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Dossier Espagne 2016 : un marché de proximité à ne pas oublier

Les entreprises françaises ont toujours eu la faveur de l’Espagne, marché de proximité. Preuve en est que, malgré la crise qui perdure, économique, sociale et politique, les plus audacieuses continuent à s’y développer. Notamment dans les nouvelles technologies.

 

Pour l’Espagne, le premier trimestre 2016 s’annonce périlleux. Non seulement la grande nation de la péninsule ibérique n’est pas remise des pertes abyssales causées par la crise mondiale sur son économie (son produit intérieur brut a chuté de 8 %), mais le voilà plongé dans l’incertitude politique depuis le scrutin législatif du 20 décembre 2015.

 

De nouvelles élections ?

À l’heure où nous imprimons, le Premier ministre Mariano Rajoy s’efforce toujours de former un gouvernement de coalition, son parti, le Parti Populaire (PP), comme le Parti socialiste espagnol (PSOE) et les deux partis émergents, Podemos, radical de gauche, et Cuidadanos, libéral, n’ayant obtenu les 30 % de voix nécessaires pour gouverner seuls. Pour ne rien arranger, depuis le 27 septembre, la Catalogne est aussi privée de gouvernement. Dans les deux cas, faute de compromis, de nouvelles élections devraient être organisées.

En Catalogne, les deux partis indépendantistes, qui ont obtenu à eux deux la majorité au parlement régional, sont en voie de trouver un compromis. On imagine l’impact que pourrait avoir un jour l’indépendance de cette région dominée par Barcelone si elle devenait indépendante. D’abord, il y aurait certainement de nouvelles revendications de la part d’autres régions voulant obtenir des pouvoirs supplémentaires. Ensuite, la perte de la Catalogne porterait un nouveau coup dur à l’économie nationale. Et ce, même si généralement on estime que Barcelone a perdu un peu de son attractivité par rapport à Madrid, « capitale cosmopolite qui s’est renforcée depuis 15 ans, où se trouvent généralement les sièges sociaux des grandes entreprises », remarque Emmanuel Mielvaque, président de la section Espagne des conseillers du commerce extérieur de la France (CCEF). En réalité, Barcelone demeure l’autre pôle d’excellence de l’Espagne avec le Pays basque. « Le Pays basque, qui possède une économie industrielle, mais aussi tournée vers la modernité, les énergies renouvelables, l’éolien, est la région la plus riche d’Espagne en termes de PIB par habitant », assure Jean-François Collin, ministre conseiller pour les Affaires économiques à l’ambassade de France à Madrid.

La Catalogne est une région industrielle et d’entrepreneurs, avec un pôle numérique en expansion, ce qui justifie que Paris veuille créer un French Tech Hub à Barcelone – le projet serait en cours d’approbation et la décision finale pour sa réalisation pourrait être annoncée officiellement lors du Mobile World Congress, devant se tenir dans cette métropole du 22 au 25 février. « Barcelone cherche aussi à se positionner sur le marché lucratif du tourisme de luxe, avec la création d’hôtels et de palaces », note Richard Gomes, directeur de Business France Péninsule ibérique.

Pour nombre d’exportateurs et d’investisseurs de l’Hexagone, l’Espagne demeure un pays phare. « Certes, comme dans tous les Etats européens, on y trouve peu de micro-entreprises françaises. En revanche, nos PME y représentent 60 % du total », souligne Jean-François Collin. Une part qui n’est pas négligeable, si on considère que les quelque 15 220 entreprises françaises exportant en Espagne représentaient 12,6 % de toutes les sociétés tricolores livrant depuis le territoire national.

 

Un marché test de proximité

Autre preuve de l’attractivité du marché espagnol, d’après les calculs du Service économique, les groupes multinationaux français et les filiales françaises de groupes étrangers étaient surreprésentés en Espagne par rapport à la moyenne mondiale (avec, respectivement, 23 % au lieu de 8 % et 24 % contre 10 %). Ainsi, les distributeurs Auchan et Carrefour ont-ils su profiter de l’évolution des habitudes de consommation et l’urbanisation croissante de la population.

« Pour les PME françaises, l’Espagne demeure à l’instar de la Belgique un marché test, un premier marché de proximité qui demande une faible mise de départ », rappelle Richard Gomes. En 2014, le grand voisin du Portugal avait retrouvé son PIB de 2010 mais, à raison d’une croissance économique estimée entre 2,5 et 3 % par an, il faudra attendre 2017 pour renouer avec le niveau de 2009.

La politique menée par Mariano Rajoy a permis à son pays de retrouver un peu de compétitivité et de relancer la consommation interne. Son gouvernement a réformé plusieurs secteurs (énergie, transports, télécommunications) et le marché du travail, en assouplissant le cadre des conventions collectives et introduisant plus de flexibilité dans les salaires. Il a réduit également les dépenses publiques, en décrétant le gel des embauches et des salaires de la fonction publique ou encore en révisant le régime des retraites, et augmenté les recettes, via notamment la hausse de la TVA, des contributions sociales et des impôts sur les entreprises et les personnes. Un remède de cheval qui s’est traduit par la perte de quatre millions d’emplois. Le taux de chômage est de l’ordre de 21 %.

D’après la toute récente étude de l’Observatoire de l’émancipation pour le compte du Conseil espagnol de la jeunesse, « près de 80 % des moins de 30 ans continuent à vivre chez leurs parents » et le départ du domicile familial ne cesse donc d’être retardé (il serait de 28,9 ans). La proportion des moins de 30 ans au chômage était aussi passée de 28 % à 35 % entre 2009 et 2015 et 52 % de leurs emplois étaient temporaires. S’ajoutent que près de la moitié des contrats portaient sur une durée inférieure à un an et que 29 % étaient à temps partiel.

Faute de pouvoir s’émanciper et d’accéder au logement, la main d’œuvre même qualifiée commence à quitter le pays et l’Observatoire pour l’émancipation rapporte que le solde migratoire des 16-34 ans est devenu négatif (- 9 pour 1 000). Compte tenu du contexte politique, économique et social, il n’est pas certain que la situation s’améliore rapidement. Visiblement, l’Etat n’a pas trouvé de nouveaux ressorts de croissance.

 

Des secteurs en croissance

Seuls secteurs en croissance, la construction et le tourisme en plein boum, qui bénéficie des difficultés d’autres pays (Afrique du Nord, voire Turquie). « L’Espagne a reçu 75 millions de visiteurs en 2015 », selon Richard Gomes, qui conseille aujourd’hui aux sociétés françaises toute une série de domaines d’activités à prospecter. « Même pendant la crise, affirme-t-il, il y a toujours eu une forte demande des sociétés espagnoles en matière de technologies ». De même, se félicite-t-il, « avec la reprise de la consommation, des entreprises françaises reviennent pour vendre des produits gourmets, des cosmétiques, pour toucher des acheteurs finaux comme pour trouver des distributeurs ». Dans l’habitat, malgré le chômage des jeunes, « comme les Espagnols sont généralement propriétaires de leurs logements, ils ont continué à investir dans l’habitat pendant la crise, comme le montre le succès de Leroy Merlin », soutient encore le directeur de Business France à Madrid. Deux autres gros secteurs traditionnels pour les fournisseurs français demeurent encore porteurs : automobile et aéronautique. Les grands constructeurs comme Renault et Peugeot ont notamment profité des programmes de soutien mis en place par l’Etat et du coût favorable de la main d’œuvre pour investir pendant la crise.

En mars 2015, Madrid a annoncé son intention de débourser 1,5 milliard d’euros pour cofinancer des projets du Fonds européen pour les investissements stratégiques (FEIS) dans le cadre du Plan Juncker. En matière d’infrastructures, « l’Espagne possède déjà un réseau routier très développé et le deuxième réseau de trains à grande vitesse au monde après la Chine », constate Jean-François Collin.

En revanche, des interconnexions énergétiques, par exemple, avec la France pourraient être construites. Ainsi, après l’inauguration le 20 février 2015 de la  ligne  Baixas–Santa  Llogaia, qui  a  permis  de doubler à 2 800 mégawatts (MW) la capacité d’interconnexion électrique entre la France et l’Espagne, d’autres projets ont été étudiés lors de la première réunion, fin juin 2015 à Paris, du groupe de haut niveau  sur les interconnexions énergétiques France-Espagne-Portugal. Exemple : l’installation d’un câble sous-marin dans le Golfe de Gascogne pour porter la capacité  d’échanges  électriques  à 5 000 MW. Citons encore les liaisons transpyrénéennes électriques et le projet gazier MidCat, qui permettrait à la fois de développer le Corridor Nord-Sud-Ouest de l’Europe et de renforcer l’axe vers le continent africain.

François Pargny

Chiffres clés

Superficie : 505 911 km2
Population : 46,5 millions d’habitants
Croissance économique (troisième trimestre 2015) : 3,4 % (objectif du gouvernement : 3,3 % en 2015) (prévision de croissance : 2,5 % en 2016)
Stock d’IDE : 721 879 millions de dollars en 2014
Chômage (troisième trimestre 2015) : 21,1 %
Exportations de biens (janvier-octobre 2015) : 203,53 milliards d’euros (+ 1,19 %). France, premier client (15,62 %), devant Allemagne (10,67 %)
Importations de biens (janvier-octobre 2015) : 224,34 milliards d’euros (+ 0,68 %). Allemagne, premier  fournisseur (12,94 %), devant France (10,74 %)

Sources : Institut national de la statistique (Ine), sauf commerce extérieur GTA/GTIS

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