Malgré le durcissement de la réglementation sur les investissements étrangers, l´Algérie demeure une cible prioritaire pour les PME françaies. D´abord, parce que ce pays pétrolier investit lourdement dans ses infrastructures. Ensuite, parce que la consommation s´y développe. Enfin, parce que la « French Touch » y est toujours appréciée. Le point sur les secteurs porteurs en collaboration avec la revue « Partenaires » de la Chambre française de commerce et d´industrie en Algérie (CFCIA).
Troisième mandat. Au coin d´une avenue, le long d´un mur, on ne peut les manquer. Les affiches grand format du candidat Abdelaziz Bouteflika ornent toujours Alger, plus d´un mois après le scrutin présidentiel du 9 avril. Après avoir enregistré une très nette victoire (plus de 90 % des votes), le chef de l´État depuis 1999 entame son troisième mandat. Les milieux d´affaires ne commentent pas sa réélection qui était attendue.
L´actualité du moment est la Foire internationale d´Alger, la grande exposition annuelle du savoir-faire mondial, qui se tiendra cette année du 30 mai au 4 juin au Palais des expositions de la capitale. Une centaine d´entreprises françaises vont y exposer sous le pavillon France de la Chambre française de commerce et d´industrie en Algérie (CFCIA) et de la CCI de Paris (CCIP).
À Alger comme à Paris, les commentaires vont bon train s´agissant des instructions données fin 2008 par le Premier ministre, Ahmed Ouyahia. Ces circulaires marquent un durcissement à l´encontre des opérateurs et des investisseurs étrangers. « Elles ne doivent pas les inquiéter », affirme Claude Joly, président de la section Algérie des conseillers du commerce extérieur de la France (CCEF). « Le projet de loi, qui était promis en février dernier, n´est toujours pas sorti », remarque-t-il.
De son côté, Michel de Caffarelli, qui préside la CFCIA, ne cache pas son inquiétude. Le ministre des Finances, Karim Djoudi, après avoir annoncé que l´une des mesures phares des instructions Ouyahia – la cession de 30 % du capital des sociétés d´importation à des Algériens – ne s´appliquerait pas de façon rétroactive, a déclaré le contraire il y a une quinzaine de jours. Au grand dam, on l´imagine, des 1 600 sociétés d´importation étrangères !
« Avec la crise financière mondiale, l´Algérie observe un retour de l´État dans les nations occidentales, ce qui l´incite à demander une meilleure répartition du pouvoir économique dans le pays », estime Marc Bouteiller, le chef de la Mission économique à Alger. De façon concrète, le gouvernement veut favoriser l´émergence de grandes entreprises publiques, mais aussi de sociétés privées.
Pour l´instant, Alger n´a pas précisé ses intentions concernant l´autre mesure emblématique des circulaires du Premier ministre : l´entrée de partenaires algériens à hauteur de 51 % dans le capital des sociétés de production.
Une mesure, au demeurant, déjà couramment pratiquée dans les hydrocarbures et le ciment. S´agira-t-il de 51 % de capital algérien pour tout investisseur étranger, ou seulement quand
celui-ci bénéficiera d´avantages (les prix du gaz intérieurs, des subventions publiques) ou s´inscrira dans une démarche de privatisation ? Autre interrogation : si l´opérateur international ne détient que 49 % du capital, pourra-t-il, néanmoins, obtenir le management ?
Peu pressée d´entrer à l´Organisation mondiale du commerce (OMC), l´Algérie ne veut pas se faire dicter sa politique de l´extérieur. Toutefois, les investissements directs étrangers (IDE) demeurent « modestes », selon le FMI (1 % du PIB entre 2001 et 2007), et Alger ne peut se passer réellement des opérateurs internationaux. C´est notamment vrai avec la France, premier investisseur hors hydrocarbures, dont les IDE ont augmenté de 50 % en 2008.
Le président Bouteflika, qui effectuera une visite en France d´ici à la fin de l´année, « doit donner confiance aux entreprises françaises », affirme Michel de Caffarelli. Ses relations personnelles avec son homologue français sont bonnes. Le chef de l´État algérien était présent au sommet fondateur de l´Union pour la Méditerranée (UPM), initiée par Nicolas Sarkozy.
Un accord de coopération nucléaire a été signé en juin 2008. Il est aussi question de coopération militaire.?La France est sur les rangs pour un marché de 8 milliards d´euros portant sur la livraison de quatre frégates. Il y a surtout qu´Alger va poursuivre sa politique de grands travaux. Certes, les cours du baril de pétrole se sont effondrés. Mais l´Algérie, ces dernières années, s´est constitué un confortable matelas de devises. « Ce pays a la capacité de financer son programme d´infrastructures pendant au moins trois ans », estime Marc Bouteiller. « Il se trouverait en position délicate si les prix du pétrole ne finissaient pas par remonter à 70, 80 et 90 dollars. Mais cette baisse à 40 dollars le baril aujourd´hui n´aura qu´un temps », assure Michel de Caffarelli.
La consommation se développe aussi, les salaires commencent à augmenter. « Grâce à des prix abordables et à des produits innovants, le marché du yaourt a doublé et celui des biscuits gagne 10 à 15 % par an », se réjouit Claude Joly, également directeur de Lu Algérie. Créée en 2006, la filiale de Kraft est aujourd´hui numéro deux du biscuit avec 26 % de parts de marché, derrière l´algérien Bimo (32 %). Elle porte cette année sa production à 15 000 tonnes, contre 8 000 en 2008. Lu Algérie pourrait devenir numéro un en 2009, avec des produits adaptés au porte-monnaie de la ménagère. S´adapter est le maître mot. Symbole d´une « French Touch » qui a toujours la cote : la Boutique officielle de l´Olympique de Marseille (OM), installée à Marseille, fait recette.
François Pargny, envoyé spécial en Algérie, avec la revue « Partenaires »