L’onde
de choc de la catastrophe japonaise de Fukushima va toucher finalement plus les
modèles énergétiques de plusieurs pays européens que l’environnement. En effet,
le fait que la première économie européenne, à savoir l’Allemagne, qui compte
17 réacteurs, ait décidé de se passer de nucléaire à partir de 2022 a frappé les esprits. Avec
le rationalisme qui les caractérise, difficile de penser que les Allemands
aient pris une décision à la hâte, même si des considérations électorales ont
pu peser. D’ores et déjà huit réacteurs ont été stoppés suite à l’accident
nucléaire au Japon et ne seront pas remis en marche. Six réacteurs ne seront
plus en service d’ici fin 2021. L’un deux restera à l’état de veille jusqu’en
2013 en cas de pic de consommation. Les trois derniers s’arrêteront fin 2022.
Pour
pallier la disparition de 22% d’électricité d’origine nucléaire, les énergies
utilisées en Allemagne seront le charbon, du gaz russe (la construction d’un
gazoduc appelé Nordstream avait déjà été acté avant la décision allemande de
sortie du nucléaire) et du pétrole. Les autres ressources proviendront des
économies d’énergie (la consommation d’électricité sera réduite de 10% d‘ici à
2020) et de la part des énergies renouvelables qui passera à 35% à la même
échéance. On peut ajouter que l’achat d’électricité provenant de voisins,
notamment la France,
est sans doute aussi prévue.
Au
total, le coût prévu de cette sortie du nucléaire avoisinerait 16 à 40 milliards
d’euros, selon les sources, et l’électricité pour le consommateur allemand sera
sans doute plus chère qu’actuellement. Si EDF vendra peut-être plus
d’électricité à l’Allemagne, à long terme la ressource du retraitement des
déchets nucléaires allemands se tarira et on peut compter sur les entreprises
allemandes spécialisées dans les énergies renouvelables pour vendre à l’export
leurs appareils ou leurs technologies.
D’autres pays européens ont
pris des décisions similaires. Ainsi, la Suisse (39,5% de l’électricité d’origine
nucléaire en 2009) a décidé le 15 mars dernier de suspendre le remplacement de
trois centrales et d’anticiper l’examen des installations existantes (5
réacteurs dans 4 centrales). En Italie (10% d’électricité d’origine nucléaire
importée des pays voisins, la
France essentiellement), le référendum des 12 et 13 juin
dernier a décidé qu’il n’y aurait pas de
construction de nouveaux réacteurs dont la mise en service était prévue
en 2020. La décision a un impact pour la France puisque EDF était associée avec
l’électricien national Enel pour construire quatre réacteurs EPR d’Areva.
Jean-François
Tournoud