M. Morand conseille de faire la tournée des administrations sitôt
arrivé en Russie : « Avec les
administrations comme avec les entreprises, les relations personnelles sont
importantes en Russie, mieux vaut se faire connaître ».
Autre
domaine dans lequel il convient de ne pas sortir des clous : la
comptabilité. Pour Pavel Gagarine,
président de Gradient Alpha, cabinet
d’expertise comptable spécialisé dans les petites et moyennes entreprises, « moins exposées au risque politique et
beaucoup moins au risque administratif », il est primordial de
recruter un comptable maîtrisant plusieurs systèmes de comptabilité. « L’IFRS, qui devait être adopté par
toutes les entreprises russes en 2013 le sera certainement en 2015 et ne
concerne pour l’instant que les banques, les assurances et les très grandes
entreprises. Les filiales de sociétés étrangères doivent avoir trois
comptabilités : une pour la Russe, une pour leur pays d’origine et une
comptabilité consolidée », a expliqué M. Gagarine.
Et cette
comptabilité doit être réglée au cordeau car les contrôles sont
fréquents : « En 2003, 13 % des
entreprises que nous suivons ont été contrôlées par le fisc, aujourd’hui c’est
95 % et on observe une forte hausse de l’attention de tous els organes de
contrôles sur els entreprises étrangères ». En outre, pour éviter les
excès de zèle de l’administration fiscale, mieux vaut s’en tenir à quelques
règles de bon sens, selon Pavel Gagarine : « Tout d’abord, le fisc russe voit d’un mauvais œil le transfert
des profits des filiales étrangères hors de Russie. Donc il vaut mieux créer
une société anonyme de droit russe, cela attire moins l’attention. Dans le même
esprit, il est préférable de s’en tenir à l’activité que vous avez déclarée. Si
vous faites des meubles par exemple, tenez vous en aux meubles et si vous
voulez vous lancer dans d’autres activités, créez des entités séparées ».
En Russie,
l’expertise des sociétés étrangères est bienvenue, parce qu’elle pallie des
manques du monde de l’entreprise russe. Mais les candidats à une implantation
doivent respecter à la lettre des règles strictes.
Sophie
Creusillet