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Aquitaine : les secrets d’un modèle de pilotage de l’export

L’Aquitaine offre l’image d’une région en ordre de marche pour mener à bien ses ambitions exportatrices : son plan d’action est sur pied, ses priorités identifiées, la région est à la manœuvre, ses partenaires donnent le sentiment d’un ensemble soudé pour servir la même cause. Au point d’être cité en modèle par Bercy. Pourquoi ? Décryptage dans ce dossier spécial.

Pas une voix n’a manqué pour voter, le 21 octobre en assemblée plénière du Conseil régional, le Plan régional d’internationalisation des entreprises (PRIE), pas une, de la gauche à la droite en passant par les Verts. Et sans aucune « réserve » précise Eric Guilloteau, conseiller régional (PS) des Landes délégué à l’export, qui ajoute qu’il existe sur ce vaste territoire qui va de l’estuaire de la Gironde à la frontière avec l’Espagne, une « prise de conscience que le commerce extérieur, c’est l’emploi ».

De fait, la région n’a pas hésité à répondre positivement à l’appel de Pierre Lellouche, secrétaire d’État au Commerce extérieur sous l’ancien gouvernement, et signer la première charte régionale de l’export en 2011. Et à s’atteler sérieusement à la tâche de remettre à plat sa politique dans ce domaine. De leur côté, les chambres de commerce et d’industrie (CCI) avaient elles-mêmes engagé une restructuration dont CCI International, qui mutualise leurs services en matières d’accompagnement des entreprises à l’export, est l’un des résultats les plus aboutis. Le PRIE était une commande de Nicole Bricq, arrivée aux manettes du Commerce extérieur en juin 2012 : « Elle est arrivée au bon moment, on a décidé d’en faire un outil pour nous », résume Eric Guilloteau.

Sans doute, la pâte personnelle du président de Région, Alain Rousset, par ailleurs président de l’Association des Régions de France (ARF), a-t-elle joué dans cet aboutissement : il revendique sa passion pour les problématiques de développement économique née d’expériences professionnelles antérieures (voir son interview). D’où son penchant pour le pragmatisme et la concertation avec les entreprises, qu’il a associées aux réflexions, d’abord avec un Club ETI créé en novembre 2011 – présidé par le patron d’un champion régional de l’export, Eric Prikazsky, P-dg de Ceva Santé Animale –, puis avec un comité d’experts d’une quinzaine de membres associant des ETI et des PME qui a directement planché sur le PRIE. Dans les milieux d’affaires aquitains, on ne manque pas non plus de citer Jean-Claude Fayat, dirigeant du groupe éponyme, en tant que président de la section régionale des Conseillers du commerce extérieur de la France (CCEF) et vice-président de la CCI régionale (CCIR), chargé d’animer CCI International, et bien sûr Laurent Couru, président de la CCIR.

De sorte que pas une signature non plus n’a manqué lorsque qu’il a fallu que tous les partenaires de la Région s’engagent solennellement, en présence de la ministre du Commerce extérieur Nicole Bricq, sur ce document de 80 pages, détaillé et budgété, qui fixe pour trois ans les objectifs, les moyens et la méthode pour générer 385 nouvelles entreprises exportatrices « durables ». CCEF d’Aquitaine, Bpifrance, CCI International, Coface, Préfecture de Région, Ubifrance, Douane, aucun n’a manqué. « On a le sentiment très fort d’appartenir à une équipe », s’est même exclamé Laurent Courbu. Avec un résultat concret immédiat qu’applaudissent les milieux d’affaires : « la simplification » comme l’indique Marc Prikazsky (voir son interview).

Ici, la Région a donc pris à bras-le-corps le nouveau leadership dans les politiques publiques de développement économique que lui confère la nouvelle phase de la décentralisation, et dont le développement international des entreprises est devenu, sous l’impulsion de Nicole Bricq, un volet essentiel. Non sans fermeté : elle a bataillé jusqu’à la dernière minute avec Bercy pour arracher aux organismes d’État la promesse qu’ils s’intégreraient dans cette politique régionale. Mais en concertation avec les acteurs qui s’y impliquaient déjà en ordre dispersé. « Aujourd’hui, la Région assume son rôle de chef de file, mais ce n’est pas pour faire du colbertisme régional, résumait Alain Rousset le 14 novembre dernier. Aujourd’hui, on est dans un travail collaboratif ».

Dans ses grandes lignes, le PRIE a pour objectif, outre de faire émerger ces nouveaux exportateurs durables, de redynamiser un commerce extérieur dont l’excédent s’effrite : il a été divisé par trois depuis 2010, malgré la success story du bordeaux en Chine ! « L’Aquitaine, parmi les régions, représente le sixième PIB de France mais elle n’est que la douzième région exportatrice », constate Eric Guilloteau. La création d’un Observatoire des échanges internationaux dès janvier 2014, dont le projet est confié à la CRCI, vise à améliorer la connaissance du tissu exportateur de la région – notamment les exportations indirectes via des donneurs d’ordre dont le siège est dans d’autres régions – et à améliorer l’efficacité de sa politique.

Deux leviers d’actions ont par ailleurs été définis : premièrement pousser les filières jugées porteuses pour lesquelles l’Aquitaine est certainement moins connue à l’étranger que le bordeaux : Aéronautique-spatial-défense ; agroalimentaire et viniculture ; santé ; croissance verte ; numérique ; optique-photonique-laser. Et deuxièmement encourager une diversification géographique de débouchés pour moitié concentrés sur seulement quatre marchés : États-Unis, Espagne, Allemagne, Royaume-Uni.

Il s’appuie sur un dispositif organisé en plateformes — une pour l’accompagnement dont la porte d’entrée est CCI International et une autre pour le financement co-gérée par la Région et Bpifrance —, des plans d’actions par filières et clusters et une structuration des différentes aides autour d’un parcours de l’export : fini les chèques sans projets solides à la clé, les entreprises immatures pour l’export devront d’abord passer par la case « diagnostic ». Déjà dotée d’un site Internet portail dédié (www.export.aquitaine.fr), la Région ambitionne aussi de parvenir à aller jusqu’au bout de la logique de simplification des démarches via l’ouverture d’un site Internet dédié en 2014, où les entreprises fourniront une bonne fois pour toutes les données réclamées par les différents organismes.

La création « d’incubateurs » à l’étranger est également prévue en Allemagne, aux États-Unis, au Brésil et en Chine à la demande des entreprises. Un budget de 500 000 euros est alloué par la Région mais là aussi, on affiche une approche prudente : pas question de multiplier les infrastructures en propres coûteuses, elle s’appuiera sur des partenaires. Le cahier des charges est en cour d’élaboration, un appel d’offres sera lancé dans le courant du premier semestre 2014 : l’idée est de trouver des partenaires globaux avec des lots par pays. « Nous au moins passons par un appel d’offres » remarque non sans malice – à l’égard des pratiques de certains organismes nationaux – Anne-Cécile Petit, chef du Service export et action régionale au Conseil régional, un des piliers de cette équipe régionale de l’export.

L’augmentation du nombre d’exportateurs est un vrai challenge : 13 000 sont recensés en Aquitaine mais le chiffre tombe à 1 336 pour les seules entreprises indépendantes de grands groupes exportant entre 100 000 et 1 million d’euros/an, et à seulement 684 au-delà du million d’euros… En l’occurrence, le cœur de cible principal du plan d’action aquitain – qui s’intègre dans le plan Bricq des 1 000 ETI – est constitué de 1 857 PME et ETI indépendantes jugées à potentiel. Rendez-vous dans un an ou deux pour voir si le remède a été à la hauteur de l’ambition.

Christine Gilguy

Pour voir la carte sur l’Aquitaine et ses filières d’excellence à l’export, cliquer ici


Les chiffres clés de l’export

Commerce extérieur 2012 (en million d’euros)
12e Région exportatrice et importatrice de France
Exportations : 13 547 (- 1,8 %).
Solde commercial : 685

Le top 5 des secteurs export
1/ Agriculture et agroalimentaire : 36 % (+ 7 %)
(Dont vins 2 541 millions d’euros, + 16 %)
2/ Construction aéronautique et Espace : 17 % (- 3 %)
3/ Chimie, plastique et cosmétique : 15 % (- 0,3 %)
4/ Industrie du bois : 8 % (- 2 %)
5/ Sidérurgie, acier : 547 (4 %, + 4 %)

Le top 5 des destinations
1/ États-Unis : 15 % (+ 3 %)
2/ Espagne : 15 % (- 8 %)
3/ Royaume-Uni : 10 % (+ 11 %)
4/ Italie : 5 % (- 16 %)
5/ Belgique : 5 % (+ 5 %)
(Chine : 4 %)

Les entreprises qui exportent
Nombre 2012 : 13 000
Répartition par taille :
– de 249 salariés
: 74,4 % ; + de 250 salariés : 4,1 %
Nombre de premiers exportateurs
: 1 010
Nombre de PME indépendante exportant entre 100 000 et 1 million d’euros : 1 857
Nombre d’ETI exportatrices : 477
Source : Douanes et CCI International

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