Les Slovaques entameront leur présidence tournante de l’Union européenne (UE) le 1er juillet prochain, dans un contexte particulièrement délicat. Outre les risques d’un « Brexit » – susceptible de bouleverser l’agenda européen – ils hériteront, de la présidence néerlandaise, une série de dossiers sensibles, notamment dans la sphère commerciale, avec des traités important en phase finale.
En tête des priorités dans ce domaine : la mise en œuvre rapide de l’accord de libre-échange UE-Canada (CETA). Le Conseil de l’UE – organe de représentation des 28 États membres à Bruxelles – devra apposer son ultime signature au traité commercial avant la fin de cette année, probablement lors du sommet bilatéral entre les deux blocs programmé le 28 octobre.
L’accord de libre-échange négocié avec le Japon pourrait également être conclu, au niveau technique, au cours de la présidence slovaque de l’UE, conformément aux engagements annoncés par les leaders européens et japonais en marge du G7. Si le calendrier est respecté les pourparlers entameront leur sprint final au dernier trimestre de 2016. Durant cette période, les négociateurs devront tenter d’arracher des compromis sur les volets les plus difficiles de l’accord.
Les discussions de libre-échange avec Washington pour le Partenariat transatlantique (TTIP ou TAFTA) figurent elles aussi en tête des priorités de la représentation slovaque à Bruxelles. Alors que certains États membres, dont la France, ont récemment affiché un scepticisme croissant, la Commission et la Présidence de l’UE devront tenter de resserrer les rangs au sein des 28. Mais faute d’avancées significatives sur les chapitres les plus controversés, comme les marchés publics ou les mécanismes d’arbitrage investisseurs/État, les négociations pourraient s’enliser et être repoussées à une échéance encore incertaine.
Un autre dossier épineux et politiquement sensible concerne l’octroi du statut d’économie de marché à la Chine à l’OMC (Organisation mondiale du commerce). L’exécutif européen présentera sa copie en juillet, avec plusieurs mois de retard. La Présidence devra ensuite arbitrer les débats entre les États membres – divisés en deux camps pour / contre sur la question – afin de tenter de dégager une position commune d’ici au mois de décembre.
Les Slovaques espèrent également avancer sur le texte relatif aux minerais en provenance des zones de conflit (appelés « minerais du sang ») afin de trouver, après des années de discussions, un terrain d’entente entre le Conseil et le Parlement européen. La législation en discussion vise à s’assurer que les importateurs européens de certains minerais (étain, tantale, tungstène, or…), en provenance de zone de guerre – en particulier de la République démocratique du Congo et de la région des Grands Lacs – ne participent pas au financement de groupes armés. Pour ne pas léser les entreprises de l’UE, face à des concurrents peu scrupuleux, notamment les Chinois, la Commission avait simplement proposé l’introduction d’un label de responsabilité, mais sur une base volontaire. Le texte adopté par les eurodéputés veut quant à lui imposer une certification obligatoire pour certains acteurs de la chaîne comme les fondeurs ou les raffineries.
Dernier dossier controversé à l’agenda de la présidence slovaque : le texte relatif à la modernisation de l’arsenal de défense commercial de l’UE. Bloqué depuis trois ans au Conseil, il est désormais étroitement lié à l’octroi du statut d’économie de marché à la Chine. La coalition des pays « anti dumping », parmi lesquels figure la France, prône son adoption rapide pour renforcer les moyens de défense de l’UE. Avec un secteur sidérurgique qui représente le premier employeur privé dans le pays, les Slovaques sont également favorables à une attitude plus agressive face au jumping chinois. Ils misent donc sur leur présidence pour aboutir à une révision des législations commerciales européennes en la matière.
Kattalin Landaburu, à Bruxelles