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Trois questions à Jacky Deromédi, présidente de la section Singapour des Conseillers du Commerce extérieur de la France (CCEF)

Le Moci. Singapour est la troisième destination des investissements directs étrangers (IDE) en Asie de l’Est et du Sud-est. Avec la flambée des coûts de l’immobilier ou de la main d’œuvre et la difficulté croissante à employer des expatriés, n’y a-t-il pas un risque que la cité-Etat perde cette place ?

Jacky Deromédi. Singapour demeure pour les affaires un endroit privilégié. Il n’y a pas de problèmes de marques ou de contrefaçons, la protection juridique est totale, ce qui n’existe pas, par exemple, dans la Malaisie toute proche. Le système financier est aussi très encadré, très réglementé. La monnaie est stable et plutôt forte, comme la situation politique est aussi stable, ce qui est rassurant. Alors c’est vrai qu’avec le renforcement de la concurrence les coûts ont augmenté et donc les marges des entreprises ont baissé. De ce point de vue, on peut dire que ce pays est moins attractif. Mais, ce qui est fondamental, c’est qu’il reste une terre privilégiée pour les affaires et pour les implantations, les autorités ayant mis en place des systèmes financiers particulièrement intéressants. Pour les grandes entreprises, on y déroule le tapis rouge. Quant aux PME, elles ont, il est vrai, plus de mal, mais elles doivent aussi savoir qu’en s’établissant sur place l’impôt sur leurs bénéfices est supprimé pendant trois ans.

Le Moci. Toutefois, il semble que certaines entreprises préfèrent s’installer aujourd’hui dans la zone d’Iskandar au sud de la Malaisie plutôt qu’à Singapour…

J.D. Singapour préfère accueillir des centres de recherche et, donc, les autorités encouragent les PME locales à créer des ateliers, des entrepôts dans la zone d’Iskandar. S’agissant des étrangers, ils peuvent être tentés effectivement d’y résider, parce que c’est moins cher, parce qu’il y a des écoles internationales pour leurs enfants, tout en travaillant à Singapour. Ce qui sous-entend qu’il faut parcourir le trajet entre Iskandar et Singapour tous les jours. Cette approche n’est pas susceptible de remettre en cause le rôle de hub régional de Singapour.
Toutefois, il paraîtrait tout à fait justifié que des entreprises françaises optent pour une double implantation, à savoir choisir la Malaisie pour leur production de base et Singapour pour la recherche et développement (R&D) et des fabrications à forte valeur ajoutée.

Le Moci. Lors de la visite de Jean-Marc Ayrault, alors Premier ministre en octobre 2012, la présence insuffisante de la France dans les technologies de la santé et le bien être de la personne a été soulignée. Où en est-on aujourd’hui ?

J.D. Dans la délégation du chef du gouvernement, il y avait la PME MaSanté, qui fabrique des matériels et des logiciels de recueil d’information sur les patients et de gestion des lits d’hôpitaux. Elle a depuis vendu 500 appareils, ce qui justifierait une implantation sur place.
D’autres entreprises françaises sont déjà installées, comme Mérieux, Sanofi, Urgo ou la PME de biopharmacie Moléac. Singapour est un hub médical, avec un tourisme spécialisé en développement. Et comme il y manque des lits, les autorités cherchent à réduire la durée des hospitalisations et encouragent les soins à domicile. Ce sont des tendances que doivent absolument prendre en compte nos entreprises. Singapour met l’accent sur la R&D et offre des incitations fiscales très alléchantes. Pour attirer l’industrie pharmaceutique, elle a aussi créé Biopolis, une cité des sciences de la vie.
A l’heure où nous parlons, doit être signé le 30 mai un accord de coopération dans les hautes technologies entre l’Agence nationale de la recherche (ANR) et le CNRS, côté français, et l’Agence pour la science, la technologie et la recherche (A*Star), côté singapourien.

Le Moci. L’Asean Economic Congress s’est tenu le 2 avril dernier à Jakarta (Indonésie). Dans quelle mesure les engagements pris pour la future Communauté économique de l’Asean (EAC) est intéressante pour Singapour ?

J.D. Les membres de l’Association des nations du sud-est asiatique (Asean) rêvent d’une zone de libre échange de type européen. La difficulté réside dans l’écart de développement entre les plus riches, comme Singapour, la Malaisie ou la Thaïlande, et d’autres qui le sont moins comme le Cambodge, le Laos, Myanmar ou le Vietnam. L’Asean fonctionnant à deux vitesses, libéraliser les tarifs, lever les barrières non tarifaires, faciliter la circulation des capitaux, des personnes, voire des travailleurs qualifiés, n’est pas simple. L’idée est d’avancer d’ici 2015, mais il faudra sans doute attendre 2018 pour des réalisations concrètes. Dès lors, pour les entreprises, quelles qu’elles soient, françaises et autres, ayant une entité juridique dans l’un des pays faisant partie de l’Asean et qui souhaiteraient intervenir ponctuellement à Singapour, elles n’auront plus à subir la retenue à la source sur les revenus de leurs opérations.

Propos recueillis par François Pargny

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