Contrats et accords commerciaux se multiplient entre la France et la première économie africaine. La première entend rattraper son retard au sein du « pré carré anglo-saxon », la seconde a besoin de sécurité énergétique.
« Huitième, ce n’est pas une place pour la France, ça… » Nicolas Sarkozy entend faire grimper l’Hexagone de quelques rangs dans la liste des partenaires commerciaux de l’Afrique du Sud. Il est venu le faire savoir, pendant deux jours, au Cap, les 28 et 29 février dernier. Le timing semble parfait : en pleine crise énergétique à cause des déboires du fournisseur d’électricité Eskom, Pretoria ne demande pas mieux que de bénéficier de quelques investissements français supplémentaires. L’annonce symbolique de l’arrivée d’ingénieurs d’EDF dès le 5 mars a d’ailleurs soulevé l’enthousiasme. « Ils doivent identifier les compétences nécessaires pour Eskom, détaille Frédéric Dioré, directeur d’EDF South Africa. Les besoins en matière d’exploitation nucléaire seront, eux, identifiés par les équipes déjà en support à l’exploitation de Koeberg – la seule centrale nucléaire du pays, construite par Areva au début des années 80. »
« Toute l’équipe de France de l’énergie s’est réunie… en Afrique du Sud », ironise Nicolas Sarkozy, qui a signé un accord de coopération renforcée en la matière. De fait, en cette fin février, Alstom s’engage aussi sur un contrat colossal avec Eskom : la construction d’une centrale à charbon de 4 740 MW, pour 1,36 milliard d’euros. Alstom, qui avait déjà obtenu un marché similaire en novembre 2007, fournira six turbines, six turbogénérateurs et l’équipement auxiliaire.
Un autre contrat vient d’être conclu entre l’Agence française de développement (AFD) et Eskom, qui porte sur le financement de 60 éoliennes, pour 100 millions d’euros, au nord du Cap. Il s’agit du premier projet de ferme éolienne commerciale en Afrique du Sud, et du plus important à ce jour en Afrique sub-saharienne. Un fonds d’investissement de 250 millions d’euros a par ailleurs été débloqué par l’AFD, qui devrait être consacré, notamment, aux énergies renouvelables.
Areva intensifie enfin sa présence dans le pays, en signant un contrat de 80 millions d’euros avec Rio Tinto Alcan pour sa future fonderie d’aluminium, près de Port-Elizabeth (sud). En toile de fond, c’est évidemment l’offre du français en direction d’Eskom qui occupe les esprits : la construction d’un parc nucléaire de 20 000 MW d’ici à 2025. Areva est ici opposé à l’américain Westinghouse. Une réponse est attendue en juin pour un premier appel d’offres portant sur deux réacteurs EPR de troisième génération
Hors secteur énergétique, un contrat porte sur la formation professionnelle. François Fillon, en octobre 2007, s’était engagé à ce que la France fasse un effort. Seront ainsi formés 100 managers sud-africains tous les deux ans (en France), des hauts fonctionnaires au sein de l’ENA, 167 ingénieurs et techniciens supérieurs au French South African Technical Institute in Electronics tous les deux ans, et 50 cadres municipaux en 2008.
Côté secteur privé, Medef et Busa (Business Unity South Africa) définissent aussi comme prioritaires l’énergie, les transports, la formation et le tourisme : « Le champ est considérable pour accroître les échanges et aller au-delà du total actuel de 200 000 visiteurs. Les opportunités sont notamment réelles pour les PME. » Un accord de coopération a d’ailleurs été signé dans la perspective du Mondial 2010, et un fonds de garantie pour les PME, de 250 millions d’euros, est annoncé.
Un accord – sans dispositions financières – lie enfin les deux ministères des Transports. Cet accord privilégie les domaines de l’aviation civile, du transport maritime, des infrastructures routières, de la sécurité routière et ferroviaire, des services de transport.
Antoine Gazeau
La France 8e partenaire commercial
Les échanges bilatéraux connaissent, depuis 2000, une bonne progression (+ 40 %). Ils ont atteint 2,7 milliards d’euros en 2007. « Hors aéronautique (arrêt des livraisons d’Airbus), nos ventes avaient progressé de 20 % en 2006, précise la Mission économique à Johannesburg. En 2007, la diversification de nos exportations compense la faible performance du secteur automobile (-33 %). » La balance commerciale penche toujours en faveur de la France, même si les importations de produits sud-africains (notamment industriels et agricoles) ont nettement crû en 2007 (+12 %). Au total, la France est le huitième partenaire commercial de l’Afrique du Sud, loin derrière l’Allemagne (14 % de parts de marché) et la Chine (10 %). Au tableau des investisseurs, elle est sixième, avec un encours de 810 millions d’euros en 2006. Le stock d’investissements augmente chaque année, et un tiers d’entre eux se dirigent vers l’industrie…